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Ronsard face à la vieillesse et à la mort : de l’épicurisme à l’auto-compassion - 26/05/23

Ronsard facing old age and death: From Epicureanism to self-compassion

Doi : 10.1016/j.npg.2022.12.004 
R. Gil
 Université et CHU de Poitiers, Espace régional de réflexion éthique de Nouvelle-Aquitaine, site de Poitiers, 2, rue de la Milétrie, 86021 Poitiers, France 

Résumé

Pierre de Ronsard, qualifié au XVIe siècle de « prince des poètes », rassembla autour de lui la Pléiade. Comblé de faveurs par Henri II et Charles IX, pétri d’une immense culture classique, il écrivit des poèmes d’une langue savante et mélodieuse, avec une versification rigoureuse. Il fut surtout considéré comme un épicurien, célébrant dans ses poèmes ses amours et ses déceptions amoureuses, les plaisirs de la bonne chère et du bon vin, le souci de jouir de l’instant présent. Il fut en effet habité aussi par la perspective du temps qui passe, par la fuite de la jeunesse, par la perspective de la vieillesse, des maladies et par la conscience de la finitude. À 31 ans, il rassemble sa vision de la vieillesse et de la mort dans un hymne aux accents graves orné d’images mythologiques et soutenu par sa foi chrétienne. Il y exprime moins une crainte de la vieillesse et de la mort qu’une crainte de la mort sociale, de l’incapacité de se mouvoir, des souffrances de fin de vie. Plus de trente plus tard, dans sa soixante et unième année, son état de santé le confine dans ses deux prieurés et ses épreuves de fin de vie durent environ deux mois. Ronsard fut très entouré notamment par quelques amis et par les religieux de ses prieurés. Claude Binet, son disciple, consigna ses observations sur les paroles et le comportement du poète dans une biographie. Par ailleurs, Ronsard composa des poèmes qu’il dicta jusqu’aux derniers instants de sa vie. Les témoignages ainsi recueillis ont conduit à analyser comment le poète, considéré comme épicurien, avait vécu sa fin de vie. Cette étude permet de montrer que Ronsard abandonna son épicurisme tandis que ses paroles et son comportement relèvent d’une auto-compassion avec ses trois composantes : la gentillesse à l’égard de soi, le sentiment d’appartenance à une humanité commune, exposée à la maladie, à la vieillesse, à la mort, une pleine conscience excluant l’hyperidentification avec l’expérience douloureuse et ses émotions négatives. L’auto-compassion est ainsi distinguée de l’auto-apitoiement et de l’estime de soi longtemps considérée comme un facteur déterminant de la santé mentale. La fin de vie de Ronsard est ainsi l’occasion d’apprécier de manière nouvelle l’œuvre de cet immense poète. Elle permet aussi de mettre en parallèle une œuvre littéraire et l’histoire de vie dont elle témoigne. Elle permet enfin de prêter attention aux manifestations cliniques de l’auto-compassion et à prendre la mesure de son importance comme stratégie adaptative à l’égard des épreuves de l’existence et notamment, en situation de soins palliatifs, dans l’accompagnement de fin de vie.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

Summary

Pierre de Ronsard, described in the 16th century as the “prince of poets”, gathered the Pléiade group of poets around him. Blessed with favours of Henry II and Charles IX, and with a vast classical culture, he wrote poems in a learned and melodious language, with strict versification. He was above all considered an epicurean, celebrating in his poems his loves and disappointments, the pleasures of good food and good wine, and the desire to enjoy the present moment. He was in fact also inhabited by the perspective of passing time, by the flight of youth, by the prospect of old age and illness and by the awareness of finitude. At the age of 31, he brought together his views of old age and death in a hymn with sombre accents, adorned with mythological images and supported by his Christian faith. In it, he expresses not so much a fear of old age and death as a fear of social death, and of the inability to move, of the end-of-life suffering. More than thirty years later, in his sixty-first year, his state of health confined him to his two priories and his end-of-life sufferings lasted about two months. Ronsard was closely supported by a few friends and by the monks of his priories. Claude Binet, his disciple, recorded his observations on the poet's words and behaviour in a biography. In addition, Ronsard composed poems, which he dictated up to the last moments of his life. The testimonies thus collected lead us to an analysis of how the poet, who was considered an epicurean, had experienced the ending of his life. This study shows that Ronsard abandoned his epicureanism, and that alongside his words and his behaviours related to self-compassion with its three components: kindness towards oneself, the feeling of belonging to a common humanity, exposed to illness, old age and death, and a mindfulness excluding hyperidentification with the painful experience and its negative emotions. Self-compassion is thus distinguished from self-pity and self-esteem, which have long been considered as determining factors in mental health. The end of Ronsard's life is thus an opportunity to appreciate the work of this immense poet in a new way. It also provides an opportunity to compare a literary corpus with the life story to which it bears witness. Finally, it encourages us to pay attention to the clinical manifestations of self-compassion and to take the measure of its importance as an adaptive strategy to cope with the trials of life, and, in particular, in a palliative care situation, for the accompaniment of the end of life.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

Mots clés : Ronsard, Fin de vie, Vieillissement, Auto-compassion et fin de vie, Accompagnement de fin de vie, Littérature, Poésie

Keywords : Ronsard, End-of-life, Ageing, Self-compassion and end-of-life, End-of-life care, Literature, Poetry


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