Santé maternelle en Afrique francophone - Morbidité maternelle et qualification du personnel de santé : comparaison de deux populations différentes au Sénégal - 09/03/08
A. Dumont [1, 2 et 3],
L. de Bernis [4],
D. Bouillin [3],
A. Gueye [2],
J.-P. Dompnier [3],
M.-H. Bouvier-Colle [5]
Voir les affiliationsDevant la situation démographique particulière des pays en voie de développement et le niveau élevé de la mortalité maternelle, la santé des mères et des enfants constitue une priorité d'action pour les partenaires au développement.
L'objectif de cette étude est de comparer la situation sanitaire maternelle entre deux populations différentes où l'offre de soins est contrastée, construire des indicateurs de santé adaptés à cette comparaison et tester l'hypothèse que les différences en terme de santé maternelle dépendent en grande partie du niveau de qualification du personnel soignant.
Il s'agit d'une étude prospective d'une cohorte de femmes enceintes résidant dans deux sites du Sénégal (Saint-Louis et Kaolack) faisant elle-même partie d'une enquête multicentrique sur la morbidité maternelle dans six pays de l'Afrique de l'Ouest (MOMA). 3 777 femmes enceintes ont pu être suivies complêtement au Sénégal tout au long de la grossesse, à l'accouchement et en post-partum. La morbidité a été enregistrée par des enquêtrices spécialement formées au cours des visites à domicile et par l'accoucheur dans les structures sanitaires.
La mortalité maternelle était plus élevée dans la zone de Kaolack, où les femmes utilisaient essentiellement les soins obstétricaux d'urgence (SOU) de base (centre de santé) que dans la ville de Saint-Louis qui offre des SOU complets de proximité (hôpital régional). Paradoxalement, la morbidité maternelle sévère diagnostiquée dans les structures sanitaires était plus importante à Saint-Louis qu'à Kaolack. Les analyses uni- et multivariée montrent que la morbidité sévère diagnostiquée était liée en grande partie au niveau de qualification de l'accoucheur et que le suivi prénatal n'avait aucun effet. L'étude comparative de la qualité des soins obstétricaux dans les structures suggère que celle-ci était meilleure à Saint-Louis qu'à Kaolack.
Les sages-femmes travaillant dans les structures SOU semblent repérer plus aisément les complications obstétricales que les matrones : leurs patientes reçoivent ainsi des soins immédiats et sont exposées à un risque de mourir moins élevé. Ces résultats suggèrent que la redistribution du personnel le plus qualifié dans les salles de travail est un pillier essentiel de la lutte contre la mortalité maternelle.
Maternal morbidity and qualification of health-care workers: comparison between two different populations in Senegal. |
Objective. High fertility rates and high maternal mortality ratios have led most cooperation agencies to place high priority on health of women and children. The objective of this study was to compare maternal morbidity and mortality tin two populations with widely contrasting availability of health care in order to test the hypothesis that differences in maternal outcome mainly result from the qualification of health carers.
Methods. This population-based study included a cohort of pregnant women which was part of a multicenter study of maternal morbidity in six countries in West Africa (MOMA). We compared health outcome in two different populations of Senegal (Saint-Louis and Kaolack).3,777 pregnant women were follow through pregnancy, delivery and pureperium. Maternal morbidity was assessed from the women's recall at each visit of the investigator and from obstetric complications diagnosed by the birth attendant within health facilities.
Results. Maternal mortality was higher in the Kaolack area where women gave birth mainly in district health care centers, most often assisted by traditional birth attendants, than in Saint-Louis where women giving birth in health facilities were principally referred to the regional hospital and were generally assisted by midwives (874 and 151 maternal deaths per 100,000 live births respectively, p < 0.01). Diagnosed maternal morbidity, however, was higher in Saint-Louis than in the Kaolack area, especially for births in health facilities (9.50 and 4.84 episodes of obstetric complications per 100 lie births respectively, p < 0.01). Univariate and multivariate analyses showed that diagnosed morbidity was mainly associated with degree of training of the health attendant in facility deliveries and that antenatal care had no effect.
Discussion. Midwives in health facilities appear to detect more obstetric complications than traditional birth attendants. Immediate detection leads to immediate care and to a lower case-fatality rate. This could explain the differences in maternal outcome between two urban centers with contrasting health care availability.
Conclusion. These results suggest that one of the strongest weapons in the fight against maternal mortality is the employment of the most qualified personnel possible for monitoring labor.
Mots clés : Mortalité maternelle , Morbidité obstétricale diagnostiquée , Structures de santé , Pays en voie de développement
Keywords:
Diagnosed maternal morbidity
,
Maternal mortality
,
Health facilities
,
Developing countries
Plan
© 2002 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Vol 31 - N° 1
P. 70-79 - février 2002 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.