En Europe, 80 à 90 % de tous les antibiotiques utilisés chez l’homme sont prescrits en soins primaires par les médecins généralistes. L’utilisation sous-optimale des antibiotiques est un moteur de la résistance aux antimicrobiens (AMR), par conséquent des systèmes d’aide à la décision clinique (CDSS) pour la prescription d’antibiotiques ont été conçus afin de promouvoir le bon usage antibiotique. Cependant, de nombreux CDSS n’ont jamais réussi à démontrer un impact clinique en raison d’une faible adoption. Le but de cette étude est d’identifier les déterminants de l’adoption à long terme d’un CDSS pour la prescription d’antibiotiques en utilisant l’exemple d’Antibioclic en soins primaires.

Nous avons interrogé des médecins généralistes français sur leur utilisation d’Antibioclic, un CDSS pour la prescription d’antibiotiques en soins primaires. Antibioclic est un CDSS disponible gratuitement, financé par des fonds publics et par la SPILF et ciblant 37 maladies infectieuses. Il est utilisé quotidiennement par plus de 5000 médecins généralistes. Les participants ont été recrutés via la liste de diffusion d’Antibioclic ou à un DU de prescription d’antibiotiques en soins primaires. Les entretiens ont été enregistrés, transcrits et codés à l’aide de NVivo 12 et ont été menés jusqu’à saturation des données. Les données ont été analysées par analyse thématique inductive.

Nous avons réalisé 22 entretiens avec des médecins généralistes, 15 femmes et 7 hommes, âge médian 40 [IQR : 33–44] ans, durée médiane de pratique 7 ans [IQR : 3–12]. Tous les participants ont une utilisation fréquente (plusieurs fois par semaine) et durable (pendant plus d’un an) d’Antibioclic dans leur pratique. Antibioclic était le CDSS le plus utilisé toutes disciplines médicales confondues pour tous les médecins généralistes interrogés. Nous avons identifié 7 thèmes clés qui expliquent l’adoption durable du CDSS : ergonomie, confiance, routinisation, commodité, amélioration des pratiques, apprentissage contextualisé et absence de conséquences négatives. Les médecins généralistes ont souligné l’importance de la co-conception entre des ingénieurs et des prescripteurs de soins primaires pour le développement d’un CDSS. Ils ont également discuté de l’écart qui existe parfois entre les recommandations et la pratique clinique quotidienne, du rôle que joue un CDSS dans la formation médicale continue et de l’évolution de la relation médecin–patient historique.

Cette étude fournit des informations précieuses sur les déterminants de l’adoption à long terme d’un CDSS pour la prescription d’antibiotiques en soins primaires. Les thèmes que nous avons identifiés sont probablement généralisables et peuvent concerner un large éventail d’outils électroniques en santé.