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Diplopie intermittente binoculaire révélant une artérite giganto-cellulaire associée à une sclérite postérieure bilatérale : à propos d’un cas - 15/11/17

Doi : 10.1016/j.revmed.2016.10.211 
R. Prével 1, , M.-B. Rougier 2, G. Pinganaud 1, C. Roubaud-Baudron 1
1 Gériatrie, CHU, hôpitaux de Bordeaux, Bordeaux, France 
2 Ophtalmologie, CHU, hôpitaux de Bordeaux, Bordeaux, France 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

L’artérite giganto-cellulaire est une maladie systémique bien décrite chez le sujet âgé au pronostic ophtalmologique réservé. Le diagnostic peut être difficile en raison de signe clinique trompeur ou aspécifique.

Observation

Une patiente de 89ans est hospitalisée en gériatrie pour diplopie binoculaire intermittente avec douleurs rétro-orbitaires et céphalées frontales depuis plusieurs jours. Ses antécédents sont une cardiopathie valvulaire avec une sténose aortique et une insuffisance mitrale, une sigmoïdite diverticulaire et une phakoémulsification bilatérale. La patiente est autonome et vit à domicile. À l’admission, la patiente est subfébrile à 38,1°C sans anomalie à l’examen neurologique ni ophtalmologique (mesure de l’acuité visuelle, examen des segments antérieur et postérieur, prise de pression intra-oculaire, test oculomoteur et analyse du champ visuel). L’examen physique ne retrouve que le souffle aortique connu et des artères temporales proéminentes, les pouls temporaux sont abolis. L’ECG ne montre pas de fibrillation auriculaire. Le bilan biologique retrouve un syndrome inflammatoire biologique (CRP : 194mg/L, n<5mg/L, PNN à 13 000/mm3, n=2500–10 000/mm3), les hémocultures sont restées stériles. Un scanner TAP ne retrouve pas de foyer infectieux. Une IRM cérébrale révélait une hyperhémie autour des nerfs optiques et un épaississement scléral postérieur bilatéral sans signe d’atteinte des muscles oculomoteurs. Le diagnostic d’artérite giganto-cellulaire (AGC) est confirmé par échographie-doppler des artères temporales (signe du halo-hypoéchogène bilatéral). Un traitement par corticothérapie (bolus IV, 3jours puis per os 0,7mg/kg/j) est débuté en urgence avec régression rapide des signes cliniques comme attendu dans le cas d’une AGC.

Discussion

L’AGC est une maladie classiquement décrite, rare dans la population générale mais dont l’incidence augmente avec l’âge (incidence annuelle 3 à 5 fois plus importante après 50ans : 9,4 cas pour 100 000 habitants/an en France) [1]. L’atteinte ophtalmologique au cours de l’AGC survient chez 15 % des patients principalement sous la forme de neuropathie optique ischémique antérieure, de névrite optique rétrobulbaire ou de sclérite antérieure. Cette observation est didactique pour 2 raisons. La première est la présence d’une diplopie binoculaire intermittente comme dans 5 % des AGC. Cette diplopie est le plus souvent expliquée par une ischémie des muscles ou des nerfs oculomoteurs. La présence d’une diplopie binoculaire associée à une claudication de la mâchoire augmente la probabilité d’AGC chez les patients adressés pour biopsie de l’artère temporale. La présence d’une diplopie au diagnostic pourrait être un signe de risque de perte visuelle au cours de l’AGC. Le diagnostic de diplopie binoculaire intermittente repose essentiellement sur un interrogatoire scrupuleux (image dédoublée de l’objet regardé avec les 2 yeux apparaissant le plus souvent quelques secondes) puisque le signe clinique peut être absent lors de la consultation. L’accident ischémique transitoire, a fortiori chez le sujet âgé, doit être discuté comme diagnostic différentiel, les 2 pathologies étant des urgences thérapeutiques. Les bolus de corticoïdes IV représentent le standard de prise en charge du fait de la localisation ophtalmologique. La seconde est l’épaississement scléral postérieur bilatéral sur l’IRM en faveur d’une sclérite postérieure bilatérale peu symptomatique. La sclérite postérieure est connue pour être associée à des nombreuses maladies systémiques comme la polyarthrite rhumatoïde le granulomatose avec polyangéite, les spondylarthrites ankylosantes, l’arthrite psoriasique, la sarcoïdose, la maladie de Behçet ou encore le syndrome de Cogan [2]. En raison du fond d’œil normal, le diagnostic de sclérite postérieure ne peut être entièrement posé mais l’association d’une douleur rétro-orbitaire bilatérale avec l’épaississement scléral postérieur bilatéral à l’IRM évoluant favorablement sous corticothérapie renforce la suspicion de sclérite postérieure bilatérale pauciclinique. À notre connaissance, un seul autre cas de sclérite postérieure bilatérale associée à une AGC a été décrit [3].

Conclusion

Nous rapportons ici le cas d’une AGC révélée par une diplopie binoculaire intermittente associée à une sclérite postérieure bilatérale. Le diagnostic d’AGC devrait être systématiquement évoqué devant une ou l’autre de ces anomalies chez un patient âgé puisque le pronostic dépend d’une prise en charge en urgence.

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Vol 37 - N° S2

P. A177 - décembre 2016 Retour au numéro
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