Usage et abus des équations mathématiques en toxicologie post-mortem - 22/04/17
Résumé |
Objectif |
Discuter des limites des équations de calcul de dose en toxicologie post-mortem.
Introduction |
Après le dépôt d’un rapport d’expertise toxicologique, il n’est pas rare que le magistrat instructeur ou le président de cour d’assises demande à l’expert d’indiquer à combien d’unités galéniques correspond la concentration dans le sang post-mortem. Il est alors tentant d’utiliser les équations standards, de type dose=Cmax×Vd×P, tout en établissant la Cmax avec Cmax=C×2nb de ½vies. Cela implique de connaître le volume de distribution (Vd en L), la demi-vie de la molécule (t1/2 en H), le poids (P en kg) de la victime et le délai entre l’ingestion et le décès (H). Si le poids peut être aisément mesuré lors de l’autopsie, les autres paramètres sont souvent sujets à approximation. À titre d’exemple, la demi-vie du nordiazépam varie de 1 à 3 (31 à 97 h) et son volume de distribution de 1 à 5 (0,5 à 2,5 L/kg). Le calcul de la dose devient alors très peu précis, avec souvent des bornes très larges. Par ailleurs, il existe une équation qui permet de prédire la concentration post-mortem C2 à partir de la concentration C1 ante-mortem, soit lnC1–lnC2=ln2×t/t1/2, avec t le temps entre le moment de la mesure de C1 et le décès. Ces équations peuvent être prises en défaut dans la réalité et conduire à des interprétations totalement erronées, aux conséquences fâcheuses.
Méthode |
À partir de 4 cas (méthadone, amitriptyline, diphenhydramine, MDMA) pour lesquels C1 est connue, il a été procédé à un calcul des concentrations post-mortem attendues (C2) ; puis celles-ci ont été comparées à la réalité. Dans 3 autres cas (tramadol, doxépine, propranolol), il a été procédé à la comparaison des concentrations entre le sang périphérique prélevé au moment du décès (sur place) et celui prélevé lors de l’autopsie, à distance de plusieurs heures.
Résultats |
Alors même que toutes les analyses post-mortem (PM) ont été réalisées dans le sang fémoral, les concentrations mesurées en post-mortem étaient supérieures à celles attendues par le calcul à partir de la concentration ante-mortem (AM), ou supérieures à celles obtenues juste au moment du décès. Les concentrations (enng/mL) sont présentées dans le Tableau 1. Il existe des facteurs ante-mortem (dose administrée, moment de l’administration, dose unique versus usage répété, voie d’administration, tolérance aux effets à long terme, concentration à l’équilibre) et des facteurs post-mortem (distribution incomplète, lieu de prélèvement, délai entre le décès et le recueil des échantillons, redistribution post-mortem) qui doivent être pris en considération dans l’interprétation des résultats d’analyses toxicologiques.
Conclusion |
Le calcul d’une dose à partir de l’équation dose=Cmax×Vd×P apparaît donc comme très risqué. La concentration post-mortem, même dans le sang périphérique, est la résultante de nombreux facteurs, dont certains sont difficiles, voire impossible à maîtriser. Le volume de distribution, donné dans toute monographie, a été déterminé chez des personnes vivantes, après une administration unique. Il a été établi à partir d’analyses faites dans le plasma ou le sérum, ce qui diffère totalement du sang total post-mortem. La plus grande prudence s’impose, alors même que la pression des magistrats peut être particulièrement forte.
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Vol 29 - N° 2S
P. S19 - mai 2017 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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