L’évaluation de la santé perçue des patients au moyen de « Patient-Reported Outcomes » (PRO) tels que la qualité de vie liée à la santé (QdV) ou la fatigue est devenue un des critères incontournables dans les essais cliniques et la surveillance des malades. Ces données PRO sont mesurées au moyen de questionnaires regroupant différents items (questions). La plupart des études en cancérologie se focalisent le plus souvent sur différentes localisations cancéreuses (cancer du sein, de la prostate,..) et peu d’études ont comparé la QdV des patients selon le type de cancer. L’étude ELCCA (Étude longitudinale des changements psycho-économiques liés au cancer) vise à mieux comprendre et à comparer l’évolution du vécu et de la QdV des patients atteints d’un cancer du sein ou d’un mélanome et à étudier l’adaptation psychologique des patients à leur maladie. L’analyse de l’évolution des données PRO de l’étude ELCCA présuppose que la perception des questionnaires par le patient ne varie pas au cours de l’étude. Or, les patients peuvent percevoir et interpréter différemment les questions qui leur sont posées au cours du temps selon l’évolution de leur maladie. Ce phénomène, appelé « response shift » (RS), pourrait être lié à la façon dont les patients s’adaptent à leur maladie. En présence de RS, les évolutions observées des mesures de type PRO peuvent ne pas refléter uniquement les véritables changements ressentis par les patients. De plus, on peut supposer que les patients ne s’adaptent pas de la même manière et sont donc affectés de manière différente par le RS selon la pathologie. L’objectif est d’évaluer l’évolution de la QdV émotionnelle des patients de l’étude ELCCA et d’identifier le RS pouvant intervenir au cours du suivi et les facteurs associés.

L’étude de cohorte prospective bicentrique ELCCA avec un suivi de patients atteints de cancer du sein (n=215) ou de mélanome (n=78) pendant deux ans a donné lieu à des mesures répétées notamment de la QdV des patients (QLQ-C30) à l’annonce du diagnostic (T1), à six mois (T2), à un an (T3) et à deux ans (T4). Les méthodes permettant d’identifier et de prendre en compte le RS au niveau des items, qu’elles soient basées sur la modélisation par équations structurelles ou sur les modèles de Rasch, font l’hypothèse que tous les patients sont affectés de la même manière par le RS ce qui est irréaliste. Un algorithme, appelé ROSALI et basé sur les modèles de Rasch, a été amélioré pour permettre l’identification de covariables (ex. : type de cancer), associées à l’évolution de la QdV et/ou au RS.

Tous les patients présentent des scores de QdV se dégradant peu après le diagnostic de cancer puis s’améliorant à distance du diagnostic. Cet effet rebond intervient avec une temporalité différente selon le type de cancer. Au diagnostic, les scores de QdV sont plus faibles dans le cancer du sein comparé au mélanome. Entre T1 et T3, l’item « Vous êtes-vous senti inquiet ? » est affecté par du RS pour les deux types de cancer alors que l’item « Vous êtes-vous senti irritable ? » est affecté par du RS seulement dans le cancer du sein.

Les évolutions de QdV ainsi que la façon dont les patients sont affectés par le RS sont différentes selon le type de cancer. La nouvelle version de l’algorithme ROSALI permet de prendre en compte l’effet d’une covariable sur l’évolution de la QdV et du RS.