Signe de Nikolsky au cours d’une poussée de dermatomyosite : à propos d’un cas - 06/06/18
Résumé |
Introduction |
Les manifestations cutanées observées au cours des poussées de dermatomyosites associent des lésions digitales comme les papules de Gottron ou le signe de la manucure, des lésions du visage comme l’œdème liliacé des paupières ou encore la présence d’un érythème facial étendu à la nuque ou au décolleté. Il a été décrit des formes plus ou moins œdémateuses et plus ou moins squameuses ainsi que des formes nécrotiques. Nous rapportons ici l’observation d’un patient présentant une atteinte cutanée sévère atypique prédominant au tronc et à la racine des membres avec un signe de Nikolsky positif au cours d’une rechute de sa dermatomyosite.
Observation |
Monsieur S., 84 ans, a été hospitalisé en 2015 pour la survenue de myalgies des ceintures associées à un érythème du visage. Devant la présence d’une rhabdomyolyse et d’un syndrome myogène à l’EMG, une biopsie quadricipitale a été réalisée confirmant le diagnostic de dermatomyosite avec présence d’un infiltrat lymphocytaire prédominant dans les zones périmysiales, une hyperexpression de l’antigène HLA de classe I et un dépôt de C5b9 au niveau des capillaires endomysiaux. Le bilan immunologique est resté négatif, tout comme le bilan paranéoplasique. L’évolution a alors été rapidement favorable sous corticothérapie systémique. Le patient a été perdu de vue dans les suites. Il est réadressé dans notre service 2 ans plus tard, après un arrêt brutal de sa corticothérapie quelques jours auparavant. L’examen clinique retrouve des manifestations témoignant d’une dermatomyosite non contrôlée : apparition d’une faiblesse musculaire proximale avec rhabdomyolyse à bas bruit et sans atteinte laryngée. L’examen cutané retrouve un signe de la manucure, des papules de Gottron ainsi qu’une atteinte héliotrope du visage et des paupières. Mais au premier plan, on observe une érythrodermie maculopapuleuse prurigineuse prédominant au tronc et à la racine des membres, ainsi que des ulcérations et de larges décollements cutanés. Il existe un signe de Nikolsky positif en zone périlésionnelle sans atteinte muqueuse associée. L’enquête de pharmacovigilance écarte formellement une toxidermie d’origine médicamenteuse, le bilan infectieux notamment viral et à la recherche d’une atteinte staphylococcique revient négatif. Enfin, la biopsie cutanée retrouve une dermite d’interface sans argument pour une dermatose bulleuse, y compris en immunofluorescence. L’introduction d’une corticothérapie IV puis orale à 1mg/kg/j et d’immunoglobulines polyvalentes 2g/kg sur 5jours, a permis une évolution spectaculaire avec une régression complète des lésions. Le diagnostic de poussée de sa dermatomyosite a été retenu. Le patient bénéficiera de l’introduction d’azathioprine à visée d’épargne cortisonique.
Discussion |
Les atteintes cutanées sévères de type ulcères ou nécroses cutanées sont rares au cours des dermatomyosites et semblent corrélées, pour certains auteurs, à un plus grand risque de cancer associé. On retrouve également des lésions cutanées sévères nécrotiques associées à la présence d’anticorps anti-MDA5 chez des patients présentant par ailleurs des signes d’atteinte pulmonaire [1 , 2 ]. Ces manifestations confèrent au patient un pronostic plus péjoratif. Aucune description d’un signe de Nikolsky n’est rapportée dans la littérature au décours d’un tel tableau. Ce signe correspond à un décollement cutané provoqué par le frottement appuyé en peau saine ou péri-lésionnelle. Il traduit habituellement un décollement intra-épidermique conséquence d’une acantholyse [3 ]. Il s’observe fréquemment au cours des pemphigus, plus rarement au cours des toxidermies graves comme le syndrome de Lyell ou de Stevens-Johnson, ou encore des épidermolyses staphylococciques.
Conclusion |
Les ulcérations et décollements cutanés sont des manifestations sévères, peu fréquentes et aspécifiques des dermatomyosites. Chez un patient présentant un érythème extensif avec signe de Nikolsky positif, une fois les principaux diagnostics (toxidermie, cause infectieuse) éliminés, il faut savoir évoquer le diagnostic de dermatomyosite et inspecter les doigts et le visage du patient à la recherche de signes plus spécifiques. S’il existe des signes d’atteinte musculaire associés, la biopsie musculaire permettra de redresser le diagnostic.
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Vol 39 - N° S1
P. A231-A232 - juin 2018 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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