L’évaluation des critères de stabilité des lésions de vitiligo est cruciale, lorsqu’une option thérapeutique doit être décidée : traitement topique, photothérapique ou traitement chirurgical. Les lésions évolutives de vitiligo sont considérées comme une contre-indication à une greffe de mélanocytes. Malheureusement, jusqu’à maintenant, nous ne disposions pas de critères cliniques et biologiques fiables susceptibles de nous aider à prendre une décision rapide. Tout au plus, une évaluation imprécise était basée sur les données de l’interrogatoire, la révélation d’un phénomène de Koebner évident ainsi que sur le devenir d’une mini-greffe implantée en zone lésionnelle. Il a été récemment rapporté que la zone marginale péri-lésionnelle est un endroit stratégique qui reflète le type de processus de dépigmentation en cours ainsi que son évolutivité liée à la déperdition mélanocytaire.

Établir une association entre l’aspect clinique des lésions, les caractères histologiques de la zone marginale et l’évolutivité des lésions du vitiligo.

Soixante et onze patients porteurs d’un vitiligo non segmentaire ont été recrutés. Au cours de la première consultation, l’aspect clinique des lésions et de leurs bords a été soigneusement caractérisé et photographié. Une recherche d’anticorps anti-thyroïde (TPO, TPG) a été pratiquée. Par ailleurs, une biopsie de la zone marginale à cheval sur la zone dépigmentée et normalement pigmentée a été réalisée chez tous les patients. Les coupes histologiques ont été colorées par l’hématéine éosine mais aussi par des immuno-marquages spécifiques des mélanocytes, des lymphocytes T cytotoxiques et des molécules d’adhésion (E-cadhérine). Au bout d’un an, l’évolutivité des lésions a été appréciée par comparaison avec les clichés pris initialement. Une étude comparative statistique de la stabilité du vitiligo avec les paramètres épidémiologiques, cliniques et histologiques des patients a été réalisée par le logiciel SPSS 13.0.

À la fin de l’étude, 2 patients ont été perdus de vue, nous avons noté une aggravation chez 46 patients et une stabilité chez 23. Les lésions évolutives étaient statistiquement associées au vitiligo familial (p=0,039), à un aspect hypochrome avec des bords déchiquetés (p<0,001), à une surface atteinte de plus de 10 % (p=0,021), à un infiltrat épidermique (p=0,017) et à une bonne expression des E-cadhérines (p=0,044).

En pratique courante, les lésions d’aspect hypochrome à bords déchiquetés peuvent être considérées comme des lésions évolutives et de ce fait être traitées par un traitement topique et photothérapique. Inversement, les lésions achromiques à bords nets sont stables et font discuter un traitement chirurgical.

Un examen clinique soigneux de la zone péri-lésionnelle doit permettre une évaluation immédiate de la stabilité d’une lésion donnée avant d’envisager une décision thérapeutique.