La dénutrition touche jusqu’à 70 % des patients en service de gériatrie. L’efficacité clinique des compléments nutritionnels oraux (CNO) est largement démontrée chez les sujets âgés dénutris, à condition que les CNO soit bien consommés, ce qui n’est pas toujours le cas (anorexie, aversions, lassitude..). Respecter les préférences des patients semble essentiel pour améliorer l’adhésion au traitement. L’objectif principal de cette étude était de comparer l’observance de la prise de CNO chez des sujets âgés dénutris selon 2 modalités de prescription : préférences/aversions affichées oralement (G1) ou choix éclairé après dégustation d’une sélection de produits (G2). L’objectif secondaire était de comparer entre G1 et G2 l’évolution du statut nutritionnel au cours du séjour hospitalier et 3 mois après la sortie de l’hôpital.

Cette étude prospective, randomisée, contrôlée, ouverte, menée en groupes parallèles, a inclus des patients hospitalisés dans 2 services de court séjour de gériatrie, nécessitant tous une prescription de CNO. Quotidiennement lors du séjour, un diététicien a évalué les prises alimentaires (CNO compris) et a déterminé l’adhésion thérapeutique par le ratio entre quantité de CNO réellement consommée et quantité prescrite. D’autres paramètres ont également été recueillis : poids, appétit (échelle visuelle analogique), albumine, transthyrétine. Le statut nutritionnel a été réévalué à domicile, 3 mois après la sortie.

170 patients ont été inclus dans l’étude (G1, n=86 et G2, n=84). Les 2 groupes sont comparables en âge (86,3±6 vs 86,2±6,2 ans), IMC (22,6±4,5 vs 22,5±4,7kg/m²), perte de poids au cours des 6 derniers mois (10,7±8.2 vs 11,6±5,9kg) et durée moyenne de séjour (13,8±9,4 vs 13,1±11,8jours). La consommation des CNO prescrits n’est pas influencée de façon significative par la stratégie de choix éclairé (G1 86,2 vs G2 84,2 %, ns). Les paramètres nutritionnels cliniques et biologiques s’améliorent de façon comparable dans les 2 groupes. Néanmoins, à 3 mois, chez les 102 sujets réévalués (60 %), il existe une tendance en faveur de la stratégie du choix éclairé pour le poids, la consommation alimentaire et le MNA (Tableau 1).

L’impact positif très net de l’accompagnement du soin nutritionnel par un diététicien est confirmé, durant le séjour hospitalier comme à domicile. La faisabilité d’une stratégie de prescription des CNO par choix éclairé en gériatrie est démontrée même si elle semble ne pas avoir d’influence significative sur l’observance à court terme chez des sujets dénutris de plus de 85 ans dont l’adhésion thérapeutique est déjà très bonne. Toutefois, une tendance favorable se dégage sur l’évolution du statut nutritionnel à trois mois. L’impact de cette stratégie de prescription des CNO après choix éclairé pourrait être étudié sur des sujets plus jeunes (70–80 ans).