Une maladie de Castleman multicentrique fulminante révélée par un syndrome d’activation macrophagique chez un patient immunocompétent VIH négatif - 06/06/18
Résumé |
Introduction |
La maladie de Castleman multicentrique (MCD) est un syndrome lymphoprolifératif rare, caractérisé par une prolifération plasmocytaire polyclonale anormale. Son association au syndrome d’activation macrophagique (SAM) n’est pas rare et grève le pronostic de la maladie. La MCD est le plus souvent associée au virus HHV-8 chez les patients immunodéprimés, notamment par le VIH. Les cas chez des patients immunocompétents sont plus rares. Nous rapportons le cas d’un patient présentant une MCD de forme agressive, en dehors de toute immunodépression, révélé par un SAM.
Observation |
Un patient de 59 ans, souffrant d’une hypertension artérielle et d’un diabète de type 2 non insulino-requérant, était pris en charge pour une sévère altération de l’état général fébrile. L’évaluation initiale révélait une polyadénopathie cervicale et axillaire, une splénomégalie avec une flèche de 15cm et une pancytopénie (leucocytes à 3,2G/L, hémoglobine à 8,3g/dL et plaquettes à 13G/L). Devant l’association fièvre, syndrome tumoral et pancytopénie, un SAM était évoqué, conforté par une hyperferritinémie à 6880μg/L et une hypertriglycéridémie à 2,8mmol/L. Le myélogramme montrait une infiltration plasmocytaire sans anomalie, associée à des histiocytes inflammatoires. Le diagnostic de SAM était retenu et le H-score évalué à 99,8 %. Devant la sévérité clinique, un traitement par VP16 (150mg/m2) était administré rapidement. Sur le plan étiologique, il n’y avait pas d’argument en faveur d’une maladie de Still ou d’une connectivite. Il n’y avait ni anticorps antinucléaires ni anticorps anti-DNA natifs, et le complément n’était pas consommé. L’électrophorèse des protéines sériques décelait par contre une hypergammaglobulinémie polyclonale à 36,9g/L. Le TEP-scanner montrait un hypermétabolisme modéré splénique et des adénopathies cervicales et axillaires. La PCR EBV s’avérait positive à 4,51log copies/mL. La biopsie ostéomédullaire révélait une abondante plasmocytose d’allure réactionnelle, n’excluant pas une cause d’inflammation chronique (infection, maladie de Castleman multicentrique, connectivite). Nous retenions donc l’imputabilité de la réplication EBV et un traitement par rituximab (375mg/m2 hebdomadaire) était débuté. Secondairement, nous avons observé la positivité de la PCR HHV-8 (6,5log copies/mL) alors que 3 sérologies VIH 1 et 2 (Elisa et Western-Blot) étaient négatives. En l’absence d’immunodépression et devant l’amélioration de l’état du patient, les perfusions de rituximab étaient poursuivies. Un nouvel examen clinique isolait une modeste lésion violine de la jambe, prélevée. À j14, une fièvre réapparaissait (40,3°C), attribuée à une étiologie infectieuse devant la nette amélioration des paramètres du SAM (ferritinémie à 1640μg/L, triglycérides à 1,11mmol/L, fibrinogène à 4,04g/L). Parallèlement, nous observions une plasmocytose circulante rapidement croissante (8,5 % des leucocytes à j14, 17 % à j15). Devant la biopsie ostéomédullaire, la plasmocytose sanguine et la PCR HHV-8, une maladie de Castleman multicentrique était retenue. En raison d’une rapide dégradation avec état de choc, le patient était transféré en réanimation. Une nouvelle perfusion de VP16 était administrée et un traitement par cyclophosphamide débuté. Le patient décèdera d’une défaillance multiviscérale 24heures après le transfert en réanimation. L’étude histologique de la lésion cutanée révélait a posteriori un sarcome de Kaposi.
Discussion |
Dans une revue récente (18 patients), le phénotype des patients immunocompétents présentant une MCD ne différait pas des patients séropositifs pour le VIH [1 ]. L’association du virus HHV-8 à la MCD est fréquente chez les patients séropositifs pour le VIH mais l’était également chez 40 à 50 % des patients séronégatifs [2 ]. Son rôle dans la synthèse de l’homologue virale de l’IL-6, stimulant la différenciation plasmocytaire, est fortement suspectée, d’autant qu’une franche élévation de l’IL-6 sérique existe chez les patients présentant une MCD. Ceci pourrait expliquer la fréquente association au SAM, par stimulation lymphocytaire T et hypersécrétion cytokinique [3 ]. Dans notre observation, la dégradation sévère de l’état général et la croissance rapide de la plasmocytose suggérait une forme fulminante, principalement décrite chez les patients immunodéprimés, et dont le principal diagnostic différentiel reste le syndrome de restauration immunitaire.
Conclusion |
La MCD est une pathologie rare chez les sujets immunocompétents. Toutefois, nous pensons qu’elle doit être évoquée devant un SAM sans point d’appel évident, en raison d’un pronostic effroyable, d’autant plus en présence de signes d’activation plasmocytaire.
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Vol 39 - N° S1
P. A187 - juin 2018 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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