Urticaire au froid sévère avec angio-œdème, cryoglobulinémie et clonopathie B : une association rare d’évolution favorable après rituximab - 24/11/21
Résumé |
Introduction |
L’urticaire au froid est classée dans les urticaires chroniques inductibles et peut être responsable d’angio-œdème. Nous rapportons l’observation d’une patiente ayant développé un angio-œdème récidivant sévère buccopharyngé présentant les caractéristiques d’une urticaire sévère au froid, associée à une cryoglobulinémie et une clonopathie B. Son évolution a été favorable sous rituximab.
Observation |
L’histoire de la patiente débute brutalement en mars 2018, suite à une exposition au froid, par un prurit des oreilles, des démangeaisons touchant les extrémités (oreilles, nez, mains) et un œdème des mains. Les symptômes s’aggravent progressivement en 2019 et 2020 avec des poussées d’urticaire pouvant s’étendre à l’ensemble du corps. Des épisodes d’angio-œdème buccal sont déclenchés par la prise d’aliments froids. Les symptômes s’améliorent partiellement en période estivale, mais la patiente devient intolérante aux ambiances trop climatisées. En 2020, à deux reprises, surviennent suite à une marche dans le froid des crises de toux avec dyspnée, dont le caractère inspiratoire ou expiratoire n’a pu être précisé. Le test au glaçon est positif en moins de 10 minutes. Durant l’hiver 2020, la patiente ne peut plus sortir plus de 15 à 30min dans le froid.
Au plan thérapeutique, les traitements antihistaminiques sont initialement partiellement efficaces puis totalement inefficaces malgré 4 comprimés quotidiens de desloratadine. La corticothérapie n’a pas été essayée.
La trypase sérique est dosée à 7,59μg/L. La fraction C4 du complément est abaissée à plusieurs reprises à niveau variable : indosable en septembre 2020, 0,05g/L en décembre (N>0,11). La fraction C1Q est abaissée en l’absence d’anticorps anti-C1Q. En décembre 2020, alors que la fraction C3 est normale, et le CH50 à 31 U (limite inférieure de la normalité), les dosages pondéral et fonctionnel du C1-inhibiteur sont normaux. Une cryoglobulinémie de type III quantifiée à 706mg/L est mise en évidence ainsi qu’un composant monoclonale IgG kappa<1g/L. Il n’y a pas d’atteinte rénale. La patiente présente aussi une clonopathie B caractérisée par : une lymphocytose à 6,5G/L, 3471 lymphocytes clonaux avec expression forte du CD5, CD23, CD200 et ROR en faveur d’une LLC malgré un score de Matutes de 3. L’étude cytogénétique montre un caryotype complexe. Le TEP scanner est normal. Les diagnostics d’urticaire au froid, de cryoglobulinémie et de clonopathie B sont retenus.
Un traitement par rituximab 1g deux fois à 15 jours d’intervalle est initié en décembre 2020. Lors de la consultation de suivi à 6 mois du traitement, la patiente indique avoir retrouvé une qualité de vie tout à fait satisfaisante. Le test au glaçon effectué n’a pas déclenché de réaction pendant les 20min d’exposition. Le complément sérique est redevenue normal pour les fractions C3, C4 et CH50.
Discussion |
Cette patiente présente un phénotype clinique typique d’urticaire au froid, mais l’association à une hémopathie B est rare dans cette maladie. La consommation du complément, imputée à la présence de la cryoglobuline, a pu contribuer à la survenue des crises d’angio-œdème. La physiopathologie de l’urticaire au froid est en effet complexe, dominée par l’activation mastocytaire en réponse au froid par des mécanismes intermédiaires mal connus. Le rôle d’agglutinines froides (non recherchées chez notre patiente) a été suspecté dans l’urticaire au froid sévère et des cryoprotéines sont retrouvées dans 3 % des cas. Chez notre patiente, les anatoxines C3a et C5a volontiers libérées lors de l’activation de la cascade du complément/cryoglobuline ont pu participer à l’activation mastocytaire et à l’augmentation de la perméabilité vasculaire. Au plan thérapeutique, l’omalizumab est recommandé en cas d’urticaire au froid résistant aux antihistaminiques à dose maximale. Chez notre patiente, le rituximab a été privilégié en raison de la mise en évidence d’une cryoglobulinémie abondante, de la consommation du complément, et de la clonopathie B associée.
Conclusion |
Nous n’avons pas retrouvé dans la littérature de cas semblable d’urticaire au froid d’évolution favorable après rituximab.
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Vol 42 - N° S2
P. A384 - décembre 2021 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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