L’objectif de ce travail est de rechercher des éléments en faveur d’un vécu traumatique au sein du récit des parents adoptifs, lorsqu’ils racontent la période entourant les premières rencontres avec leur enfant dans des situations d’adoptions internationales. Une revue de la littérature sur «trauma et narrativité» a été réalisée pour rechercher les caractéristiques de la structure du récit présentes de façon significativement plus fréquente chez les sujets traumatisés par rapport aux sujets non traumatisés. Ces éléments sont regroupés sous le terme de «marques traumatiques». Parmi les dix récits recueillis, cinq présentent dans leur structure des marques traumatiques, telles que l’absorption dans la scène du passé avec une attention excessive à des détails, la diminution des références au vécu interne, l’incohérence, l’envahissement par un thème unique. En outre, dans neuf entretiens sur dix, on retrouve au niveau du contenu du récit des expériences potentiellement traumatiques, c’est-à-dire susceptibles d’entraîner un effroi et une effraction psychique. Il s’agit principalement de l’écart entre l’enfant réel et l’enfant imaginaire, de l’impossibilité de ramener les expériences vécues à des représentations préexistantes et de la confrontation, lors du processus d’adoption, à un contexte éprouvant, susceptible d’entraver la mise en place du lien parents–enfant. Ces résultats confirment l’intérêt clinique du récit de l’adoption pour éclairer la construction de la parentalité et les interactions familiales.

The purpose of this study is to research the elements indicative of traumatic experience in adoptive parents’ accounts of the period of their first encounters with their child, in situations of international adoption. A review of trauma narratives aims to evaluate which characteristics in the structure of the account are more frequently described for traumatized subjects than for non traumatized subjects. These characteristics are called «traumatic marks» in this study. Among the ten accounts collected, five present traumatic marks in their structure, such as absorption in the scene, reduction of references to inner experience, incoherence, or the intrusion of a single theme. In nine of the ten interviews, one finds potentially traumatic experiences at the level of content, i.e. experiences likely to bring about fright and psychic effraction. Principally concerned are the divergence between the real child and the imaginary child, the impossibility of relating the lived experiences to the realm of the familiar, and the confrontation, in the course of the adoption process, of a difficult context, likely to hinder the establishment of the ties between parents and child. These results confirm the clinical interest of the account of the adoption to shed light on familial interactions.