Maladie sérique au Rituximab dans un contexte de purpura thrombotique thrombocytopénique auto-immun - 24/11/21
Résumé |
Introduction |
Le purpura thrombotique thrombocytopénique acquis (PTTa) est une pathologie auto-immune rare mettant en jeu le pronostic vital, caractérisée par un syndrome de microangiopathie thrombotique consécutif à un déficit profond (<10 %) d’activité ADAMTS13 (a disintegrin and metalloprotease with thrombospondin type 1 repeats, member 13). Le traitement en phase aiguë repose désormais sur une triple association comprenant échanges plasmatiques (EP) – immunosuppression (corticothérapie systémique et Rituximab [RTX, anti-CD20 de type I]) – Caplacizumab (Capla, nanobody anti-facteur Willebrand). Sous cette « triple thérapie », les formes réfractaires et les décès sont exceptionnels. Dans cette observation, nous rapportons la survenue d’une rechute précoce du taux de plaquettes malgré triple thérapie, et discutons les principales hypothèses diagnostiques.
Observation |
Nous rapportons le cas d’une patiente âgée de 53 ans, suivie depuis l’âge de 18 ans pour un purpura thrombopénique immunologique (PTI) et un lupus systémique, quiescents et non traités. La patiente a été prise en charge pour un PTT révélé par un AVC ischémique cérébelleux, une thrombopénie à 7g/l associée à une anémie hémolytique mécanique (hémoglobine à 7,8g/dl, LDH à 4N, haptoglobine indosable, schizocytes à 10 %). La fonction rénale était préservée. L’activité ADAMTS13 était <10 %, les auto-anticorps anti-ADAMTS13 positifs à 68UI/ml (N<25). L’évolution initiale était rapidement favorable après EP quotidiens, corticothérapie systémique, RTX (J1-J4-J8) et Capla quotidien avec un taux de plaquettes >150g/l dès J3 et à 314G/l à J12. À J15 du début du traitement, la patiente présenta brutalement un tableau associant céphalées fébriles, exanthème du tronc, purpura infiltré des extrémités, et arthralgies inflammatoires. Le taux de plaquettes chutait rapidement à 28g/l, il y avait une neutropénie transitoire à 0,44g/l et une protéinurie à 2,96g/l. L’hémoglobine était stable à 9,7g/dl et les LDH étaient normales. L’activité ADAMTS13 restait effondrée. La déplétion B était complète. Une rechute précoce du PTT ne pouvait être exclue et de nouveaux EP étaient initiés. Le bilan infectieux large était négatif. Une poussée lupique ou de PTI étaient écartées sous cette pression immunosuppressive forte. Néanmoins, la voie classique du complément, normale à l’admission, était cette fois-ci consommée (C3 0,55g/l [N>0,8], C4 0,05g/l [N>0,12], CH50 à 21,48UI/ml [41-N-95]). Les hypothèses de maladie sérique au RTX ou au Capla étaient alors évoquées, faisant suspendre les deux traitements. L’évolution était lentement favorable, marquée par une remontée progressive du taux de plaquettes (>150G/l à J28), la régression des symptômes cliniques, la normalisation de l’activité ADAMTS13 et du complément, et ce malgré la reprise du Capla de J24 à J29. Après enquête de pharmacovigilance, le diagnostic retenu était celui de maladie sérique imputée au RTX, conduisant à son arrêt définitif.
Discussion |
La survenue d’une thrombopénie sous triple thérapie à la phase aiguë de la prise en charge d’un PTTa est exceptionnelle (dans la cohorte française, seuls 3 patients sur 90 traités par triple thérapie avaient présenté une baisse transitoire et modérée des plaquettes) et doit faire évoquer un diagnostic différentiel, en priorité une complication thrombotique, infectieuse ou médicamenteuse. L’utilisation de RTX peut se compliquer de maladie sérique, une hypersensibilité de type III qui survient le plus souvent 10jours après la 1ère perfusion et surtout dans le cadre de maladies auto-immunes (28/33 cas rapportés). Elle se manifeste sous la forme de fièvre (78,8 %), arthralgies (72,7 %), rash (69,7 %), avec des cytopénies de profondeur variable, et est associée à une activation de la voie classique du complément. Elle est médiée par la présence d’anticorps anti-RTX dans 50 % des cas. La réexposition au RTX est déconseillée. D’autres anti-CD20 sont disponibles, notamment l’ofatumumab (anti-CD20 de type I) et l’obinituzumab (anti-CD20 de type II), chez les patients ayant présenté une maladie sérique au RTX avec cependant des réactions croisées possibles. Enfin, le Capla n’était pas incriminé dans ce tableau, comme attesté par une réintroduction bien tolérée. Aucun cas de maladie sérique au Capla n’a été rapporté à ce jour.
Conclusion |
Le diagnostic de maladie sérique est un diagnostic d’exclusion, particulièrement difficile à l’ère de l’association d’immunothérapies.
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Vol 42 - N° S2
P. A414 - décembre 2021 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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