Greffe hépatique et pièges de l’intoxication volontaire par la forme « retard » du paracétamol - 10/05/18
Résumé |
Objectif |
Rapporter une observation d’intoxication aiguë volontaire par une forme « retard » du paracétamol qui illustre la difficulté de l’interprétation de la paracétamolémie et les causes possibles d’un échec du schéma d’administration classique de la N-acétylcystéine (NAC).
Description |
Un patient de 24 ans aux antécédents psychiatriques était transféré pour hépatite fulminante suite à une ingestion suicidaire de paracétamol et d’éthanol. La dose ingérée demeurait indéterminée, le délai entre l’ingestion et l’admission pouvant être entre 8 et 12h. La paracétamolémie initiale était de 179,3mg/L et l’éthanolémie de 1,52g/L. Le patient recevait le schéma classique de NAC en 20h. Le charbon de bois activé n’avait pas été administré. Trois paracétamolémies étaient obtenues à h7 (après le début de la NAC) (230,2mg/L), h12 (126,8mg/L) et h24 (62,7mg/L). L’évolution clinique et biologique était favorable. Après avis psychiatrique, une mise en observation était ordonnée dans une institution psychiatrique. Toute prise additionnelle de paracétamol pouvait être exclue pendant cette période. Le patient était ré-adressé aux urgences 24h plus tard pour troubles de la conscience et flapping. La paracétamolémie était de 104,7mg/L à h48, justifiant la reprise de la NAC. Parallèlement apparaissaient une cytolyse avec coagulopathie, hypoglycémie, insuffisance rénale aiguë et acidose lactique. L’indication de transplantation hépatique était posée à j4 sur base des critères du King's College et la greffe réalisée à j6. Les emballages retrouvés a posteriori à domicile correspondaient à du Panadol® Retard (665mg). La paracétamolémie ne devenait indétectable qu’à j7. Les suites opératoires étaient marquées par une lente amélioration neurologique et de la fonction rénale.
Discussion |
L’ingestion suicidaire de paracétamol à libération prolongée (LP) pose des problèmes diagnostiques et thérapeutiques [1 ]. Le nomogramme de Rumack-Matthew n’est pas utilisable. Par ailleurs, le schéma classique d’administration de NAC en 20h peut être pris en défaut. Habituellement, le paracétamol « retard » est résorbé jusqu’à une période de 8heures qui peut être prolongée en cas d’ingestion massive. Exceptionnellement, un deuxième pic plasmatique pourrait être observé en cas de perturbations de la motilité gastro-intestinale ou de la résorption. Les modifications cinétiques induites par cette forme « retard » imposent des prélèvements toxicologiques itératifs, idéalement toutes les 6heures, afin de guider également la durée du traitement par la NAC qui doit se prolonger jusqu’à l’absence de détection du paracétamol et à la correction des perturbations hépatiques. Le schéma habituel est de prolonger la phase finale de 100mg/kg de NAC par périodes de 16h.
Conclusion |
L’ingestion de la forme « retard » du paracétamol pose d’importants problèmes diagnostiques et thérapeutiques et impose le maintien du patient dans un milieu permettant une surveillance clinique et biologique rapprochée.
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Vol 30 - N° 2S
P. S75 - juin 2018 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.