L’interaction du sexe et du genre dans les essais contrôlés randomisés : une approche méta-épidémiologique - 06/06/18
Résumé |
Introduction |
Des analyses en sous-groupe en fonction du sexe sont souvent réalisées dans les essais contrôlés randomisés pour rechercher une modification de l’effet des traitements (ou interaction, au sens statistique) par des facteurs morphologiques (poids, masse grasse, volume plasmatique plus grands chez l’homme…) ou pharmacocinétique (demie-vie…). Cependant, seuls quelques auteurs concluent sur la validité de leurs résultats quand une interaction positive est identifiée. Cette étude méta-épidémiologique a pour but d’évaluer la fréquence et la pertinence de la recherche d’interaction entre le sexe des patients et l’effet d’un traitement dans les essais contrôlés randomisés.
Matériels et méthodes |
Des études cliniques présentant des analyses en sous-groupes ont été recherchées sur PubMed. La prévalence observée des interactions positives a été comparée à sa valeur théorique (0,05) par le test du Chi2. Les ratios des odds ratios (ROR) homme/femme pour les tests d’interaction ont été calculés et combinés par méta-analyse pour gagner en puissance si des facteurs communs (comportement sociologique face au traitement, facteurs morphologiques) expliquent une éventuelle différence de réponse au traitement en fonction du sexe. Ce paramètre permet en effet de calculer la différence de l’effet des traitements en fonction du sexe. Une valeur supérieure à 1 est en faveur d’une meilleure efficacité chez la femme.
Résultats |
Au sein des 148 analyses en sous-groupe pour le sexe ou du genre, reportés dans 133 publications, onze (7,4 %) tests d’interaction provenant de 10 études étaient des interactions sexe–traitement statistiquement positives. Cette proportion n’était pas différente de celle attendue par le hasard (p=0,34 par test du Chi2). Les études présentant des interactions sexe–traitement positives évaluaient l’effet du védolizumab (rectocolite hémorragique) ; ramucirumab (cancer gastrique avancé ou adénocarcinome de la jonction gastro-œsophagienne) ; ipilimumab et sargramostim (mélanome métastatique) ; thiénopyridine et aspirine (à la suite d’une angioplastie et pose d’un stent) ; darapladib (syndrome coronarien aigu) ; chimioradiothérapie (cancers bronchiques non à petites cellules) ; cytisine (fumeur) ; isoniazide, rifampine, pyrazinamide, et moxifloxacine (tuberculose) ; obinutuzumab et chlorambucil ainsi que le rituximab et chlorambucil (leucémie lymphoïde chronique) ; bivalirudin (angioplastie coronaire). Parmi ces dix essais cliniques, sept recherches d’interactions sexe–traitement étaient spécifiées a priori dans le protocole. Quatre auteurs ont discuté un rationnel expliquant une éventuelle interaction positive de leur étude sans retenir de manière formelle cette interaction comme avérée (mise en place d’études supplémentaires dédiées pour corroborer ces résultats, en pratique non réalisées). Les auteurs restants n’ont pas retenu l’interaction supposée comme un résultat pertinent. Le ROR (homme/femme) global était non significatif (ROR [homme/femme]=0,98, intervalle de confiance à 95 % [0,95–1,02], p=0,38) sans hétérogénéité significative (I2=7 %).
Conclusion |
Les résultats de notre étude n’ont pas suggéré d’hétérogénéité dans l’effet d’un traitement en fonction du genre ou du sexe. De plus, aucune des interactions positives trouvées n’a été confirmée par des essais ultérieurs ou bien n’a résulté en une adaptation des pratiques cliniques selon le sexe après la publication desdits résultats. Nos résultats sont en accord avec une précédente étude méta-épidémiologique explorant les interactions sexe–traitement grâce à l’analyse de méta-analyses de différents essais contrôlés randomisés. Il ne semble pas y avoir d’effet global sociologique, morphologique ou pharmacocinétique influant la réponse au traitement des femmes et des hommes. Dans l’ensemble, la recherche d’une interaction entre le sexe et l’effet du traitement ne devrait pas être systématiquement évaluée par des analyses en sous-groupes et devrait être limitée à des spécialités suspectées d’avoir une interaction avec le genre d’après leurs propriétés pharmacologiques.
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Vol 39 - N° S1
P. A118-A119 - juin 2018 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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