Un hémopéritoine révélateur d’une dysplasie fibromusculaire multifocale - 28/11/18
Résumé |
Introduction |
La dysplasie fibromusculaire (DFM) est une atteinte vasculaire systémique rare d’origine inconnue, affectant habituellement les femmes jeunes. Les artères rénales, carotides et artères vertébrales sont les plus fréquemment touchées mais l’ensemble du lit vasculaire peut être atteint, notamment l’artère mésentérique supérieure (AMS).
Observation |
Il s’agit d’une femme de 50 ans, tabagique, aux antécédents de colique néphrétique (faisant découvrir une atrophie rénale droite et dysplasie artérielle) en 2006, une hypertension artérielle (HTA) et un accident ischémique transitoire en 2012 traité par acide acétylsalicylique (faisant découvrir un foramen ovale perméable (FOP), une dissection de l’artère vertébrale gauche et un anévrysme de la terminaison du tronc basilaire). La patiente présente fin septembre 2017 une douleur épigastrique intense compliquée d’un malaise avec perte de connaissance. Elle est transférée aux urgences où elle est apyrétique, présente de bonnes constantes hémodynamiques et une défense en épigastrique et hypochondre droit. La biologie n’objective ni syndrome inflammatoire ni cytolyse ou cholestase ictérique mais une déglobulisation (perte de 3 points d’hémoglobine en 24heures). L’échographie abdominale est normale. Devant la persistance d’un tableau abdominal hyperalgique, elle bénéfice d’une cœlioscopie exploratrice qui découvre un hémopéritoine spontané (sans saignement actif). Le scanner abdominopelvien réalisé après la cœlioscopie objective un hématome de 22×40mm refoulant la veine mésentérique supérieure en avant et la veine cave inférieure en arrière. La recherche d’une cause infectieuse, d’une vascularite ou connectivite et d’une maladie génétique (syndrome D’Ehlers-Danlos, Marfan ou neurofibromatose) est négative. La patiente bénéfice également d’une artériographie compliquée d’une rupture spontanée d’un faux anévrisme de l’AMS (embolisé). Les suites sont marquées par la récidive d’un abdomen chirurgical avec pancréatite aiguë alithiasique et un défaut de rehaussement des anses pariétales, d’origine ischémique résolutive après plusieurs jours de jeun. Une DFM multifocale avec atteinte des artères vertébrale, rénale et AMS est retenue.
Discussion |
La DFM est une maladie vasculaire segmentaire, rare et idiopathique, prédominant chez les femmes d’âge moyen (30 à 50 ans). Elle entraîne des sténoses, anévrysmes ou dissections focales non athérosclérotiques non inflammatoires des artères de moyen calibre. Elle touche habituellement les artères rénales et cérébrovasculaires, responsable d’une HTA rénovasculaire et d’accidents vasculaires cérébraux chez des sujets jeunes. Le diagnostic peut être clinique (sujet jeune, absence d’athérosclérose ou de diagnostic alternatif, aspect de « chapelet » à l’imagerie) ou histologique. Si l’angioscanner/angio-IRM ne sont pas invasifs, l’artériographie reste l’examen de référence. La DFM ne représente que 10 % des atteintes vasculaires de l’AMS et l’atteinte de l’AMS est rare dans la DFM (5 % des cas). Dans la série de Cormier, 30 cas d’atteinte de l’AMS lors de DFM sont décrits : 14 formes sténosantes, découvertes sur un tableau d’angor ou ischémie mésentérique et aspect de sténose diffuse irrégulière de l’AMS et du tronc cœliaque ; 8 cas d’anévrysmes (souvent sacciformes) découverts lors d’échographies réalisées pour des douleurs abdominales (une rupture spontanée sur greffe bactérienne) ; 8 cas de dissection, découverts sur des tableaux d’angor ou d’infarctus mésentérique, prédominant chez l’homme et respectant la portion proximale de l’AMS. L’association à une dysplasie des artères rénales était habituelle et le traitement souvent chirurgical. Habituellement, les lésions symptomatiques de DFM sont accessibles à une angioplastie percutanée sans pose de stent (6 % de complications à type d’hématome, hémorragie, dissection, emboles selon la méta-analyse de Trinquart). Le contrôle tensionnel (IEC/ARA2), sevrage tabagique+− antiagrégants plaquettaires sont préconisés. Dans la série de 447 patients de Olin, la DFM est multifocale dans 40 % des cas mais ce chiffre pourrait être sous-estimé. En effet, selon la série de 113 patients de Bolen (ayant une DFM et une imagerie thoraco-abdominopelvienne systématique), une atteinte multifocale est présente dans 96 % des cas. Enfin, l’association de FOP et DFM semble fortuite (aucun cas rapporté dans la littérature et forte prévalence du FOP dans la population générale).
Conclusion |
Ce cas est intéressant car la patiente a présenté un hémopéritoine secondaire à une rupture spontanée d’anévrysme de l’AMS sur un terrain de DFM multifocale asymptomatique. Ainsi, le dépistage systématique d’une atteinte digestive (par angioTDM/IRM) au diagnostic de DFM pourrait apporter un bénéfice aux patients, même asymptomatiques.
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Vol 39 - N° S2
P. A170-A171 - décembre 2018 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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