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Améliorer la pertinence des stratégies médicales - 03/07/19

Improving relevance of medical strategies

Doi : 10.1016/S0001-4079(19)31514-6 
René Mornex : (Rapporteur)
 Membre de l’Académie nationale de médecine. 

Au nom d’un groupe de travail, sous la direction de René Mornex, constitué de :

Pierre Bégué, François Dubois, Jean Dubousset, François Xavier Maquart, Guy Nicolas, Jean-Daniel Sraer, Jean-Paul Tillement


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RÉSUMÉ

C’est le but que s’était fixé le groupe de travail de l’Académie nationale de médecine composé de sept membres sous la direction de René Mornex pour essayer d’obtenir une médecine sobre qui dans une approche humaniste soigne mieux au moindre coût. Vingt-six auditions de diverses personnalités essentiellement médicales (soit internes soit externes à l’Académie), mais aussi administratives, ministérielles, ou institutionnelles sont venues nourrir, critiquer, ou renforcer nos propres réflexions, qui s’appuyaient aussi sur les 7 rapports ou communiqués précédemment produits et diffusés par notre Académie.

La première partie a consisté à faire un état des lieux qui a permis de constater que si la connaissance des recommandations des bonnes pratiques édictées par l’HAS était bonne, leur application ne l’étaient pas, raisons de nombreuses dérives, pour les bilans de santé, pour les dépistages de masse (exemple PSA), pour les examens biologiques trop souvent réclamés « en bloc », ou d’imagerie légère (comme l’échographie) ou lourde (Scanner, IRM) trop souvent utilisée en première ligne devant une pauvreté voire une absence de l’examen clinique. Ces dérives pouvaient s’étendre aux prescriptions médicamenteuses, voire aux actes chirurgicaux à la mode souvent permis par l’accès direct au chirurgien sans intermédiaire médical ou paramédical. L’étude des responsabilités retrouve la modification des conditions d’exercice avec la présence de plus en plus fréquente de l’écran d’ordinateur s’interposant entre praticien et patient qui ne favorise ni l’interrogatoire ni l’examen clinique. Mais aussi l’activité médicale est sensibilisée de plus en plus par le principe de précaution et le risque de judiciarisation, facteurs déclenchant les prescriptions larges « pour se couvrir », témoin en réalité d’une attitude défensive délétère, illusoire et inefficace, comme l’ont montré nos auditions assurancielles ou juridiques. Bien sûr enfin l’environnement sociétal par la voix envahissante des médias souvent irresponsables vis-à-vis du patient mais favorisantes pour le consumérisme médical et l’exigence de rapidité exigée par le malade aussi bien pour le diagnostic ou la thérapeutique.

Les pistes d’améliorations devront 1 : d’abord se tourner vers l’enseignement de la médecine avec en particulier une réforme sérieuse et complète du 2e cycle de la formation initiale du médecin. La segmentation extrême crée par la succession des « certificats de spécialités » n’aboutit qu’à une succession d’assimilationrégurgitation qui gêne non seulement la prise en compte globale du malade mais aussi la mémorisation de la sémiologie de base et son intégration dans l’ensemble du malade ne favorisant pas du tout les choix stratégiques des examens complémentaires biologiques ou d’imagerie, pas plus que les orientations thérapeutiques. L’enseignement clinique doit se faire sur une durée plus longue que les 3 mois actuels avec des enseignements transversaux y compris la pharmaco thérapeutique quasiment inexistante. Surtout une évaluation à intervalles réguliers devrait permettre ou non de se présenter au fameux Examen Classant National qui actuellement est le seul but des étudiants en Médecine qu’ils préparent en « bachotant », qui est rempli de lacunes (pas de points négatifs, pas de question sur la stratégie diagnostique, pas plus que de questions sur avantages/inconvénients de telle ou telle thérapeutique, etc.) D’où une refonte complète de cet examen classant s’impose. La formation médicale continue, avancée considérable, doit être revue pour la rendre encore plus efficace en la sortant si possible de plus en plus indépendante ou contrôlée vis-à-vis des marketings commerciaux. 2 : Le développement des recommandations de bonne pratique clinique, souvent coordonnée par l’HAS, est une bonne chose et sont consultés mais souvent avec des textes trop longs de sorte qu’ils sont peu appliqués. Ils ne devraient pas dépasser 2 pages et donner surtout des indications de cadrage de la pathologie rapportée. 3 : L‘organisation des soins doit tourner de plus en plus vers le parcours de soins et le regroupement des compétences aussi bien publiques que privées, avec le développement des réseaux régionaux, basés sur l’auto adhésion, la reconnaissance par le praticien lui-même de ses limites de compétence médicale et de plateaux techniques. Ceci réalise vraiment la stratégie pertinente pour chaque pathologie et chaque patient. Les Réunions de Concertation Pluridisciplinaires (RCP) obligatoires pour les pathologies du Cancer en sont aussi un bon exemple si elles gardent un caractère impartial et humain en y incluant fortement le médecin traitant. L’imagerie médicale mériterait une telle réorganisation où le choix de l’imagerie pertinente reviendrait à l’imageur lui-même. De même à l’exemple de plusieurs pays d’Europe, les centres chargés des pathologies lourdes devraient être en nombre limité répartis sur tout le territoire national en accord inter-régional avec les diverses ARS. Les exemples des Instituts de cancérologie dans certains pays ou des « traumas centers » dans d’autres mériteraient d’être examinés. Le mode de financement « dit à l’activité » (T2A) facteur de glissements néfastes et dans les indications et dans les actes, doit être revu pour valoriser la pertinence et la qualité. Par ailleurs la rémunération des activités médicales devraient valoriser l’acte intellectuel par rapport à l’acte technique ce qui est l’inverse de l’état actuel, avec les 3 leviers dont pourrait disposer la CNAM : Nomenclature, Entente préalable, Contrôles avec pour ces derniers l’utilisation d’interlocuteurs adaptés, plus âgés, plus expérimentés, plus spécialisés. La pertinence des stratégies médicales est une caractéristique essentielle du bon exercice de la médecine. Sous la responsabilité totale des médecins, état d’esprit, synonyme de qualité et de sécurité, s’enseigne par compagnonnage, évolue constamment, n’entrave pas les innovations, tout en réalisant une efficience économique en améliorant la qualité des soins respectant les droits fondamentaux du patient.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

SUMMARY

A working group of seven members was set up by the French National Academy of Medicine, under the direction of René Mornex, to try to obtain a medicine without excess, promoting better treatment for humanity at a lower cost. The advice of 26 persons (from inside or outside the Academy) was solicited, including people from administration, official agencies of the government, in order to nourish, criticize, or reinforce our own thoughts, coming also from height previous reports on the same topic published by our Academy.

The first part of our work was to make an inventory of the “ every day “ medical practice. Despite good, reliable and useful recommendations or consensus conferences proposed by the French Higher Health Authority, it appears that they are not read and frequently not applied, because they are too long. Subsequently many fluctuating attitudes were observed resulting in too many biological or imaging prescriptions, linked with a frequent absence or poorness of clinical examination, with in some cases extension of these drifting attitude for drugs prescription and even surgical procedures.

Secondly we tried to study the reasons behind such questionable practices: we found that the computer invasion into the medical work was frequently a reason to change the relationship between patient and physician. Medical practice is more and more sensitive to the “ Precaution principle “ to protect themselves against law suits. Avalanche of not controlled medical information through the multiple Medias is another reason for this change of the medical behavior given the permanent enquiries of the patient for speed as for the diagnosis as for the treatment.

The Tracks for improvement:

a. A priority must be given to the ways and modalities of teaching by completely reforming the second cycle of medical studies. Today, this teaching consist in 2 to 3 months ‘training period’ to get successive “ specialty certificate “ where the medical student has not sufficient time to address really the material and ‘regurgitate’ without real absorption each specific teaching content without a real synthesis around the patient in his “ whole “. It is necessary to increase the time allowed to create transversal teaching based first on clinical examination and ensure an effective evaluation at regular intervals to monitor if real knowledge is sufficient to enter the next stage in order to qualify for presentation at the ECN (Classifying National Exam). It is designed to close this second cycle opening the right to become “ resident “ for 4 years in the hospital where studies and real practical work prepare for medical general & sometimes already specialized practice. This exam is not yet well conceived and requires multiple adjustment in order to prepare the future doctor to a pertinent medicine practice.

b. Necessity to shorten the recommendations for good practice from National Health Agencies in order to be more easily read and applied by the medical world.

c. Health Care organization at the level of each region must be done according the best pathway network adapted for the pathology of the patient going from the proximity care in a public or private mode to the highly specialized university hospital, thanks to the fantastic improvements of the technology for communication as well as personal acceptance from all the practitioners of their own medical and technical limits. This leads to a truly pertinent strategy for each pathology and each patient as it is the case in some areas in our country. Medical Imaging would be also a nice example of such reorganization where the choice of the pertinent image would be done by the imaging doctor according to the clinical symptoms described by the practitioner in charge of the patient. According to many European countries the centers for treatment of Heavy pathologies requiring high level specialized human intervention and costly techniques should be in a relatively small number at the level of one country, the number decided in common agreement between administration, physicians, universities and health agencies. The cancer institutes in some countries or the trauma centers in others are good example to be checked. On the other hand the ways to finance medical acts must also be revised in order to favor the intellectual act rather than the technical one. This will require administrative revisions, use of preliminary agreement, and control mechanisms, where older experienced — sometimes retired — experts could be useful.

Finally the relevance of medical strategies is an essential feature of a good medical practice, completely under the responsibility of the Doctor. It is a “ state of mind “ encompassing quality, security, constantly evolving, taught mainly by personal direct and close “ on the job “ teaching. Moreover this drive toward efficiency from an economical point of view would improve health care while taking into account the complete human rights of the patient.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

Mots-Clés : Modèles De Pratique Médicale, Pratique En Santé Publique, Guide De Bonnes Pratiques

Key-Words : Physician’s Practice Patterns, Public Health Practice, Practice Guideline



 Les membres du groupe de travail déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt en relation avec le contenu de ce rapport.
Des annexes peuvent figurer dans le Bulletin en ligne sur le site www.academie-medecine.fr.
Un rapport exprime une prise de position officielle de l’Académie. L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 9 avril 2013, a adopté le texte de ce rapport avec 64 voix pour, 10 voix contre et 15 abstentions.


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