Un cas de prurigo pigmentosa sous régime cétogène - 24/11/21
Résumé |
Introduction |
Le prurigo pigmentosa (PP) est une dermatose inflammatoire peu commune marquée par son caractère prurigineux et son aspect réticulé typique du tronc, laissant un réseau pigmenté cicatriciel. Entité rare, elle est principalement rencontrée chez les jeunes femmes japonaises mais peut se voir dans tous les pays du monde. Nous rapportons un cas de PP survenant chez un homme sous régime cétogène (keto-diet).
Observation |
Un homme de 38 ans, sans antécédents pathologiques notables, nous a consulté pour une éruption prurigineuse localisée au niveau de la moitié supérieure du dos évoluant depuis 1 mois par poussée. L’éruption est apparue 3 semaines après avoir commencé un régime cétogène pauvre en glucides. À l’examen physique, il y avait de multiples papules érythémateuses œdémateuses coalescentes formant un réseau réticulé inflammatoire. On a noté par ailleurs des macules pigmentées réticulées. L’examen aux bandelettes urinaires avait objectivé une acétonurie à 3 croix. L’examen histopathologique a montré une spongiose associée à un infiltrat dermique périvasculaire lymphohistiocytaire riche en polynucléaires neutrophiles et éosinophiles. Le diagnostic de PP était porté. Le patient a été mis sous doxycyline 100mg/jour et le régime cétogène a été interrompu. L’évolution était favorable marquée par la disparition des lésions prurigineuses au dépend d’une hyperpigmentation post-inflammatoire réticulée. Aucune rechute n’était rapportée après 3 mois de suivi.
Discussion |
Bien que rare, le PP a un aspect clinique très évocateur qui doit facilement en faire évoquer le diagnostic. Les lésions prurigineuses sont distribuées de façon symétrique sur le tronc et la nuque et évoluent par poussées, laissant une pigmentation réticulée. Le diagnostic était retenu chez notre patient devant la présentation clinique stéréotypée, la bonne réponse aux tétracyclines et l’aspect histologique d’une papule montrant un infiltrat polymorphe du derme superficiel, constitué essentiellement de lymphocytes associés à quelques polynucléaires neutrophiles ainsi qu’un épiderme siège de foyers de spongiose modérée.
D’étiologie encore indéterminée, le PP était souvent associé au jeûne prolongé, diabète type 1, anorexie mentale, chirurgie bariatrique, grossesse avec vomissements intenses, et aux régimes amaigrissants. Toutes ces conditions entraînent une augmentation de la production des corps cétoniques. En effet, un taux élevé de cétones dans le sang et/ou urines était détecté dans plusieurs études chez des patients atteints de PP. On a émis l’hypothèse que les corps cétoniques jouent un rôle dans l’induction de l’inflammation périvasculaire, principalement par l’intermédiaire des neutrophiles, ce qui explique la réponse aux médicaments agissant sur les neutrophiles comme la dapsone et les tétracyclines. Ils agissent également par un rôle direct en provoquant des dommages intracellulaires. Un régime cétogène consiste à réduire la teneur en glucides de l’alimentation (généralement à moins de 50g/j) tout en augmentant la fraction des apports en matières grasses et en protéines créant ainsi un état de cétose. Il est de plus en plus connu et pratiqué dans le monde. En conséquence, les cas de PP, également connus sous le nom de « keto-rash » sont de plus en plus rapportés.
Conclusion |
Notre observation souligne l’importance de bien connaître cette entité afin de prendre en charge précocement et efficacement ces patients en traitant la cétonémie sous-jacente. Ceci permet d’obtenir une rémission des poussées inflammatoires et d’éviter l’installation des cicatrices hyperpigmentées. Une sensibilisation des jeunes sur les risques de ce type de régime s’impose.
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Vol 42 - N° S2
P. A390-A391 - décembre 2021 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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