Peu d’études ont évalué l’influence de l’introduction de la PrEP sur la perception du risque ainsi que les pratiques préventives adoptées par les PrEPeurs. Cette étude visait principalement à évaluer la qualité de vie sexuelle des personnes ayant recours au centre de réduction des risques infectieux liés à la sexualité (CeRRISe).

Dans une approche qualitative, une série de focus groups (n=6) a été menée entre mars et avril 2019 par une chercheuse en sciences humaines et sociales. Une analyse thématique manuelle du contenu a été menée afin d’extraire les thèmes principaux et leur articulation.

Trente-huit personnes suivies dans le dispositif CeRRISe ont participé (37 hommes et 1 femme). L’âge moyen était de 44,7 ans, 35 patients s’identifiaient comme homosexuels, 3 comme bisexuels. Suite à l’introduction de la PrEP, la majorité des PrEPeurs avait réduit ou abandonné le recours au préservatif (85 %) et adoptait cet outil en fonction de la demande du partenaire. En conséquence, et à cause de l’invisibilité de la PrEP au moment de la relation sexuelle, cette pratique de non-recours était associée – par certains partenaires – à celles des personnes qui cherchent à avoir des relations non protégées (« bareback »). Souvent cette association se traduisait dans une forte stigmatisation vis-à-vis des PrEPeurs. Toutefois, les PrEPeurs percevaient les « barebackeurs » comme des personnes qui ne se protègent pas, non intéressées par la prévention, et même susceptibles de contaminer délibérément d’autres personnes. Si du point de vue des pratiques, le non-recours au préservatif était commun aux « barebackeurs » et aux PrEPeurs, ces derniers se différenciaient et justifiaient leur non-utilisation et posaient des distinctions quant aux valeurs et caractéristiques identitaires ; ils s’auto-représentaient comme des personnes responsables, transparentes et informées.

Cette étude montre une association entre utilisation de la PrEP et les représentations ou les comportements sexuels. Les PrEPeurs mettent en avant des valeurs qui les distinguent et fondent leur identité. D’autres recherches doivent être effectuées sur des utilisateurs de la PrEP femmes, migrants ou plus jeunes, populations qui sont peu représentées et étudiées, afin d’explorer leurs pratiques de prévention, leurs représentations et leur construction identitaire.