Introduction : La France fait partie des pays à risque élevé de cancer colorectal. Un dépistage ciblé par coloscopie a été préconisé chez les apparentés au premier degré de sujets atteints par la maladie avant l’âge de 60 ans (HAS 2004). Les modèles psychosociaux de prévention ont fait la preuve de leur intérêt pour appréhender les comportements face au dépistage, mais n’ont pas encore été étudiés en France dans ce contexte. L’objectif était de déterminer chez les frères et sœurs les facteurs associés à l’observance du dépistage, en intégrant ceux relatifs à l’individu, à la prise en charge médicale, à la famille et au réseau social.

Patients et Méthodes : Une étude de cohorte rétrospective a identifié les cas index opérés entre 1999 et 2002 dans les établissements de santé publics et privés pratiquant la chirurgie du cancer colorectal de deux départements français. Les frères et sœurs ont été contactés entre 2007 et 2008 par l’intermédiaire du cas index. Les facteurs associés à l’observance du dépistage par coloscopie ont été étudiés par une régression logistique prenant en compte l’effet cluster résultant de l’appartenance de plusieurs sujets à une même famille.

Résultats : 172 frères et sœurs appartenant à 74 fratries ont été inclus. Le taux de réalisation déclarée d’au moins une coloscopie parmi les frères et sœurs a été estimé à 66 % ; IC 95 % [59 - 73]. Les 5 variables indépendamment associées à l’observance du dépistage par coloscopie étaient le fait de ressentir moins d’obstacles (OR = 3,2 ; IC 95 % [1,2 - 8,5]), d’avoir reçu des recommandations de dépistage par un médecin (OR = 4,9 ; IC 95 % [1,7 - 13,7]), de percevoir l’accessibilité des services pratiquant la coloscopie comme plus facile (OR = 3,2 ; IC 95 % [1,3 - 7,8]), d’avoir discuté du dépistage avec tous ses autres frères et sœurs (OR = 3,9 ; IC 95 % [1,6 - 9,6]), et d’appartenir à un groupe social (OR = 2,6 ; IC 95 % = [1,0 - 6,6]).

Conclusion : Des facteurs psychosociaux influencent l’observance du dépistage chez les apparentés au premier degré de sujets atteints de cancer colorectal avant l’âge de 60 ans. Les résultats obtenus pourraient contribuer à améliorer la participation au dépistage ciblé en orientant des interventions personnalisées portant en particulier sur les obstacles ressentis chez les frères et sœurs de sujets atteints, la sensibilisation des médecins à l’identification des individus à risque élevé, et l’éducation et l’accompagnement des patients pour la transmission de l’information à leurs apparentés.

Remerciements, financements, autres : Cette étude a reçu le soutien financier de la Ligue nationale contre le cancer et de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés.