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Jean-Martin Charcot et l’ouverture de la faculté de médecine aux femmes-médecins - 28/01/17

Doi : 10.1016/j.neurol.2016.12.009 
Christopher G. Goetz, MD
 Rush University Medical Center, 1725, W. Harrison Street, Chicago, IL, 60612, États-Unis 

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Résumé

Bien que les carrières de Jean-Martin Charcot et des Dejerine ne se soient guère entrecroisées, Charcot a joué un rôle important dans l’effort d’ouvrir la faculté de médecine aux femmes, ce qui a facilité fondamentalement l’ascension et la renommée d’Augusta Klumpke-Dejerine. Il a accueilli à la Salpêtrière une des premières gagnantes du concours de l’externat, il a appuyé l’ouverture du grand concours de l’internat aux femmes, et il a démontré que les maladies neurologiques ne reconnaissent point de sexisme. De cette façon, et grâce à son exemple, la faculté de médecine, la Salpêtrière, et le monde scientifique de la génération suivante ont été les témoins de la carrière splendide et entrelacée du couple Dejerine.

Charcot a passé toute sa carrière à la Salpêtrière de 1850 jusqu’à sa mort en 1893. Avec une discipline exigeante et une stratégie soigneusement méditée, il a construit une entreprise multidisciplinaire, dédiée aux maladies neurologiques et fondée sur le principe de corrélation entre les signes cliniques et les lésions pathologiques. Grâce à ses études, il a ouvert la possibilité de diagnostiquer les maladies neurologiques pendant la vie et de prédire les lésions neuro-anatomiques liées aux symptômes. Editeur et auteur de grands textes, connu partout dans le monde, Charcot est devenu pendant sa vie un chef énormément puissant, et la Chaire des maladies du système nerveux a été créée pour lui en 1882.

Dans ce contexte de puissance, d’influence, et d’une hiérarchie exclusivement masculine, le mouvement féministe émergeait pendant la fin de siècle. Jusqu’à la date de 1881, les femmes, bien que reçues aux études médicales, n’étaient pas autorisées à se présenter au concours de l’externat, première étape sur l’étroite échelle de la faculté de médecine. Contre des protestations répandues, Mlle Blanche Edwards, fille d’une mère française et d’un père médecin anglais, s’est présentée au concours et a gagné le poste de l’externe en 1882, à côté de son amie américaine, la jeune Augusta Klumpke. Suivant la tradition, les externes choisissaient leurs stages, et entre 1884 et 1885, Edwards s’est installée dans le service de Charcot (Figure 1). Étant Président de jury pour la thèse d’Edwards, intitulé « Sur l’hémiplégie dans quelques affections nerveuses », Charcot lui a dit : « Vous êtes parmi les meilleurs docteurs ; vous avez subi vos examens d’une façon particulièrement brillante… Je serai heureux de vous voir entrer dans nos hôpitaux : cela nous fera une variété de médecins qui sûrement ne sera pas la moins intéressante ».

Charcot a continué ce dialogue, soutenant l’intégration complète des femmes dans la hiérarchie médicale, mais il n’était pas naïf devant la réalité de l’époque, et le concours de l’internat restait bloqué à Edwards, ainsi qu’à son amie, Klumpke, et aux autres femmes-externes.

L’ouverture du concours de l’internat aux femmes a été une bataille plus rude encore. En 1884, une pétition lancée dans ce but n’a recueilli que onze signatures parmi les professeurs de la Faculté. Le nom de Charcot apparaît en second sur la liste, suivi de ceux de ses collègues proches et anciens internes Joffroy, Raymond, et Brissaud. Après une longue période de débats et d’hésitations, le concours a finalement été ouvert aux femmes en 1885, avec le résultat que Mlle Klumpke était nommée interne à sa deuxième tentative en 1886 et Mlle Edwards, elle, interne provisoire.

Dans ses études scientifiques, Charcot a contribué aussi à l’effort d’éliminer le sexisme. Parmi ses observations les plus saillantes, il a démontré que l’hystérie n’est point une maladie exclusivement féminine. Comme consultant aux services des chemins de fer, il s’est retrouvé médecin pour des centaines de travailleurs – tous mâles et physiquement robustes –, qui ont développé des symptômes typiques de l’hystérie après une collision ou d’autres accidents. En présentant de tels cas devant ses collègues stupéfiés, il a dit : « L’hystérie mâle n’est donc pas, tant s’en faut, très rare. On concède qu’un jeune homme efféminé puisse présenter quelques phénomènes hystériformes ; mais qu’un artisan vigoureux, solide, non énervé par la culture, un chauffeur de locomotive par exemple puisse devenir hystérique au même titre qu’une femme, voilà, paraît-il qui dépasse l’imagination. Rien n’est mieux prouvé, cependant, et c’est une idée à laquelle il faudra se faire. Cela viendra comme pour tant d’autres propositions qui sont aujourd’hui établies dans tous les esprits à l’état de vérités démontrées, après n’avoir rencontré pendant longtemps que le scepticisme et souvent l’ironie ».

On peut étendre cette réflexion de Charcot à l’idée plus large concernant l’ouverture de la médicine internationale aux femmes. Malgré une longue histoire de « scepticisme et souvent ironie », les jeunes femmes ambitieuses en médecine sont entrées dans les rangs des externes et des internes de la génération après la mort de Charcot en 1893. La carrière du couple Dejerine est l’exemple saillant du succès de cette ouverture grâce à laquelle ces partenaires ont réalisé la possibilité d’une carrière illustre, partagée entre femme et homme, et scientifiquement égale l’un à l’autre.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

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 Abstract de colloque Jules Dejerine : publication bilingue (version française).


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Vol 173 - N° S1

P. S7-S8 - février 2017 Retour au numéro
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