Les atteintes faciales de la sclérodermie systémique (ScS) peuvent être responsables d’une gêne fonctionnelle importante, mais également esthétique qui n’est que peu ou pas prise en compte dans les échelles de qualité de vie (QV) comme le sHAQ (Scleroderma Health Assessment Questionnaire). Le questionnaire spécifique « Burden of Face Affected » (BoFA) a été élaboré pour apprécier de façon rapide et reproductible le handicap lié aux manifestations cutanées faciales de la ScS. Les objectifs de cette étude étaient d’évaluer les corrélations entre les signes cliniques objectifs et l’altération de la QV liée à l’atteinte du visage, d’une part, et entre les questionnaires sHAQ et BoFA, d’autre part.

Il s’agit d’une étude prospective monocentrique incluant des patients adultes vus entre février et juillet 2019 pour une ScS avec des manifestations dermatologiques faciales de la maladie.

Cent-sept patients ont été inclus, majoritairement des femmes (n=80), de 59 ans en moyenne. Quatre-vingt quatre patients (78,5 %) avaient des rides péribuccales, 78 (72,9 %) des télangiectasies, 76 (71 %) un amincissement des lèvres, 61 (57 %) une sclérose cutanée, 36 (33,7 %) des troubles pigmentaires et 26 (24,3 %) une disparition des plis frontaux. Le score de Rodnan modifié moyen du visage était de 0,8/3. Le score BoFA moyen était à 20 (±19,6) (0 : aucun impact ; 100 : impact majeur), significativement plus élevé chez les femmes (p=0,024). En analyse multivariée, l’augmentation du score BoFA était significativement associée au sexe féminin (p=0,003), à la présence de télangiectasies (p=0,028) et d’une sclérose cutanée (p=0,001). Les femmes avaient une altération de l’estime de soi et une gêne liée au regard des autres plus importantes que les hommes (p<0,001). Il existait une différence significative entre les scores moyens BoFA et sHAQ (p<0,001), montrant l’absence de corrélation entre ceux-ci.

L’atteinte faciale de la ScS, présente dans plus de 90 % des cas, est responsable d’un handicap esthétique important comme l’ont déjà montré quelques études. Cependant les échelles de QV n’étaient pas spécifiques des modifications du visage. Le questionnaire BoFA a permis de montrer que ce sont les femmes ayant des télangiectasies et/ou une sclérose faciale qui sont les plus gênées. L’absence de corrélation entre les scores sHAQ et BoFA suggère que le sHAQ n’est pas un bon outil pour évaluer spécifiquement la QV liée au visage. En conclusion, l’évaluation de la QV liée à l’atteinte du visage de la ScS par un questionnaire spécifique permet de proposer aux patients une prise en charge thérapeutique personnalisée et d’en apprécier l’efficacité.