Introduction et But de l’étude. – Des données bibliographiques récentes chez l’homme et le rongeur suggèrent que le comportement alimentaire comme les fonctions digestives soient altérés par un régime riche en lipides. Cependant, tous les régimes étudiés sont hypercaloriques ne permettant de distinguer la responsabilité du nutriment de l’effet calorique. De plus, la possibilité qu’un régime riche en sucres, un élément complémentaire du régime cafétéria, produise des effets similaires reste inconnue. Le but de notre étude est d’évaluer 1) les perturbations du comportement alimentaire et 2) la vidange gastrique à la suite de l’ingestion au long cours de régimes normocaloriques où seule la quantité du nutriment étudié (lipides ou sucres) varie.

Matériel et Méthodes. – Douze porcs ont été nourris durant 3 semaines avec des régimes isocaloriques contenant une proportion élevée de sucres (60 %, HC, n = 3), de lipides (40 %, HF, n = 3) ou un mélange équilibré adapté à l’espèce (N, n = 3). La motivation à manger et la vidange de l’estomac ont été évalués sans ou avec une perfusion duodénale de lipides (IL), respectivement par un paradigme de conditionnement opérant et par gamma scintigraphie. La motivation à manger est mesurée par la répétition d’appuis sur un bouton délivrant une récompense alimentaire. Le rassasiement est quantifié par le temps nécessaire à l’arrêt de cette activité par l’animal (temps d’extinction).

Résultats. – Pour le groupe N, la perfusion de lipides dans le duodénum réduit de façon attendue le temps d’extinction du comportement par rapport à une situation sans IL (31 ± 1,6 vs 60 ± 2,8 min ; p < 0,05). L’inverse est observé pour les groupes HF et HC pour lesquels IL n’entraîne plus de modifications comportementales en comparaison avec la situation sans IL (55 ± 2,5 vs 61 ± 3,1 pour HF, p < 0,05 ; et 54 ± 3,2 vs 56 ± 3,5 min pour HC, p < 0,05). De même, le frein duodénal induit par IL est bien observé dans le groupe N avec un franc ralentissement de la vidange gastrique (118 ± 13,4 vs 74 ± 5,7 min, p < 0,01), mais est supprimé de façon inadaptée par le régime HF (72 ± 11,6 vs 76 ± 12,8 min, p = ns) et de façon surprenante pour le régime HC (83 ± 7,9 vs 67 ± 5,4 min, p = ns). Différence entre les 3 groupes significative (p = 0,02).

Conclusion. – En préservant la concentration calorique entre les 3 régimes, nous avons montré que l’excès alimentaire de lipides ou de sucres supprime le frein duodénal impliqué dans la régulation de la prise alimentaire. Cette suppression conduit à des modifications du comportement alimentaire se traduisant par un retard de l’apparition du rassasiement.