Augmentation de l’usage récréatif de la prégabaline chez les adolescents en contexte de précarité - 20/09/21
Résumé |
Objectifs |
Documenter et décrire l’usage récréatif de la prégabaline chez les adolescents, en utilisant les données de la Base nationale des cas d’intoxication (BNCI) des centres antipoison (CAP) français.
Méthode |
Analyse rétrospective des cas d’intoxication volontaire aiguë par la prégabaline, seule ou en association, chez les adolescents (âges [10–17]), collectés par les CAP entre 2004 et 2020. Le Poison Severity Score (PSS) a été utilisé pour évaluer la gravité.
Résultats |
Sur la période de l’étude, 382 cas d’intoxication volontaire aiguë par la prégabaline chez des adolescents ont été rapportés aux CAP français. Parmi eux, 94 (25 %) étaient liés à une toxicomanie ou à un usage récréatif. Le premier de ces cas a été rapporté en 2014, et le nombre de cas par an est resté<5 jusqu’en 2017. L’augmentation du nombre de cas annuels est ensuite spectaculaire avec 17 cas pour l’année 2018, 23 en 2019 et 46 en 2020. Cet usage récréatif concerne principalement des adolescents de sexe masculin (sex-ratio=5,3), avec un âge médian de 15 ans, et vivant dans des conditions précaires (adolescents migrants, sans-abris ou en foyers, n=73/94 ; 78 %). La prégabaline aurait été ingérée seule dans un tiers des cas (n=32/94 ; 34 %). Dans les autres cas (n=62/94 ; 66 %), le nombre médian de substances co-ingérées était de 2 [2–8], majoritairement des benzodiazépines (n=31/62 ; 50 % dont 29 cas impliquant le clonazépam), mais aussi des substances psychoactives : cannabis (36 %), cocaïne (29 %), éthanol (23 %) ou MDMA (18 %). Sur le plan clinique, la gravité a été évaluée comme nulle dans 10/94 cas (PSS 0=11 %), faible dans 51/94 cas (PSS 1=54 %), moyenne dans 25/94 cas (PSS 2=27 %) et forte dans 8/94 cas (PSS 3=9 %). La symptomatologie dominante était neurologique : somnolence, troubles de l’équilibres et troubles de la conscience plus ou moins marqués. Un aspect notable de la symptomatologie était l’alternance d’une somnolence et d’une agitation, signalée dans 15 cas. Les huit cas de gravité forte correspondaient à des comas (Glasgow<7) ou à des épisodes de convulsions généralisées et répétées. Pour cinq de ces huit cas, la prégabaline aurait été ingérée seule, à des doses inconnues. L’évolution était inconnue dans la majorité des dossiers (55/94, 59 %). Lorsque l’évolution était connue, il s’agissait de guérisons sans séquelle. Les moyens par lesquels les adolescents s’étaient procuré la prégabaline n’étaient pas renseignés.
Conclusion |
La prégabaline est commercialisée en Europe depuis 2004, uniquement chez l’adulte, pour la prise en charge des douleurs neuropathiques, des troubles anxieux généralisés et en tant que traitement d’appoint de certaines formes d’épilepsie. Les prescriptions de prégabaline n’ont cessé d’augmenter et des signaux sur son utilisation récréative sont apparus dans le monde entier [1 , 2 ]. Par ailleurs, la prégabaline est en France en 2020 la plus grande contributrice d’ordonnances falsifiées et les notifications aux centres d’addictovigilance sont en augmentation [3 ]. La prégabaline serait utilisée à visée récréative pour ses effets euphoriques et dissociatifs [4 ]. L’utilisation de la prégabaline peut être associée à une intoxication sévère, notamment lorsqu’elle est co-administrée avec des opioïdes et/ou des benzodiazépines. Cette utilisation récréative de la prégabaline chez des adolescents en contexte de précarité n’a pas été signalée auparavant, elle est alarmante et devrait conduire à des campagnes de prévention, ciblées sur la population à risque décrite dans cette étude.
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Vol 33 - N° 3S
P. S19 - septembre 2021 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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