Traiter un cancer pulmonaire avec une dermatomyosite « paranéoplasique » associée par un inhibiteur des points de contrôle immunitaire : une fausse bonne idée ? - 30/11/20
Résumé |
Introduction |
La dermatomyosite (DM) est une maladie auto-immune rare caractérisée par une faiblesse musculaire et une éruption cutanée. Son association avec le cancer est bien connue mais le terme « paranéoplasique » reste débattu. Nous rapportons ici le premier cas d’une patiente atteinte d’une DM ayant reçu du pembrolizumab, un inhibiteur des points de contrôle immunitaire (IPCI) dirigé contre le récepteur « Programmed cell Death protein 1 » (PD-1).
Observation |
Une patiente de 71 ans est vue en consultation avec une clinique de DM, des créatines kinases (CK) augmentées (1800 UI/L, n<190) et des anticorps antinucléaires anti-Mi-2. La mise au point complémentaire découvre un adénocarcinome pulmonaire (cT4N1M1a), avec expression significative du ligand de PD-1. Une immunothérapie par IPCI (pembrolizumab) est entamée.
Trois semaines plus tard, la patiente présente une poussée de dermatomyosite avec perte de force sévère des 4 membres et nette majoration des CK (9359 UI/L). L’administration de hautes doses de corticoïdes (méthylprednisolone 125, puis 1000mg) et une perfusion d’infliximab (4mg/kg) ont été inefficaces, tant sur les symptômes que sur le taux de CK, avec apparition de troubles de déglutition. Des immunoglobulines intraveineuses (IgIV) ont alors été administrées pendant 4jours (0,5g/kg/j), suivies de méthotrexate sous-cutané (20mg/semaine).
L’évolution clinique et biologique a alors été progressivement positive, avec un suivi clinique à un an rassurant : amélioration significative de la force musculaire, récupération complète des troubles de déglutition et normalisation des CK.
Discussion |
Les patients avec maladie auto-immune préexistante qui reçoivent une immunothérapie par IPCI présentent un taux plus élevé d’effets secondaires immuno-induits que la population générale, avec significativement plus de poussées de la maladie. En général, ces poussées sont peu graves et une maladie immunitaire préexistante n’est pas une contre-indication absolue à l’utilisation d’un IPCI. Toutefois, notre patiente a présenté un effet secondaire immuno-induit grave résistant à une corticothérapie intraveineuse. Une analyse de la littérature a identifié 3 autres patients avec une DM préexistante traités par d’autres IPCI, avec une poussée chez 2 d’entre eux.
Ce cas illustre l’effet bénéfique des IgIV pour le traitement des poussées de dermatomyosite induites par un IPCI. En effet, notre patiente n’a pas répondu à l’infliximab alors que les anti-TNF alpha sont habituellement considérés comme la deuxième ligne de traitement pour la plupart des effets secondaires immuno-induits. Pour les myosites, les IgIV devraient donc être préférées [1 ].
Les maladies auto-immunes « paranéoplasiques » ou « associées au cancer » ont une évolution particulière sous IPCI. Une étude récente a montré une aggravation de la maladie auto-immune dans la moitié des cas, même lorsque l’évolution du cancer sous-jacent est positive [2 ]. Cela doit donc nous inciter à être prudent lorsque nous introduisons un IPCI chez des patients atteints d’une maladie auto-immune préexistante.
Conclusion |
Vu l’utilisation grandissante des IPCI, leur administration chez des patients avec une maladie auto-immune préexistante va être de plus en plus fréquente. Ce cas clinique rappelle que, bien que les IPCI ne soient pas contre-indiqués formellement dans cette situation, leur utilisation peut mener à une poussée parfois grave de la maladie sous-jacente. Le cas d’une myosite préexistante doit mener à une attention particulière vu la gravité potentielle des poussées.
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Vol 87 - N° S1
P. A235-A236 - décembre 2020 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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