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Kératopathie cristalline des gammapathies monoclonales - 28/11/18

Doi : 10.1016/j.revmed.2018.10.119 
J. Dupont 1, , K. Paricaud 2, J. Perreira 3, E. Favasuli 1, L. Astudillo 4, G. Moulis 5, G. Pugnet 4, L. Sailler 6
1 Rhumatologie, hôpital Purpan, Toulouse 
2 Médecine interne le Tallec, hôpital Purpan, Toulouse 
3 Ophtalmologie, hôpital Purpan, Toulouse 
4 Service de médecine interne, CHU Toulouse Purpan, Toulouse 
5 Service de médecine interne, salle le Tallec, CHU de Toulouse, Toulouse 
6 Service de médecine interne, CHU de Toulouse, Toulouse 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

La kératopathie cristalline est une complication rare et méconnue des gammapathies monoclonales. Elle se manifeste par l’apparition d’opacités cornéennes cristallines correspondant à des dépôts d’immunoglobuline au niveau du stroma cornéen.

Matériels et méthodes

Nous rapportons une observation d’une patiente présentant une kératopathie cristalline révélant une gammapathie monoclonale à signification indéterminée (MGUS).

Résultats

Il s’agit d’une patiente de 63 ans sans antécédent médicaux dont l’histoire commence brutalement en juin 2018 par une photophobie associée à une baisse d’acuité visuelle à 2/10 à droite et 5/10 à gauche. L’examen oculaire retrouve des dépôts cornéens bilatéraux avec un aspect cotonneux sans anomalie à l’examen du segment postérieur. Les ophtalmologues évoquent dans un premier temps une kératopathie microcristalline infectieuse et un bilan de déficit immunitaire est réalisé. Le bilan biologique retrouve une anémie normocytaire à 11g/dL ainsi qu’un pic monoclonal IgG kappa à 14g/L. Elle est alors adressée en médecine interne pour la suite de la prise en charge. La fonction rénale est préservée et la calcémie est normale. Le ratio chaînes légères sériques kappa/lambda est normal. Le myélogramme retrouve alors 3 % de plasmocytes non dystrophiques et le scanner low dose ne retrouve pas de lésions osseuses. Nous évoquons alors le diagnostic de kératopathie cristalline par dépôt d’immunoglobulines dans un contexte de MGUS. Un prélèvement de larme avec immunofixation sérique confirme la présence d’un pic IgG kappa. La biopsie cornéenne retrouve des dépôts cornéens amorphes. Un traitement initié par collyres de corticoïdes à permis une nette diminution de la photophobie et une amélioration modérée de l’acuité visuelle. Un traitement systémique de la gammapathie ou traitement chirurgical par greffe cornéenne seront évoqués en cas de mauvaise évolution.

Discussion

La kératopathie cristalline à dépôt d’immunoglobulines peut être une manifestation clinique révélatrice d’une gammapathie monoclonale et peut être responsable d’une diminution sévère de l’acuité visuelle. La première description a été faite par Meesmann en 1934 dans un contexte de plasmocytome [1]. Le mécanisme physiopathologique est mal connu mais pourrait reposer sur l’acheminement via la vascularisation ou le film lacrymal et/ou la production locale par les kératocytes. La kératopathie se révèle généralement une photophobie avec dans les cas plus évolués une baisse d’acuité visuelle. Elle est généralement associée à une MGUS dans plus de 50 % des cas ou à un myélome chez environ 40 % des cas. Il est également décrit des cas plus rares associés à des maladies de Waldenström.

Il s’agit dans 80 % des cas d’une IgG à chaîne légère kappa. Cette prédominance s’explique par un poids moléculaire plus bas. Les dépôts sont parfois visibles comme chez notre patiente directement par le clinicien non ophtalmologue. L’examen à la lampe à fente montre des dépôts de cristaux diffus parfois organisés en granules, en fibrilles ou en patch. L’évolution peut être péjorative sur la fonction visuelle par atteinte du centre de la cornée. Le diagnostic repose sur l’histologie : dépôts en bandes dans le stroma avec des dépôts de chaînes légères. Le traitement repose, en plus d’un traitement local par corticoïdes topiques, sur un traitement chirurgical par kératoplastie transfixiante ou greffe de cornée souvent précédée d’une chimiothérapie afin de tenter de prévenir les récurrences post-greffe. Un traitement optimal ne permet pas toujours une récupération complète de la fonction visuelle. Les principaux diagnostics différentiels sont la cystinose, la goutte, les hypercholestérolémies, la maladie de Bietti ou la dystrophie de Schnyder [3, 2].

Conclusion

Une électrophorèse des protéines doit être réalisée en cas de découverte de dépôt cornéen afin de ne pas méconnaître une gammapathie monoclonale. De même, l’apparition d’une photophobie au cours du suivi d’une MGUS doit amener à dépister d’éventuels dépôts cornéens d’Ig pouvant altérer la fonction visuelle et dont la présence modifierait la prise en charge thérapeutique de la gammapathie.

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Vol 39 - N° S2

P. A162 - décembre 2018 Retour au numéro
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