Maladie de Takayasu : facteurs pronostiques, nouvelles stratégies thérapeutiques - 10/11/20

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Résumé |
La maladie de Takayasu (TAKA) est une vascularite inflammatoire chronique d’étiologie inconnue, touchant préférentiellement l’aorte et ses principales branches. L’inflammation vasculaire peut conduire à des sténoses, des occlusions, voire des anévrysmes artériels entraînant ou non des symptômes cliniques. Ses manifestations cliniques sont très variées et dépendent du type de vaisseaux touchés et du type de lésions (sténose ou occlusion), notamment au niveau de la crosse aortique, de l’aorte thoracique descendante, de l’aorte abdominale, des artères rénales, des artères coronaires, voire des artères pulmonaires et des lésions ischémiques secondaires. Du fait de la grande variabilité des lésions artérielles et de leur évolutivité, la recherche de facteurs prédictifs d’évolution défavorable revêt un caractère particulièrement important. Peu d’études ont analysé les facteurs pronostiques défavorables et ont été relevés sur des études de petite taille ou avec un recul peu important : hypertension artérielle, rétinopathie ischémique, insuffisance aortique, anévrysme artériel, évolution progressive de la maladie, type V de la maladie.
Patients et méthodes |
Pour essayer de mieux cerner le pronostic à long terme et les facteurs pronostiques défavorables, nous avons mené une étude collaborative nationale française qui a permis d’inclure 318 patients ayant une maladie de Takayasu, d’âge médian au diagnostic 36 ans, 87 % de femmes avec un suivi médian de 6,1 ans, d’origine caucasienne (37 % des cas), d’Afrique du Nord (31 %), d’Afrique Subsaharienne (24 %). Les principaux types de lésions artérielles étaient des sténoses (77 %), des épaississements (62 %), des anévrysmes (24 %) ou des occlusions artérielles (19 %).
Résultats |
Au total, 178/318 (56 %) patients ont eu au moins un évènement « qualifiant » (complications vasculaires et/ou rechute et/ou décès). La survie globale sans évènement était, à 1 an, 5 ans et 10 ans, de 75,6 %, 48,2 % et 36,4 % respectivement. La survie sans rechute était, à 1 an, 5 ans et 10 ans, de 81,1 %, 58,6 % et 47,7 %. La survie sans complication vasculaire était, à 1 an, 5 ans et 10 ans, de 90 %, 69,9 % et 53,7 %. En analyse multivariée, les facteurs significativement associés à une rechute étaient la présence d’une carotidodynie (HR : 2,36) et une élévation de la CRP (HR : 2,09). Les facteurs associés à une complication ischémique étaient l’évolution progressive de la maladie (HR : 2,03), une atteinte de l’aorte thoracique (HR : 2,74) et la présence d’une rétinopathie (HR : 3,4). Ces données ont permis de définir un score clinique pronostique permettant de mieux identifier les patients à haut-risque de complications (décès et/ou de complications vasculaires) si au moins deux des facteurs suivants étaient présents : maladie d’évolution progressive, atteinte de l’aorte thoracique et rétinopathie. Pour la mortalité, les risques à 10 ans dans cette étude étaient de 5 % (versus 7 à 24 % dans la littérature). Un sur-risque de mortalité a été retrouvé chez les patients blancs, fumeurs et de sexe féminin.
Quelle stratégie thérapeutique médicale |
Les données expérimentales et une meilleure compréhension des mécanismes physiopathogéniques sous-jacents ont révélé un rôle important de l’activation des cellules dendritiques, amenant à une activation des cellules T et notamment une polarisation des lymphocytes Th1 et Th17. La voie Th1 médiée par l’IL12, l’IL18 et l’Interféron Gamma, permet un recrutement des monocytes amenant à la production de cytokines pro-inflammatoires telles que TNF-Alpha, IL6, IL1-bêta et aboutissant aux symptômes systémiques de la vascularite. La voie Th17 médiée par l’IL6, l’IL23, l’IL1-bêta a également un rôle important, notamment pour le remodelage vasculaire, l’hyperplasie intimale et les sténoses ou occlusions vasculaires amenant aux symptômes ischémiques. L’utilisation d’une corticothérapie apparaît encore indispensable (0,5 à 1mg/kg/jour). L’association à un immunosuppresseur est fortement conseillée, même si les données reposent essentiellement sur des études de petit effectif, avec des limites méthodologiques importantes et des suivis peu prolongés. Les méta-analyses suggèrent que l’ajout d’un immunosuppresseur conventionnel (methotrexate, azathioprine, cyclophosphamide, mycophenolate) à une corticothérapie permet d’augmenter d’environ 40 % les chances de mise en rémission, et de diminuer d’environ 45 % le risque de rechute. Les données plus récentes collaboratives françaises suggèrent que certaines biothérapies (anti-TNF, anti-IL6) amènent un bénéfice encore supérieur puisque, comparées aux immunosuppresseurs conventionnels, le risque de rechute à 6 ans était respectivement de 10 % versus 65 %. Dans une méta-analyse récente, les biothérapies étaient associées à une augmentation d’environ 36 % des chances de mise en rémission et une diminution d’environ 70 % du risque de rechute. Enfin, la seule étude contrôlée randomisée japonaise comparant le tocilizumab (anti-IL6) à un placebo chez 36 patients a montré, après un suivi de 3 ans, une diminution du risque de rechute (50 % versus 20 % ; HR : 0,41). En conclusion, la maladie de Takayasu est caractérisée par une morbidité importante. Un score pronostique permet de prédire le risque de complications (rétinopathie, forme progressive de la maladie, atteinte de l’aorte thoracique). Sur le plan thérapeutique, à côté de la corticothérapie et des immunosuppresseurs conventionnels, plusieurs études récentes ont montré l’intérêt des biothérapies, notamment anti-TNF et anti-IL6. D’autres études en cours devraient permettre d’améliorer encore le pronostic de cette vascularite systémique qui reste encore redoutable.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Mots clés : Maladie de Takayasu, Biothérapie
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Vol 45 - N° S2
P. S94-S95 - novembre 2020 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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