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Plasmocytose médullaire et agranulocytose médicamenteuse : rôle d’une réplication virale hépatite B ? - 22/05/17

Doi : 10.1016/j.revmed.2017.03.307 
C. Mellot 1, M. Cabon 1, , A. Bousquet 2, W. Caré 3, M.A. Audisio 1, D. Andriamanentena 1, C. Ficko 1
1 Maladies infectieuses et tropicales, hôpital d’instruction des armées Bégin, Saint-Mandé, France 
2 Biologie médicale, hôpital d’instruction des armées Bégin, Saint-Mandé, France 
3 Médecine interne, hôpital d’instruction des armées Percy, Clamart, France 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

Les agranulocytoses médicamenteuses sont fréquentes (>2 % des accidents iatrogéniques). Deux mécanismes différents sont possibles : immuno-allergique ou toxique. Nous rapportons une observation d’agranulocytose dans les suites d’un traitement par amoxicilline/acide clavulanique, avec plasmocytose médullaire majeure en association à une infection virale B active dont le rôle reste à définir dans ce contexte.

Observation

Il s’agissait d’une patiente de 41 ans, d’origine cambodgienne, hospitalisée pour asthénie, odynophagie, myalgies et fièvre évoluant depuis une semaine. Un traitement par amoxicilline-acide clavulanique était débuté depuis 5jours. À l’examen, elle présentait une angine érythémato-pultacée, sans autre point d’appel infectieux. La biologie mettait en évidence une neutropénie à 6/mm3 (pour des leucocytes à 580/mm3), hémoglobine à 12g/dL, et plaquettes à 124 000/mm3. La CRP était à 200mg/L. Les sérologies CMV, EBV, VIH, Hépatite C, toxoplasmose et parvovirus B19 étaient négatives ou en faveur d’une immunité ancienne. La sérologie hépatite B était positive (antigène HBs et anticorps anti-HBc positifs), avec une charge virale à 66 000 copies/mL, soit 4,8 log. Les anticorps anti-nucléaires étaient négatifs. Un myélogramme était réalisé à 9jours, devant la persistance de la neutropénie. Il retrouvait une moëlle pauvre, avec agranulocytose et début de régénération granuleuse associée à une plasmocytose majeure (37 %) sans atypies récurrentes mais faisant suspecter une lymphoprolifération maligne. L’immunophénotypage était polyclonal dans un contexte d’hyper-gammaglobulinémie à 15g/L (attribuée à l’infection virale), sans pic monoclonal à l’immunofixation. Le rapport des chaînes légères kappa/lambda, les LDH et la calcémie étaient dans les valeurs normales. Le caryotype medullaire était normal. L’évolution était finalement favorable avec récupération d’une formule sanguine dans les normes. Le traitement antibiotique était relayé par pristinamycine. Le contrôle de la charge virale B après normalisation de la NFS était similaire et l’évolution clinico-biologique était favorable.

Discussion

Le myélogramme objective ainsi une plasmocytose majeure, finalement considérée comme réactionnelle. Un mécanisme immuno-allergique de l’agranulocytose est privilégié et l’imputabilité relève de critères intrinsèques (séquence chronologique compatible, antécédent de prise d’amoxicilline/acide clavulanique permettant la sensibilisation antigénique, neutropénie élective, « blocage de maturation » sur les rares éléments granuleux médullaires, et faible dose cumulée à l’inverse des accidents toxiques), une imputabilité extrinsèque (mécanisme connu pour la molécule) et l’absence d’autre traitement suspect. Le diagnostic formel de la nature immuno-allergique repose sur la présence d’anticorps dirigés contre le médicament et entraînant la destruction cellulaire sur cultures de progéniteurs granulocytaires du patient. En pratique, les explorations immunologiques sont rarement entreprises car elles s’avèrent souvent négatives. Dans les agranulocytoses immuno-allergiques, on constate le plus souvent une absence complète ou partielle de la lignée granulocytaire avec une augmentation relative du taux des autres lignées. Les déséquilibres des lignées dépendent de la nature de l’antigène visé par le mécanisme immuno-allergique et du stade de maturation auquel il est exprimé au sein de la lignée myéloïde. L’hyperplasie plasmocytaire relative, inconstante, peut être supérieure à 20 %. Les lymphoproliférations malignes (myélome ou lymphome lymphoplasmocytaire) peuvent alors être évoquées. Cependant, les plasmocytes sont d’aspects matures, le plus souvent en position péricapillaire ou en amas pauci-cellulaires. Quelques formes plus jeunes, à noyaux moins condensés et nucléolés (proplasmocytes), s’observent de façon disséminée dans les fortes réactions. Le caractère bénin en cas d’infection virale s’associe à une lymphocytose ou une histio-monocytose mais la plasmocytose isolée est plus rare. La présence concomitante d’une hépatite B active peut ainsi constituer un terrain dysimmunitaire favorisant comme en témoigne l’hypergammaglobulinémie polyclonale associée. Le caractère pléiomorphe et la polyclonalité des plasmocytes en immunohistochimie et un rapport des chaînes légères<4 est rassurant. L’absence d’immunoglobuline monoclonale conforte cette hypothèse.

Conclusion

La plasmocytose médullaire réactionnelle, parfois majeure, peut se rencontrer dans les agranulocytoses immuno-allergiques. Si une cause maligne est naturellement suspectée, les critères anamnestiques d’imputabilité, les caractéristiques du myélogramme et des examens simples permettent de l’éliminer. La guérison clinique sans séquelle est habituellement obtenue en moins de 10jours. Le rôle promoteur du virus de l’hépatite B reste à définir.

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