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Questions épistémologiques et éthiques sur les techniques appliquées au génome humain - 11/06/18

Epistemological and ethical questions on technics used on human genome

Doi : 10.1016/j.jemep.2018.04.005 
A. Ivasilevitch a, , P. Charlier b
a Équipe d’anthropologie médicale, laboratoire Dante (EA4498), université Versailles Saint-Quentin, 2, avenue de la source de la Bièvre, 78180 Montigny-Le-Bretonneux, France 
b Département de consultations et de santé publique, unité sanitaire, hôpital Max Fourestier, maison d’arrêt des Hauts-de-Seine, 403, avenue de la République, 92014 Nanterre, France 

Auteur correspondant.
Sous presse. Épreuves corrigées par l'auteur. Disponible en ligne depuis le Monday 11 June 2018
Cet article a été publié dans un numéro de la revue, cliquez ici pour y accéder

Résumé

Dans cet article, notre propos est de dresser un tableau de l’ensemble des enjeux éthiques impliqués par les techniques de modification ciblée du génome. En particulier, lorsque celles-ci s’appliqueraient à un embryon humain, au titre de thérapies géniques germinales. Déployée en un triptyque, notre réflexion se penchera tour à tour sur la question du « comment » des nouvelles biotechnologies, puis sur la question du « qui », pour terminer sur la question du « quoi ». À la première partie, revient donc le problème de la faisabilité technique des thérapies géniques. Après des remarques liminaires sur la témérité de certains projets, c’est à l’épreuve de la biologie moléculaire et à l’épigénétique que l’on interrogera leur efficacité. Dans la mesure où l’organisme vivant, pour l’homme, est aussi un corps-vécu, on y ajoutera la question de savoir quels impacts pourrait produire un remaniement des gènes sur l’identité de la personne génétiquement modifiée. La deuxième partie, quant à elle, sera consacrée au statut de l’embryon humain. Par une incursion dans l’Antiquité, où le débat sur sa nature existait déjà, puis par une comparaison avec les arguments qui se font aujourd’hui entendre, on soulignera l’aporie de ce débat, qu’il s’agit de le dépasser, qu’il ne saurait représenter un obstacle à la réflexion. Sur cette lancée, on dégagera le bénéfice qui pourrait être tiré de l’exercice de thérapies géniques germinales, loin de froisser la dignité inhérente reconnue à l’embryon. On répondra à l’argument de certains auteurs, à l’instar de Tristram Englehardt Jr., selon lesquels une manipulation du génome de l’embryon pourrait s’assimiler au simple exercice d’un droit de propriété sur une chose, laquelle réponse nous conduira à défendre un statut gradué de l’embryon, évolutif, s’inscrivant dans le sillage des explications émises par le CCNE sur la notion de « personne humaine potentielle ». Ce statut exposé, on conclura alors en analysant comment les thérapies géniques germinales, cette fois considérées comme nouvelles méthodes de procréation, pourraient s’intégrer dans la législation en vigueur. Enfin, comment parler des techniques de modification génétique sans parler du transhumanisme, sans parler de l’eugénisme ? Voilà qui nous amène à la troisième partie. Concrètement, quelle anomalie devrait être éradiquée du génome de l’embryon ? Parce que cette opération porte sur une lignée germinale, par suite transmissible à toute la descendance, donc aux générations futures : qu’est-ce qui devrait être corrigé du patrimoine génétique de l’humanité ? Et, par la montée du nouveau paradigme porté par le transhumanisme, le paradigme mélioriste : pourquoi ne pas augmenter ce patrimoine ? Au cœur de la polémique : quelle place accorder à la contingence génétique ? Ici, on opposera le paradigme thérapeutique au paradigme mélioriste. Ceci dit, il s’agira surtout de voir que l’opposition n’est pas aussi rigoureuse, qu’il existe une porosité entre les deux. Par endroits, la frontière se brouille, et les deux communiquent : l’art médical peut lui-même être amélioratif en agissant en dehors de toute pathologie, le méliorisme peut répondre à un souci thérapeutique. De même, si l’eugénisme est le danger qui porte son ombre, on verra que c’en est une forme inédite qui se profile, celui-ci libéral, et qui n’épargne ni le thérapeutique, ni le méliorisme. Pour l’un, l’horizon s’obscurcit par le risque d’une « procréation responsable » exubérante, pour l’autre, par celui d’une sorte d’épuration génétique, une course éperdue au perfectionnement.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

Summary

In this article, our purpose is to propose a panorama of various ethical issues involved in targeted genome modification techniques. In particular, when these would apply to a human embryo, as germinal gene therapies. Distributed into a triptych, we will look in turn at the question of the “how” of the new biotechnologies, then on the question of “who”, to finish on the question of “what”. In the first part, therefore, comes the problem of the technical feasibility of gene therapies. After introductory remarks on the temerity of certain projects, it is in the face of molecular biology and epigenetics that one must question their effectiveness. Insofar as the living organism is also a living body, we will add the question of what impacts could produce a gene reworking on the identity of a genetically modified person. The second part will focus on the status of the human embryo. By an incursion into Antiquity, where the debate about Nature already existed, then by a comparison with the arguments that are heard today, we will highlight the aporia of this debate, that it is to exceed that it cannot be a hindrance to reflection. In this momentum, we will identify the benefit that could be derived from the exercise of germ line therapies, far from offending the inherent dignity recognized by the embryo. We will try to answer the argument of some authors, such as Tristram Englehardt Jr., that a manipulation of the genome of the embryo could be assimilated to the simple exercise of a property right on a thing, which answer we will lead to defend a graduated status of the embryo, evolving, in line with the explanations given by the French National Consultative Comity of Ethics on the notion of “potential human person”. Once this status is exposed, we will conclude by analyzing how germinal gene therapies, this time considered as new methods of procreation, could be integrated into the legislation in force. Finally, we will mention transhumanism and eugenics: in concrete terms, what anomaly should be eradicated from the genome of the embryo? Because this operation deals with a germ line, therefore transmissible to all descendants, so to future generations: what should be corrected for the genetic inheritance of humanity? And by the rise of the new paradigm carried by transhumanism: why not increase this heritage? At the heart: what place to grant genetic contingency? Here, we will oppose the therapeutic paradigm to the meliorist paradigm. That said, it will be important to see that the opposition is not as rigorous, that there is a porosity between the two. In some places, the frontier becomes confused, and both communicates: the medical art itself can be ameliorative by acting outside any pathology, and the mimicry can respond to a therapeutic concern. Similarly, if eugenics is the danger that carries its shadow, it will be seen that it is an unprecedented form that looms, this one liberal, and which spares neither therapy, nor mismanism. For one, the horizon is clouded by the risk of exuberant “responsible procreation”, for the other, by that of a sort of genetic purification, a race desperate for perfection.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

Mots clés : Crispr-cas9, Éthique, Eugénisme, Statut de l’embryon, Techniques de modification ciblée du génome, Thérapies géniques germinales, Transhumanisme

Keywords : Crispr-cas9, Ethics, Eugenics, Embryo status, Targeted genome modification techniques, Germ line gene therapy, Transhumanism


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