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Une surdité bilatérale révélatrice d’un syndrome de Bing-Neel - 28/11/18

Doi : 10.1016/j.revmed.2018.10.074 
P. Legrain 1, , A. Robbins 2, M. Guillon 3, A. Quinquenel 4, A. Servettaz 5
1 Neurologie, université de Reims Champagne-Ardenne, Reims 
2 Médecine interne, maladies infectieuses, immunologie clinique, CHU de Robert-Debré, Reims 
3 Laboratoire d’hématologie, hôpital Robert-Debré, Reims 
4 Service d’hématologie, CHU de Reims, hôpital Robert-Debré, Reims 
5 Service de médecine interne, maladies infectieuses et immunologie clinique, hôpital Robert-Debré, Reims 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

Les atteintes neurologiques dans la macroglobulinémie de Waldenström (MW) sont dominées par les polyneuropathies auto-immunes médiées par l’IgM monoclonale. L’atteinte du système nerveux central (ou syndrome de Bing-Neel) est plus rare et plus méconnue.

Observation

Un homme de 73 ans, suivi pour une maladie de Waldenström depuis 2014, et en réponse partielle stable après une première ligne de traitement par rituximab, endoxan et dexaméthasone a été hospitalisé pour un tableau associant troubles de la concentration d’évolution récente, perte de mémoire antérograde, céphalées modérées, douleurs neuropathiques des membres inférieurs et surdité de perception bilatérale sévère d’aggravation rapide sur six mois attribuée à une presbyacousie. L’examen neurologique ne retrouvait qu’une ataxie proprioceptive minime avec instabilité posturale. Les aires ganglionnaires étaient libres. Le score au Mini-Mental State de Folstein était de 29/30. L’électrophorèse des protéines plasmatique retrouvait un pic monoclonal IgM kappa connu et stable quantifié à 10,5 g/l. L’hémogramme était normal. L’électroneuromyogramme était normal. L’IRM cérébrale mettait en évidence un hypersignal des nerfs optiques, oculomoteurs, trijumeaux et des paquets acousticofaciaux. L’IRM médullaire retrouvait une leptoméningite diffuse. L’examen du liquide céphalorachidien (LCR) montrait une hyperprotéinorachie à 10020 mg/l, ainsi qu’une méningite lymphocytaire (536 éléments/mm3) composée essentiellement d’une population lymphoïde B monotypique kappa, CD5() CD20(+). La recherche de la mutation du gène MYD88 dans le LCR était positive. L’ensemble de ces résultats a permis de poser le diagnostic de syndrome de Bing-Neel dans sa forme infiltrative. Un traitement par un inhibiteur de la tyrosine kinase de Bruton (ibrutinib) a été initié, permettant une régression rapide des troubles de la concentration, de l’ataxie et une nette amélioration de l’audition. La ponction lombaire réalisée à un mois de traitement retrouvait une cellularité relativement peu modifiée (560/mm3) mais une nette diminution de la protéinorachie (5314 mg/l).

Discussion

Le syndrome de Bing-Neel, décrit pour la première fois en 1936, est une entité rare (une cinquantaine décrit dans la littérature française) mais probablement sous-diagnostiquée. Le délai entre les premiers symptômes et le diagnostic peut être parfois très long. La présentation clinique initiale est diverse et peu spécifique (céphalées, troubles cognitifs, symptômes psychiatriques, parésie). L’atteinte neuroméningée peut exister en dehors de toute progression systémique de la MW, et, chez 15 à 30 % des patients avec le syndrome de Bing-Neel, elle est inaugurale. La normalité de l’imagerie (IRM cérébrale ou médullaire) n’exclut pas le diagnostic qui repose sur la mise en évidence d’une clonalité B dans le LCR (pic monoclonal IgM, population lymphoïde B monotypique par cytométrie en flux ou présence de la mutation L265P de MYD88).

Du fait de la rareté de ce syndrome, le pronostic du syndrome de Bing-Neel demeure incertain. Une étude française de 44 cas de syndrome de Bing-Neel a rapporté une survie à 10 ans de 59 %.

Le traitement est mal codifié et dépend du stade de la MW en dehors de l’atteinte nerveuse centrale et des comorbidités du patient. Quel que soit le traitement proposé, il doit être composé de molécules ayant une bonne pénétration méningée (méthotrexate haute dose, cytarabine, fludarabine). Récemment, plusieurs cas de traitement de syndrome de Bing-Neel traités par ibrutinib ont été rapportés. Chez ces patients, l’initiation d’un traitement par ibrutinib a entraîné une amélioration spectaculaire de la symptomatologie neurologique. Cette molécule, capable de traverser la barrière hématoméningée, inhibe directement l’activation du récepteur B à l’antigène (BCR) favorisée par la mutation de L265P de MYD88, empêchant ainsi la transduction de nombreux signaux nécessaires à la survie et à la prolifération des lymphocytes B mutés.

Conclusion

Le syndrome de Bing-Neel est une manifestation rare et sous-diagnostiquée de la maladie de Waldenstrom. Il doit être évoqué devant toute nouvelle symptomatologie neurologique, même en l’absence d’évolutivité systémique de la maladie. Le traitement de cette complication est encore mal codifié mais l’ibrutinib, un inhibiteur de BTK, semble prometteur.

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Vol 39 - N° S2

P. A138-A139 - décembre 2018 Retour au numéro
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