Utilisation concomitante d’inhibiteurs de la pompe à protons et de thérapie ciblée : impact sur la durée de traitement par thérapie ciblée et la survie des patients atteints de mélanome métastatique - 01/12/22
Résumé |
Introduction |
Les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) sont fréquemment utilisés chez les patients atteints de cancer. Pourtant, en diminuant l’acidité gastrique, ils peuvent perturber l’absorption de nombreux médicaments administrés par voie orale. Une diminution de l’efficacité anti-tumorale de plusieurs inhibiteurs de tyrosine kinase a été suggérée dans des études de pharmacocinétique et en vie réelle. Peu de données ont été publiées concernant les thérapies ciblées anti-BRAF/anti-MEK. La Food and Drug Administration (FDA) estime qu’on ne connaît pas l’effet de la prise d’IPP sur l’efficacité du dabrafénib, et la Société européenne d’oncologie médicale (ESMO) recommande donc d’éviter la prise d’IPP au cours d’un traitement par dabrafénib. De plus, les IPP inhibent le cytochrome P450 3A4 (CYP3A4) et pourraient donc entraîner un surdosage et une toxicité du vemuraéenib et du cobimétinib qui sont des substrats du CYP3A4.
Matériel et méthodes |
Les patients recevant une première ligne de traitement par anti-BRAF/anti-MEK pour un mélanome métastatique en France entre 2015 et 2017 étaient inclus à partir de la base française de l’Assurance-maladie (Système national des données de santé, SNDS). Nous avons comparé la durée de traitement par thérapie ciblée et la survie globale en fonction de la prise concomitante d’IPP. L’exposition aux IPP était analysée en intention de traiter et en per protocole (censure en cas d’arrêt des IPP pour les exposés, ou d’initiation d’IPP pour les non-exposés). Une pondération « overlap weighting » basée sur le score de propension était utilisée pour équilibrer les caractéristiques initiales des patients exposés ou non aux IPP.
Résultats |
La cohorte de patients traités par anti-BRAF/anti-MEK était composée de 1028 individus, dont 361 (32,0 %) recevaient des IPP entre un mois avant et 3 mois après le début de la thérapie ciblée. Après pondération sur un grand nombre de caractéristiques dont l’âge, le sexe, les sites de métastases et les comorbidités, la prise concomitante d’IPP n’était pas associée à une plus courte durée de traitement par thérapie ciblée ou survie globale en intention de traiter : hazard ratio pondéré (pHR) et intervalle de confiance à 95 % (IC 95 %) pour la durée de traitement, 1,03 (0,86–1,24) ; pHR et IC 95 % pour la survie, 1,11 (0,88–1,39). Les résultats des analyses per protocole étaient similaires. Parmi les patients recevant le dabrafénib, seul ou associé au tramétinib, la durée de traitement et la survie n’étaient pas non plus modifiés par la prise d’IPP. L’exposition aux IPP ayant une affinité plus forte avec le cytochrome P450 3A4 ne diminuait pas non plus la durée de traitement ou la survie.
Discussion |
Ces résultats suggèrent une innocuité des IPP chez les patients traités par anti-BRAF/anti-MEK. L’utilisation des données du SNDS a permis d’identifier l’ensemble des patients en France recevant cette co-médication en vie réelle. La prise en compte dans l’analyse d’un grand nombre de facteurs de confusion et l’utilisation d’une méthode de pondération basée sur le score de propension a permis de contrôler efficacement le biais d’indication. La principale limite est l’absence de certaines données cliniques et biologiques dans le SNDS. De plus, la dose de thérapies ciblée n’était pas connue. Ces résultats sont rassurants pour les patients ayant une exposition concomitante d’IPP et de thérapie ciblée. Si les IPP soulagent certains symptômes du patient, ils peuvent donc être poursuivis.
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Vol 2 - N° 8S1
P. A97 - novembre 2022 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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