Suspicion de valvulopathie sous venlafaxine - 20/11/20
Résumé |
Contexte |
Les valvulopathies toxiques sont dues à une stimulation des récepteurs sérotoninergiques 5HT2B. Ainsi, des médicaments agonistes de ces récepteurs tels que les dérivés de l’ergot de seigle dopaminergiques, les anorexigènes ou encore certains stupéfiants (amphétaminiques, cocaïniques) sont connus pour induire des valvulopathies toxiques. En revanche, pour les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) et les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNA), le risque valvulotoxique n’a pas été encore clairement établi.
Description du cas |
Une patiente de 41 ans est hospitalisée au CHU Amiens-Picardie pour un bilan d’altération de l’état général. Une tri-valvulopathie associée à une diminution significative de la fraction d’éjection ventriculaire gauche est diagnostiquée. Après avoir éliminé les principales pathologies génératrices de valvulopathie, un diagnostic de valvulopathie toxique est évoqué.
Méthodes |
Des prélèvements sanguin et urinaire sont réalisés à l’admission afin de rechercher par LC-MS/MS, la présence de xénobiotiques connus pour être pourvoyeurs de valvulopathie. Une mèche de cheveux de 15cm est analysée par LC-HRMS dans le but de révéler une potentielle exposition chronique. Enfin, une consultation de la base nationale de pharmacovigilance est effectuée afin de recenser le nombre de déclarations de valvulopathies survenues sous ISRS et IRSNA et autres antidépresseurs agonistes 5-HT (mirtazapine, miansérine, tianeptine et vortioxetine).
Résultats |
Le criblage toxicologique montre la présence de venlafaxine, d’alprazolam, de zopiclone, de furosémide, de tramadol, d’ofloxacine et de THC-COOH dans le sang et les urines. L’analyse segmentaire des cheveux confirme une exposition chronique pour la venlafaxine, l’alprazolam, le zopiclone, le THC dans tous les segments de cheveux. Aucun dérivé amphétaminique ni aucun nouveau produit de synthèse (NPS) n’est détecté. La base nationale de pharmacovigilance dénombre 19 cas de valvulopathies incriminant des ISRS, IRSNA dont 5 atteintes valvulaires fœtales.
Discussion-conclusion |
Les analyses toxicologiques ne révèlent pas de prise récente ou ancienne de xénobiotiques dont l’implication dans le développement de valvulopathie toxique est univoque. Dans le cas présent, parmi les molécules identifiées, seule l’exposition chronique à la venlafaxine, antidépresseur de la classe des ISRNA, pourrait être impliquée sans que son imputabilité puisse réellement être établie. Son mécanisme d’action pharmacologique, qui repose sur l’inhibition du transporteur synaptique de la sérotonine, SERT, induit une stimulation indirecte des récepteurs 5HT2B. Des études expérimentales plaident également en faveur de son implication [1 , 2 ]. En revanche, bien que la base nationale de pharmacovigilance recense des cas incriminant les ISRS et les IRSNA dans le développement de valvulopathies toxiques, peu d’études cliniques concluent à une association [3 ]. L’imputabilité de la venlafaxine dans ce cas de valvulopathie toxique n’a donc pas pu être établie avec certitude mais le manque de données scientifiques prouvant son absence d’implication a motivé l’arrêt de la molécule chez cette patiente.
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Vol 32 - N° 4
P. 246 - décembre 2020 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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