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L’infection à Clostridium difficile comme déclencheur de crise de fièvre méditerranéenne familiale chez l’homme : étude clinique et physiopathologique - 28/11/18

Doi : 10.1016/j.revmed.2018.10.373 
S. Georgin Lavialle 1, , F. Awad 2, E. Assrawi 2, S. Galmiche 1, A. Fayand 1, F. Rodrigues 1, C. Louvrier 3, I. Giurgea 3, S. Amselem 3, H. Sokol 4, G. Grateau 1, S. Karabina 2
1 Médecine interne et centre de référence des maladies auto inflammatoires (ceremaia), hôpital Tenon, Paris 
2 Inserm umr 933, hôpital Trousseau, Paris 
3 Laboratoire de génétique, hôpital Trousseau, Paris 
4 Gastroentérologie, hôpital Saint-Antoine, Paris 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

La fièvre méditerranéenne familiale (FMF), est la maladie auto inflammatoire monogénique la plus fréquente caractérisée par des accès récurrents de douleurs abdominales fébriles. Elle est associée à des mutations du gène MEFV codant la protéine pyrine. Le Clostridium difficile est une bactérie anaérobie à Gram positif, productrice de toxines et sporulée, responsable de colites, entraînant diarrhée, fièvre, douleur abdominale et syndrome inflammatoire. Le diagnostic de l’infection à Clostridium difficile (CDI) est un défi, en particulier chez les patients atteints de maladies chroniques affectant le tractus gastro-intestinal telles que les maladies inflammatoires intestinales. Le CDI peut imiter une crise de FMF notamment parce que la diarrhée est observée chez les patients FMF traités par la colchicine. Des travaux récents ont montré que la toxine B de C. difficile (TcdB) est spécifiquement capable d’activer l’inflammasome pyrine conduisant à la production d’IL-1 actif et théoriquement d’induire une crise de FMF bien que ce phénomène n’ait pas encore été démontré chez l’homme.

Patients et méthodes

Nous décrivons ici cinq patients atteints de FMF qui ont développé une crise de FMF non contrôlée avec douleur abdominale et diarrhée attribuable à une infection à C. difficile. Nous avons testé l’activation in vitro de la pyrine par TcdB chez 2 de ces patients. Le traitement du CDI a conduit à un contrôle de l’attaque du FMF montrant pour la première fois chez l’homme le rôle du C. difficile dans le déclenchement de l’attaque du FMF.

Résultats

Cinq patients ont été inclus dans cette étude avec un âge médian de 38 ans au moment du diagnostic CDI. Tous avaient une histoire typique de FMF et étaient homozygotes pour la mutation M694V ou M694I. Sous traitement à long terme à la colchicine avec une bonne observance, ils présentaient des douleurs abdominales, de la fièvre et de la diarrhée, qui évoquent les premiers symptômes d’une crise de FMF. L’augmentation de la posologie de la colchicine n’était pas possible car les patients avaient déjà une diarrhée sévère et ils ne pouvaient la tolérer. Une patiente est décédée de l’infection ; 3 ont guéri sous antibiothérapie. En raison d’IDC récurrentes, une patiente a finalement subi une transplantation de micro biote fécal d’un donneur non méditerranéen en bonne santé qui a traité avec succès l’infection à C. difficile.

Les bio marqueurs inflammatoires CRP et SAA étaient élevés pendant l’IDC et normalisés après l’IDC (à l’exception de la patiente décédée de cette infection), ce qui indique que le traitement efficace de l’IDC a mis fin à l’inflammation et aux crises du FMF.

La sécrétion d’IL-1β dans des conditions basales (sans stimulation) était plus élevée dans les monocytes des patients que chez les témoins sains ou les patients FMF sans CDI. Après stimulation avec des cellules TcdB provenant de patients atteints de FMF, les taux de sécrétion étaient plus élevés que la moyenne des témoins.

Conclusion

Cette complication infectieuse doit être prise en considération lorsqu’un patient avec une FMF précédemment bien contrôlé sous traitement par colchicine au long cours devient inflammatoire. Ces patients ne devraient pas être considérés comme résistants à la colchicine et ne devraient pas recevoir de biothérapies telles que l’anti-interleukine 1 dans ce contexte d’infection non contrôlée car si une infection à C. difficile est présente, le traitement anti il-1 ne sera pas efficace car la toxine sera toujours présente et stimulera en permanence la pyrine. Pour le reste des patients testés après un traitement réussi de leur infection, leur FMF a été contrôlée par la posologie habituelle de colchicine comme avant l’infection (1 ou 2mg/jour).

Nos résultats suggèrent que la colite à C. difficile chez les patients atteints de FMF entraîne une exacerbation de la FMF due à une activation incontrôlée de la pyrine par les toxines du clostridium.

Ces patients qui peuvent être pris à tort pour être résistants à la colchicine en raison de la similitude des phénotypes cliniques peuvent bénéficier, dès confirmation de l’infection, soit d’antibiothérapie, soit de transplantation fécale afin de normaliser l’inflammation périphérique et stabiliser le FMF. Par ailleurs, les cliniciens devraient suivre attentivement les patients atteints de FMF traités aux antibiotiques afin de s’assurer qu’ils ne développent pas d’infection à CDC.

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Vol 39 - N° S2

P. A97 - décembre 2018 Retour au numéro
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