Suicide par ingestion de sels de nitrites : c’est possible ! - 20/09/21
Résumé |
Objectifs |
Présenter et discuter de cas d’intoxication volontaire par ingestion de nitrite de sodium (NaNO2).
Méthode |
Recherche des cas dans les dossiers des centres antipoison français entre 2015 et 2020. Description et discussion en regard des données de la littérature.
Résultats |
Quatre cas sont retrouvés, tous en 2020, dont un décès. Tous impliquent du nitrite de sodium (NaNO2). Le toxique à l’origine des 3 cas résolutifs sans séquelle après prise en charge médicale, avait été acheté sur internet.
Cas 1 : homme, 31 ans, ingestion de 20g : « cyanose » avec détresse respiratoire, choc cardiogénique et coma (CGS=3). Méthémoglobinémie (MetHb) à 30 % après 100mg de bleu de méthylène (BdM) puis qui décroît à 20 % après une 2e dose identique.
Cas 2 : homme, 17 ans, ingestion d’une gorgée d’un mélange de 20g dans un verre de vin : douleurs abdominales avec vomissements et tachycardie. MetHb à 8,4 % puis normalisation sous oxygénothérapie seule.
Cas 3 : femme, 17 ans, ingestion de 30g : « cyanose », tachycardie, hypotension et coma (CGS=3). MetHb initiale à 88 % rapidement réduite à 22 % par l’injection de 100mg de BdM. Une 2e dose de 50mg est administrée.
Le 4e cas se solde par un décès : femme adulte retrouvée décédée dans une chambre d’hôtel, à côté d’un courrier décrivant l’ingestion suicidaire de 25g de NaNO2 pur. Il s’agissait d’une employée du rayon charcuterie d’un supermarché.
Discussion |
Le nitrite de sodium est un additif autorisé des aliments carnés (E250). Il est utilisé sous forme de sel nitrité à 0,6 % comme conservateur et fixateur de la couleur rosée des charcuteries. Le pouvoir oxydant du NO issu du nitrite oxyde le fer ferreux (Fe2+) de l’hémoglobine en fer ferrique (Fe3+), réalisant une méthémoglobine incapable de lier l’oxygène. La cinétique de la MetHb induite par le NaNO2 semble rapide. Les effets toxiques résultent du risque d’anoxie tissulaire. La clinique associe une « cyanose » gris-ardoisée à une vasodilatation et une hypotension initiale, puis un coma convulsif et un collapsus cardiovasculaire. L’adulte peut survivre à l’ingestion de 6g de NaNO2 mais la plus petite dose létale avoisine 2,6g [1 ]. Le traitement par BdM se discute à partir d’une MetHb de 20 % mal tolérée par oxygénothérapie seule. Une MetHb de plus de 70 % est potentiellement létale. Si le NaNO2 a été à l’origine de cas graves, y compris accidentels (cf. l’intoxication de 7 consommateurs d’un plat préparé avec du NaNO2 à la place du sel de cuisine, MetHb max : 27,3 %) [2 ], l’ingestion à des fins suicidaires semble une pratique émergente.
Conclusion |
Le NaNO2 est une substance dangereuse d’accès peu réglementé et bon marché. La vente en ligne de « kits de suicides » sur des sites de fin de vie décidée (suicide ou euthanasie) mérite l’attention des professionnels de santé et des autorités sanitaires.
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Vol 33 - N° 3S
P. S23 - septembre 2021 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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