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Évaluation de l’exposition à un simulant de l’Ypérite grâce aux conjugués du glutathion et à un adduit de l’ADN - 20/09/21

Doi : 10.1016/j.toxac.2021.06.026 
Marie Gilardoni 1, , Fanny Caffin 2, Fanny Gros-Désormeaux 2, Christophe Piérard 2, Thierry Douki 1
1 SyMMES, université Grenoble Alpes, CEA, CNRS, IRIG, Grenoble, France 
2 Unité Vésicants, institut de recherche biomédicale des armées, Brétigny-sur-Orge, France 

Auteur correspondant.

Résumé

Objectifs

L’ypérite est un toxique de guerre appartenant à la famille des vésicants causant de graves brûlures cutanées, possédant une toxicité oculaire, pulmonaire et systémique. En plus des effets aiguës, cet agent entraîne des conséquences à long terme, physiques, psychiques, possédant un pouvoir carcinogène et mutagène. Aujourd’hui, il n’existe ni antidote ni traitement spécifique ni marqueur d’exposition à l’ypérite qui soit dosé en routine comme preuve d’intoxication ou aidant à la prise en charge des intoxiqués. Afin d’avoir une méthode d’analyse fiable, les biomarqueurs d’expositions persistants et spécifiques doivent être validés.

Méthode

Une première classe de marqueurs potentiels sont les dommages à l’ADN induits par addition de l’ypérite sur les bases. Le 2-chloroéthyl éthyl sulfure (CEES), l’analogue monofonctionnel de l’ypérite, est également souvent utilisé dans ces études car ils possèdent une réactivité chimique très proche. Les molécules électrophiles telles que l’ypérite et le CEES se lient aussi à un tripeptide présent en forte quantité dans les cellules, le glutathion. Ce dernier est métabolisé successivement jusqu’à obtenir un dérivé de l’acide mercapturique (N-acétylcystéine), facilement éliminable par les urines. Pour évaluer la pertinence de ces métabolites comme biomarqueurs, des cellules, des explants de peau humaine et des souris ont été exposés au CEES. Leur analyse est basée sur un couplage entre chromatographie liquide et spectrométrie de masse en mode tandem (UHPLC-MS/MS). La préparation de l’échantillon, basée sur l’extraction sur phase solide (solid phase extraction), se fait en ligne i.e. intégrée au système chromatographique.

Résultats

Grâce à la méthode analytique développée, nous avons pu quantifier l’adduit N7Guanine-CEES à la fois dans l’ADN et dans le milieu de culture de cellules HaCaT (lignée de kératinocyte) exposées au CEES. Les conjugués du glutathion (GSH-CEES) et de la cystéine (Cys-CEES) au CEES sont bien détectés dans le milieu de culture. Des expériences similaires faites sur des explants de peau humaine « fraîche » ont conduit aux mêmes résultats. Ces expériences in vitro montrent que les biomarqueurs choisis sont biologiquement pertinents puisque produits dans les cellules puis excrétés dans le milieu extracellulaire. Des souris ont été exposées par voie cutanée au CEES et sacrifiées jusqu’à 14 jours après le traitement. Cette expérience permet d’évaluer la persistance des métabolites dans un organisme. Dans le plasma, l’adduit N7Guanine-CEES et les conjugués Cys-CEES et N-Acétyl-Cystéine-CEES (NAC-CEES) ont été détectés jusqu’à 14 jours après l’exposition. À ce stade, en moyenne, la quantité de NAC-CEES est encore 12 fois supérieure à la limite de détection.

Conclusion

À travers ces diverses expérimentations biologiques, à la fois in vitro et in vivo, nous avons obtenus des résultats cohérents permettant de conclure sur la pertinence des biomarqueurs étudiés. L’adduit de l’ADN, N7Guanine-CEES, a été détecté pour tous les modèles utilisés. Dans le plasma, il est persistant jusqu’à 14 jours. GSH-CEES est éphémère et proche des limites de détection puisqu’il est rapidement transformé en CYS-CEES dès qu’il est excrété par les cellules. La quantité de Cys-CEES est élevée par rapport aux autres biomarqueurs quel que soit le modèle biologique mais son analyse est complexe de par son caractère polaire et la présence d’interférents. Ce conjugué est transformé en acide mercapturique essentiellement au niveau des reins et du foie. Ainsi, NAC-CEES n’a été quantifié que lors de l’exposition animale. Il est cependant persistant pendant deux semaines avec une limite de détection de l’ordre de 17 fmol ce qui en fait un biomarqueur de choix. L’adaptation de cette méthode analytique à l’ypérite est en cours, avec de premiers résultats encourageants. À terme, l’approche pourrait permettre le diagnostic rapide de contaminations à l’ypérite par un prélèvement sanguin dried blood spot (DBS) sur le terrain suivi de la désorption intégrée au système SPE-UHPLC-MS/MS.

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Vol 33 - N° 3S

P. S26 - septembre 2021 Retour au numéro
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