Un chancre révélateur d’une granulomatose avec polyangéite - 06/06/18
Résumé |
Introduction |
La granulomatose avec polyangéite est une vascularite systémique rare touchant le plus souvent les voies aériennes supérieures, les poumons et les reins. Les manifestations cutanéomuqueuses sont rarement inaugurales de la maladie et l’atteinte urogénitale est une manifestation exceptionnelle.
Observation |
Le cas rapporté est celui d’un homme de 78 ans adressé aux dermatologues par le gastro-entérologue pour un chancre découvert après la réalisation d’une coloscopie et d’une gastroscopie (normales) pour un test de dépistage du cancer colorectal positif. Il s’agissait d’une lésion génitale indolore, papulonodulaire bourgeonnante et partiellement ulcérée, située au niveau du pénis et qui évoluait depuis plusieurs semaines. La biopsie cutanée montrait des remaniements inflammatoires subaigus et chroniques non spécifiques sans cellules néoplasiques. Les sérologies virales (VIH VHB VHC) et TPHA-VDRL étaient négatives. Les semaines suivantes apparaissaient des polyarthralgies, une altération de l’état général et une neuropathie sensitivomotrice longueur-dépendante. La biologie objectivait un syndrome inflammatoire et une insuffisance rénale rapidement progressive associée à un syndrome néphrotique impur. Le bilan auto-immun retrouvait des C-ANCA positifs (à fluorescence cytoplasmique) avec des anti-PR3>80. La biopsie rénale retrouvait une prolifération endocapillaire segmentaire et focale sans dépôts en immunofluorescence. Le patient a bénéficié de bolus de méthylprednisolone ainsi que d’un premier bolus de cyclophosphamide (à dose réduite, de 500mg) rapidement relayé par du rituximab. Après une évolution lentement favorable avec régression des lésions muqueuses, des polyarthralgies, de la neuropathie et stabilisation du syndrome néphrotique au stade d’une insuffisance rénale terminale, le patient décédait d’un choc septique à Pseudomonas aeruginosa, six jours après sa quatrième perfusion de rituximab.
Discussion |
Les lésions dermatologiques sont fréquentes au cours de la granulomatose avec polyangéite (GPA) mais sont plus rarement inaugurales de la maladie. Souvent aspécifiques, elles dominent rarement les signes cliniques et s’intègrent le plus souvent dans une atteinte multiviscérale. On observe ainsi par ordre de fréquence décroissante des lésions cutanées de purpura infiltré et nécrotique, des ulcérations de la muqueuse buccale, des nodules sous-cutanés siégeant aux coudes et des ulcérations cutanées. Les atteintes des muqueuses décrites concernent essentiellement les lèvres et la langue (présentes dans 5 à 10 % des cas) et se caractérisent par des papules érythémateuses et granulomateuses des gencives, une nécrose et des ulcérations non spécifiques. L’atteinte des muqueuses urogénitales est extrêmement rare (<1 %) dans les larges séries de cohortes rapportées avec seulement trois petites séries de cas. L’atteinte urogénitale isolée précède l’apparition d’autres symptômes dans 12–18 % cas et affecte essentiellement les hommes (âge médian de 56 ans). L’atteinte du pénis (allant de 9 à 25 % des atteintes urogénitales) a été décrite dans une vingtaine de cas seulement pour des patients présentant une GPA et des lésions urogénitales. La présence d’une ulcération indolore est la manifestation la plus fréquente (ce qui était le cas chez notre patient), avec œdème et adénopathie locale, pouvant simuler un processus néoplasique ou infectieux. Sont également décrites des lésions de l’urètre, de prostate, de vessie, d’uretère et même des tumeurs rénales. Lors des rechutes, le diagnostic différentiel avec les complications secondaires au cyclophosphamide peut se poser. Dans les petites séries, les atteintes urogénitales de la GPA répondent bien au traitement immunosuppresseur ; les indications chirurgicales sont essentiellement restreintes aux complications urétrales, prostatiques ou vésicales.
Conclusion |
La GPA est une vascularite dont les atteintes cutanéomuqueuses sont rarement asymptomatiques et inaugurales de la maladie. Leur présence doit faire craindre l’apparition d’atteintes systémiques sévères.
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Vol 39 - N° S1
P. A174-A175 - juin 2018 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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