S'abonner

Les approches psychanalytiques du mensonge - 08/07/17

Psychoanalytic approaches to lying

Doi : 10.1016/j.evopsy.2017.06.003 
Sébastien Chapellon a, , b  : Psychologue clinicien, Docteur en psychologie clinique, Membre de l’équipe d’accueil MINEA (Migrations, Interculturalité et Éducation en Amazonie), Membre associé du Laboratoire de Psychologie Clinique et Psychopathologie (EA 4056), Enseignant, Évelyne Grange-Ségéral c, d : Maître de conférences en psychopathologie clinique, ex-présidente de la Société française de thérapie familiale psychanalytique (SFTFP), membre de l’association pour le développement du soin psychanalytique familial, membre du CRPPC
a DFR LSH, université de la Guyane, campus universitaire de Troubiran, BP 9722091, route de Baduel, 97337 Cayenne cedex, France 
b Institut de psychologie, université Paris Descartes, Sorbonne Paris-Cité, Paris, France 
c Université Lumière, Lyon 2, France 
d CRPPC, université Lumière, campus de Bron, 5, avenue Pierre-Mendès-France, 69676 Bron cedex, France 

Auteur correspondant.
Sous presse. Épreuves corrigées par l'auteur. Disponible en ligne depuis le Saturday 08 July 2017
Cet article a été publié dans un numéro de la revue, cliquez ici pour y accéder

Résumé

Objectifs

En psychanalyse, des terminologies comme l’imposture, le faux, la mythomanie, ou la pseudologie sont préférées à celle du mensonge. Cette hétérogénéité lexicale pose un problème épistémologique. Cet article recense l’ensemble des théories existantes afin d’en offrir un panorama et de proposer un corpus plus unifié. Ce faisant, il vise à mieux comprendre pourquoi certains sujets éprouvent un irrépressible besoin de mentir.

Méthode

Cet article recense pas à pas les théories formulées depuis la fin du dix-neuvième siècle. Il compare et analyse les différents travaux portant sur la clinique du « mensonge ».

Résultats

L’analyse des dynamiques intersubjectives propres à l’acte de mentir montre que les individus se protègent du lien tout en tentant paradoxalement d’en établir un. Certes cet acte revêt un aspect transgressif, mais que la destructivité qui lui est inhérente est néanmoins significative. Il est montré que les affects violents que le mensonge suscite ont une dimension messagère. Le sujet « injecte » ses propres angoisses chez l’autre.

Discussion

Un des problèmes majeurs soulevé concerne l’intention que le sujet aurait, ou non, de tromper ses interlocuteurs. Les travaux consacrés à la mythomanie ont conforté l’idée selon laquelle le sujet adhérait à ses propres scénarii fictionnels. Il ne serait donc pas conscient de tromper les autres. Or, est-il possible de réussir à faire croire des choses fausses à quelqu’un tout en y croyant soi-même ? La réponse semble négative. Les « imposteurs » possèdent en effet une remarquable faculté de persuasion. En fait, c’est leur sens très aiguisé du réel qui leur permet d’obtenir l’adhésion d’autrui. Cela semble être leur problème : ils sont plus en phase avec le monde mental d’autrui qu’avec le leur. Cet aspect de la pathologie des sujets a néanmoins été peu étudié, d’autant moins qu’ils évitent les lieux entendus comme « psy ». De plus, le mensonge est par essence difficilement observable, ce qui complexifie encore son approche. En revanche, cet acte est plus aisément identifiable lorsqu’il émane d’enfants. Aussi ce phénomène a-t-il été assez bien cerné par les thérapeutes d’enfants. Leurs travaux sont ici utilisés pour montrer que les motifs inconscients qui poussent l’enfant à mentir éclairent la tendance pathologique au mensonge des adultes. Tous utilisent le mensonge comme un bouclier narcissique, les défendant d’une angoisse d’empiètement.

Conclusion

La notion de mensonge a l’intérêt d’unifier un corpus jusqu’ici trop épars. Elle permet aussi de mieux appréhender les motifs inconscients à la source d’un besoin de tromper autrui.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

Abstract

Objectives

In psychoanalysis, words such as deception, untruth, mythomania or pseudology are generally preferred to the word lying. However, the heterogeneity of the lexical categories used raises an epistemological problem, since it is difficult to determine what distinguishes these notions. This article sets out to list these theories in order to provide an overview. It studies the different approaches to understand what distinguishes and what connects them. The authors likewise explore the reasons why some people exhibit an addiction to lies.

