Nourrisson victime d’un syndrome de Münchhausen par procuration impliquant l’administration de multiples psychotropes : analyses toxicologiques capillaires, données médicales et aveux de la mère - 20/11/20
Résumé |
Objectifs |
Décrit par Meadow en 1977 sous la désignation de syndrome de Münchhausen par procuration, le trouble factice par procuration (TFpP) est une forme rare de maltraitance. Elle consiste à inventer ou produire des symptômes, le plus souvent chez un enfant, dans le but de créer une relation ambivalente de dépendance et d’hostilité avec le corps médical. Un cas de TFpP par administration de substances nuisibles à un nourrisson est présenté dans lequel les résultats toxicologiques capillaires ont pu être confrontés aux données médicales et aux déclarations de l’auteur des faits.
Méthode |
Un nourrisson de 3 mois est adressé aux urgences pédiatriques pour une diminution de la prise alimentaire et des malaises récidivants. Ces derniers, dont la mère est le seul témoin, sont décrits comme des tremblements, suivis d’une hypertonie des membres inférieurs, d’une révulsion oculaire et d’une perte de contact. L’enfant est hospitalisé, pour la seconde fois pour ce même motif. Devant un bilan étiologique négatif et au décours d’un nouveau malaise, un bilan toxicologique sanguin est réalisé. La mise en évidence de codéine (0,46μg/mL, recherche de morphine non rapportée) et d’oxazépam (2,74μg/mL) conduit à un signalement judiciaire. Deux prélèvements de cheveux sont réalisés : J+1 suivant l’intoxication et 3 mois après la mesure d’éviction parentale (M+3). Sur cette matrice capillaire, un criblage LC/MSMS ciblé de 44 molécules psychotropes (n’incluant pas la codéine) est requis parallèlement à des expertises médicales et toxicologiques. Les cheveux J+1 bruns et longs de 4cm, non orientés, ont été analysés sans segmentation. Les cheveux M+3, bruns et longs de 8cm ont été découpés en 5 segments de 1,2cm (S1-racine à S5, 16 à 27mg) et un segment distal de 2,4cm (S6, 11mg).
Résultats |
L’analyse des cheveux J+1 a mis en évidence de l’oxazépam (658pg/mg), de l’hydroxyzine (139pg/mg), de la cétirizine (20pg/mg), du nordazépam (8,9pg/mg), du midazolam (5,5pg/mg) ainsi que des traces (<3pg/mg) de 5 psychotropes (alimémazine, lévomépromazine, alprazolam, amitriptyline, diazépam). L’analyse des cheveux M+3 a objectivé de l’hydroxyzine [S2=5,1–S5=114pg/mg], de la cétirizine [S1<1–S5=2,3pg/mg], de l’oxazépam [S1<1–S6=4,3pg/mg], du nordazépam [S1<1–S6=2,3pg/mg], du midazolam [S1<1–S5=3,2pg/mg], de la cyamémazine [S1<1–S6=0,4pg/mg], de l’amitriptyline [S1/S2/S3 non détectée–S6=0,7pg/mg] et de l’alprazolam (S5<1pg/mg). Les expertises soulignent les nombreuses consultations ‘blanches’ de l’enfant. Après avoir exclu une exposition in utero, un usage thérapeutique contrôlé, une responsabilité médicale et une cause accidentelle, un TFpP est suspecté. Lors de l’enquête, la mère de l’enfant admet l’administration répétée d’oxazépam, d’hydroxyzine et de codéine à la maison et au cours des deux hospitalisations. Elle confirme, sans pouvoir être précise, l’administration d’autres médicaments à visée psychotropes prélevés aléatoirement dans l’armoire à pharmacie.
Conclusion |
Ce cas souligne l’intérêt des analyses toxicologiques systématiques, même chez le très jeune enfant, devant un tableau clinique inexpliqué. Les analyses toxicologiques capillaires ont montré toute leur utilité pour documenter une exposition à de multiples molécules psychotropes malgré la prudence qui s’impose en ce qui concerne la détermination de leur origine, leur fréquence et leur datation.
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Vol 32 - N° 4S
P. S30 - décembre 2020 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.