Un train peut en cacher un autre - 26/02/21

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Résumé |
Cas clinique |
Une femme d’origine maghrébine (1m60, 52kg), en France depuis 1999, vivant en foyer et sans antécédents particuliers, ingère à but suicidaire vers 11h30 (H0), paracétamol (Doliprane®), 15g (288mg/kg), fer ferreux (Tardyféron®) 3,2g (62mg/kg), dompéridone (Motilium®) 300mg (5,8mg/kg) et flurbiprofène (Antadys®) 2 g (38mg/kg). À 17h30 (H6), en raison de l’apparition de vomissements, elle est transportée aux urgences. L’examen clinique est dans les limites de la normale, la paracétamolémie à 147mg/L, les ASAT/ALAT à 69/130 UI/L, le taux de prothrombine (TP) à 63 %, la créatininémie à 60μmmol/L, les bicarbonates à 20mmol/L, l’hémoglobine à 16,2g/dl, les globules blancs à 18,2 G/L et les plaquettes à 492 G/L. À H12, les ASAT/ALAT sont à 225/219 UI/L et le TP à 46 % (facteurV à 59 %). Le traitement par N-acétylcystéine est débuté et la patiente est transférée en réanimation. À H15, les vomissements deviennent progressivement sanglants et apparaît une acidose lactique (pH à 7,35, lactate à 5,7mmol/L). Les ASAT/ALAT sont à 2720/2630 UI/L et le TP à 17 % (facteurV à 17 %). Oméprazole et vitamine K sont administrés. À H24, la patiente est tachycarde à 140/min, marbrée, confuse, présente une hématémèse, une acidose lactique profonde (pH à 7,04, lactate à 17,8mmol/L), des ASAT/ALAT à 8000/8000 UI/L, un TP<10 % (facteurV à 6 %), une hémoglobine à 12,8g/dL, des globules blancs à 41,3 G/L et plaquettes à 466 G/L. La patiente bénéficie d’un remplissage vasculaire, de transfusions globulaires et de plasmas frais congelés. Une fibroscopie digestive haute retrouve une gastrite fundique hémorragique sans ulcère. Devant la suspicion d’hépatite fulminante, la patiente est transférée en unité de soins intensifs d’hépatologie et mise sur liste de greffe en super-urgence. Une toxicité additionnelle du fer est suspectée. Le fer sérique est à 84μmol/L (∼3N) à H7, la capacité totale de la transférine de 47μmol/L (50-80) et le coefficient de saturation de 100 % (15-40). L’indication de déféroxamine (Desféral®) est discutée devant un fer sérique à 90μmol/L à H7 avec une intoxication symptomatique (hémorragie digestive et atteinte hépatique précoce). Néanmoins, en raison de l’insuffisance rénale aiguë oligurique sans possibilité de dialyse intermittente en urgence et des risques liés à la chélation dans ces circonstances, il est décidé de ne pas administrer de chélateur. À H50, une transplantation hépatique auxiliaire est effectuée et une dialyse à H72. Les transaminases se normalisent à J12 post-transplantation. Les suites opératoires se compliquent d’un hémothorax nécessitant une thoracotomie de décaillotage. La patiente quitte le service de réanimation pour la rééducation à J90. L’histologie hépatique confirme une nécrose hépatocytaire centrolobulaire et périportale extensive, suggérant une toxicité synergique du paracétamol et du fer.
Discussion |
Plusieurs cas similaires dans la littérature suggèrent une synergie des mécanismes d’hépatotoxicité entre le paracétamol et le fer. La toxicité du paracétamol implique la formation de métabolites toxiques avec un rôle prépondérant du cytochrome P450 2E1, des macrophages et du Tumor necrosis factor (TNF)-alpha, aboutissant à une nécrose centrolobulaire, zone plus pauvre en glutathion. La toxicité du fer met en jeu la formation de radicaux libres (hydroxyl), une peroxydation des lipides et une toxicité mitochondriale avec des lésions nécrotiques rapides en moins de 48h, prédominantes en zone périportale en raison de la concentration maximale de cette zone en fer et oxygène.
Conclusion |
La co-ingestion de surdoses de paracétamol et de fer, même relativement modérées, peut exposer au risque d’installation rapide d’une insuffisance hépatique fatale, suggérant des mécanismes complémentaires d’hépatotoxicité entre ces deux toxiques, comme en témoigne notre cas.
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Vol 33 - N° 1
P. 12-13 - mars 2021 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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