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Analogues de l’ayahuasca : le chamanisme de synthèse - 21/08/18

Doi : 10.1016/j.toxac.2018.07.064 
J. Langrand 1, , L. Dufayet 1, A. Villa 1, I.A. Larabi 2, J.-C. Alvarez 2
1 Centre antipoison et de toxicovigilance, hôpital Fernand-Widal, Paris, France 
2 Laboratoire de toxicologie, hôpital Raymond-Poincaré, Garches, France 

Auteur correspondant.

Résumé

Objectif

L’ayahuasca est un breuvage psychédélique originaire du bassin amazonien et utilisé dans des rites chamaniques. Il consiste en l’ingestion successive de 2 décoctions végétales, l’une ayant un effet inhibiteur de la monoamine oxydase (IMAO), l’autre contenant de la diméthyltryptamine (DMT) responsable des effets hallucinogènes. Son utilisation en Europe est limitée par la réglementation qui l’interdit, et par le climat peu propice à la culture des espèces végétales utilisables. Afin de contourner ces difficultés, des « analogues de l’ayahuasca » existent, dont l’utilisation a été peu décrite. Nous rapportons le cas d’un homme de 42 ans ayant tenté de réaliser par ses propres moyens une extraction sélective de DMT à partir d’écorce de racines de Mimosa hostilis en poudre, achetée sur internet.

Description du cas

À l’aide d’une méthode d’extraction détaillée sur un site internet, elle-même issue d’une publication dans la revue « the Entheogen review », il a tenté cette extraction. La recette en 10 étapes nécessite de l’écorce de M. hostilis, de la soude, du vinaigre, un solvant naphta, de l’ammoniaque, un congélateur, un moulin et des filtres à café, et de la vaisselle de chimie. Après avoir suivi ces étapes, il a obtenu une pâte qu’il a laissée sécher, puis qu’il a fumée. Peu de temps après, il a ressenti une douleur thoracique, des nausées et des vertiges, une sensation de palpitation cardiaque, de tremblement généralisé, et une anxiété. Il n’a ressenti aucun effet hallucinogène. Il a alors appelé le centre antipoison qui l’a adressé aux urgences. À l’admission, son examen clinique était sans particularité hormis une dysarthrie, sa tension artérielle était à 144/87mm Hg et son ECG était strictement normal. Le criblage toxicologique urinaire réalisé aux urgences à la recherche de substances psychoactives était négatif. Un prélèvement sanguin a été adressé au laboratoire de toxicologie du CHU de Garches où un dosage spécifique de DMT a été réalisé par chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse en tandem (LC-MS/MS) sur un TSQ Vantage®. La limite de détection de la technique était de 1 ng/mL. En cohérence avec l’absence d’effets psychédéliques rapportés, ce dosage est revenu négatif.

Résultats

Il s’agissait d’une première tentative infructueuse pour cet apprenti chaman. Néanmoins, de nombreux « trip reports » en ligne rapportent la réussite de cette opération par des opérateurs plus expérimentés. L’écorce de racines de M. hostilis contient en effet environ 0,5 % de DMT. Par ingestion, la DMT nécessite la consommation préalable d’un IMAO pour prévenir la dégradation de la DMT par les mono-oxydases digestives. Par inhalation, l’association d’un IMAO à la DMT n’est pas nécessaire, ce qui permet d’éviter la survenue d’un syndrome sérotoninergique, décrit par certains utilisateurs. La synthèse de DMT « maison » présente donc de nombreux avantages : la bonne disponibilité des différentes espèces végétales contenant la DMT, l’absence de réglementation les concernant, et la possibilité d’usage par inhalation qui affranchit des effets toxiques des IMAO. En revanche, si l’équipement requis est simple, ce cas souligne également la nécessité d’une certaine expérience dans les techniques de laboratoire qui manque parfois aux utilisateurs novices.

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Vol 30 - N° 3

P. 183 - septembre 2018 Retour au numéro
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