P031 - Pronostic à 10 ans chez 484 malades atteints d’anorexie mentale - 04/12/08
Introduction et But de l’étude. – L’anorexie mentale (AM) est un trouble grave et chronique du comportement alimentaire (TCA). Peu d’études évaluant son pronostic ont été publiées. Elles concernent, sauf une, des séries de moins de 100 malades. Fort peu d’études de suivi à très long terme sont disponibles. Elles évoquent jusqu’à 11 % de mortalité. Nous présentons ici le pronostic à 10 ans et plus de 484 malades atteints d’AM, soit de forme restrictive (n = 71 %), soit de forme boulimique (18 %) et/ou vomisseuse (n = 11 %).
Matériel et Méthodes. – 484 malades d’une série de 614 malades (79 %) hospitalisés dans l’unité TCA (CHU Bichat, Paris, puis CHU Dijon). Les critères d’inclusion étaient d’avoir été hospitalisé dans l’unité TCA au début (M0) et d’avoir une AM certaine (DSM IV). La prise en charge était nutritionnelle (inclus la nutrition entérale) et cognitivo-comportementale. Tous les malades avaient au moins un suivi annuel : examen clinique, IMC, co-morbidité, questionnaires spécifiques (EDI, Beck, Hamilton). Le pronostic était évalué selon les critères classiques : a) guérison : IMC normal, apports et comportement alimentaire corrects, b) bon pronostic : IMC 17,5-18,4, comportement alimentaire figé, apports juste suffisants (ou qqs crises de boulimie) ; c) pronostic moyen : IMC 16-17,5, apports insuffisants et/ou crises pluri-hebdomadaires ; d) pronostic mauvais : IMC < 16, restriction importante et/ou crises quotidiennes ; e) décès.
Résultats. – À l’inclusion, les malades avaient 22,8 ± 4,4 ans, un IMC de 12,8 ± 1,7 kg/(m)2 et une durée de l’AM de 3,5 ± 4,2 ans. À dix ans, la mortalité fut de 1,1 % ; il y avait 292 guérisons (60,3 %), 26 % de bon pronostic, 6 % de pronostic moyen et 6,6 % de mauvais pronostic. Les hommes (n = 22) n’avaient pas un pronostic différent des femmes. Les facteurs de mauvais pronostic furent la forme boulimique (guéris : 49 % vs 66 % ; F = 5,4 ; P < 0,01), la méfiance à l’égard d’autrui (F = 5,9 ; P < 0,02), le sentiment d’impuissance (F = 5,7 ; P < 0,02), le besoin de maigreur (F = 6,8 ; P < 0,005), le peu d’adhésion au traitement (guéris : 36 % vs 71 % ; F = 8,4 ; P < 0,001).
La conversion d’une forme à l’autre était très différente (P < 0,0001) : 31 % passèrent d’une forme restrictive (R) à une forme boulimique/vomisseuse (B) et seulement dans les 3 ans (ANOVA effet temps, P < 0,001). À l’inverse, 11 % passèrent d’une forme B à une forme R. En analyse multivariée, les facteurs de conversion de R vers B furent : des compulsions avant l’AM (P < 0,003), un surpoids avant (P = 0,05), des apports énergétiques à l’hôpital très élevés (F = 5,9 ; P = 0,02), la non utilisation de la nutrition entérale (F = 7,4 ; P = 0,03), l’utilisation de stupéfiants avant (P < 0,01).
Des règles normales étaient retrouvées à IMC > 18,5 kg/(m)2 (87 %), ou si IMC > 18,5 plus des apports en kcal corrects (6 %). À dix ans, 82 patients (17 %) avaient des règles irrégulières et 23 (4,8 %) des troubles gynécologiques.
À dix ans, 76 % des malades avaient un IMC > 18,5 kg/(m)2 et 3 % avaient un surpoids.
Conclusions. – Une prise en charge ànutritionnelle et comportementale permet de réduire beaucoup la mortalité et d’améliorer le pronostic lié au TCA, par comparaison à d’autres séries. À dix ans, près de 86 % des malades vont bien ou sont guéris.
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Vol 22 - N° S1
P. 69 - novembre 2008 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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