Method

To achieve this, the article reviews the different existing theories. It provides a chronological study of the work conducted on lying from the mid-nineteenth century to the present day. The authors compare and analyze research on the themes of mythomania, deception, untruth, pseudology, etc. The authors propose to refer to the relevant phenomena in terms of “lying”. They discuss the relevance of this notion, which could appear simplistic.

Results

Thus, by close examination of the various theories, this article demonstrates that the conception of lying in fact opens up a new clinical sphere. This contributes to describing the intersubjective dynamics through which people are unconsciously trying to protect themselves from interpersonal ties while at the same time trying to establish them. It is true that this action takes on a transgressive aspect by undermining a primary function of language: connecting people, but the destructiveness inherent in this act appears quite meaningful. The violent emotions raised by a lie take on a messenger dimension. The individual actively passes on to the receiver his own anxieties, and especially his distrust towards ties and language.

Discussion

One of the main problems raised by this clinical field is whether or not the individual intends to fool the person before him. The work on mythomania reinforced the idea that the subject adheres to his fictional scenarios. According to this conception, the individual “lies to himself”, and is not conscious he is fooling the person he is talking to. So, is it possible to make people believe things that are untrue while thinking they are true? This article suggests not. Research on deception shows that the subjects that lie very readily have a remarkable ability for persuasion, to the point that they may obtain the unconscious complicity of their audience. It seems that they possess a very acute sense of the real which can win people over. Paradoxically, their problem could be the fact they are more in tune with the mental world of others than with their own. Nevertheless, a part of the research goes against this viewpoint and some divergences between the theories arise. This is primarily the result of a practical element: the practitioners who deal with this unusual pathology are few. Alongside, the issues faced by these individuals lead them to avoid anything relating to the “psy” culture. In addition, lying is very difficult to observe, which complicates its approach. It is nevertheless easier to perceive when it comes from children. The reasons why they lie are more transparent. The phenomenon has indeed been more widely studied by child therapists. Their work is used here on the basis of the idea that the motivations leading a child to lie can cast light on pathological lying among adults. Lying is a narcissistic solution used to preserve the subject from encroachment anxiety.

Conclusion

This article shows the need to use the notion of the lie to describe clinical situations as yet too poorly studied. This notion unifies a corpus hitherto too broad and imprecise because of the diversity of the lexical categories used. From a clinical standpoint, it provides better understanding of the compulsion to lie to other people. By categorizing liars as impostors, or as mythomaniacs, there is a danger of obliteration of the transference-cons-transference dimension of their behavior.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

Mots clés : Mensonge, Mythomanie, Pseudologie, Imposture, Faux, Facticité, Fiction, Confiance, Acte-parlé, Simulation

Keywords : Lie, Mythomania, Pseudology, Deception, False, Artificiality, Fiction, Trust, Act-spoken, Simulation


Plan


 Toute référence à cet article doit porter mention : Chapellon S, Grange-Ségéral E. Les approches psychanalytiques du mensonge. Evol psychatr XXXX ; vol (n°) : pages (pour la version papier) ou URL [date de consultation] (pour la version électronique).


© 2017  Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Ajouter à ma bibliothèque Retirer de ma bibliothèque Imprimer
Export

    Export citations

  • Fichier

  • Contenu

Bienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
L’accès au texte intégral de cet article nécessite un abonnement.

Déjà abonné à cette revue ?

Mon compte


Plateformes Elsevier Masson

Déclaration CNIL

EM-CONSULTE.COM est déclaré à la CNIL, déclaration n° 1286925.

En application de la loi nº78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, vous disposez des droits d'opposition (art.26 de la loi), d'accès (art.34 à 38 de la loi), et de rectification (art.36 de la loi) des données vous concernant. Ainsi, vous pouvez exiger que soient rectifiées, complétées, clarifiées, mises à jour ou effacées les informations vous concernant qui sont inexactes, incomplètes, équivoques, périmées ou dont la collecte ou l'utilisation ou la conservation est interdite.
Les informations personnelles concernant les visiteurs de notre site, y compris leur identité, sont confidentielles.
Le responsable du site s'engage sur l'honneur à respecter les conditions légales de confidentialité applicables en France et à ne pas divulguer ces informations à des tiers.


Tout le contenu de ce site: Copyright © 2024 Elsevier, ses concédants de licence et ses contributeurs. Tout les droits sont réservés, y compris ceux relatifs à l'exploration de textes et de données, a la formation en IA et aux technologies similaires. Pour tout contenu en libre accès, les conditions de licence Creative Commons s'appliquent.