Rapport qualité de vie des donneurs vivants de rein Étude QV DVR transversale - 08/09/11

Doi : 10.1016/S1769-7255(11)70007-4 
S. Briançon, L. Germain, C. Baudelot, A. Bannay, J.-M. Virion, M. Thuong

Résumé

La transplantation rénale est aujourd’hui le traitement de référence des patients atteints d’insuffisance rénale chronique terminale. La greffe réalisée à partir de donneur vivant est moins pratiquée en France que dans d’autres pays. Pourtant, de nombreuses enquêtes françaises et internationales établissent qu’elle assure aux personnes greffées l’espérance de vie la plus longue et la qualité de vie la meilleure. Mais les donneurs, eux, que deviennent-ils ? Comment se portent-ils ? Pour la première fois en France, une enquête a été réalisée sur la qualité de vie des personnes ayant donné un rein de leur vivant à l’un de leurs proches. Cette étude a été élaborée et mise en œuvre par l’Agence de la biomédecine et le service Épidémiologie et Évaluation Cliniques (EEC), du CHU de Nancy.

L’objectif principal était de décrire la qualité de vie des donneurs vivants ayant donné un rein depuis plus d’un an et moins de 5 ans. L’objectif secondaire était de contribuer à la connaissance des principaux facteurs associés à la qualité de vie chez les donneurs vivants de rein, après la première année de don.

Les personnes interrogées résidaient en France au moment du don et avaient été prélevées entre le 30 juin 2005 et le 1er mars 2009. Le cahier du donneur rassemblant les différents autoquestionnaires a été envoyé au domicile du donneur entre mars et avril 2010. Les données recueillies par auto-questionnaires ont été complétées par les données médicales adressées par les centres de greffe à l’Agence de la biomédecine dans le cadre du registre CRISTAL. Elles renseignaient sur les caractéristiques du don et du donneur au moment du don, 3 mois après le don et au dernier bilan annuel.

Trois donneurs vivants sur quatre, soit 501 personnes ont accepté de le remplir et le retourner. Ils constituent un échantillon national représentatif de l’ensemble des donneurs vivants de cette période. Les non répondants sont plus jeunes (–4,5 ans en moyenne) et ont eu un moins bon suivi annuel. Les femmes sont plus représentées (61 %) que les hommes. L’âge médian est de 53 ans. Plus des 2/3 exerçaient une activité professionnelle au moment de l’enquête. Les trois catégories principales de donneurs sont les ascendants (36 %), les collatéraux (33 %) et les conjoints (26 %).

La décision de donner a été prise sans hésitation (94 %) et de façon précoce dans l’évolution de la maladie rénale du receveur (64 %). L’information délivrée est jugée globalement satisfaisante excepté pour les conséquences douloureuses et la cicatrice. Les donneurs vivants sont, à distance de leur don, en excellente santé physique appréciée selon un score résumé physique SF36 et ceci d’autant plus qu’ils sont âgés comparativement aux sujets de la population générale de même âge et de même sexe. Ce phénomène traduit la sélection drastique des donneurs potentiels. Le seul facteur influençant le niveau de santé physique à distance du don est la technique chirurgicale utilisée : les 261 sujets ayant bénéficié d’une cœlioscopie ont moins souvent présenté des douleurs dans les suites opératoires (OR=0,5 ; 0,3–0,8 ; p < 0,002) et ont plus souvent récupéré à distance de façon complète sans aucunes douleurs résiduelles (OR=1,7 ; 1,2–2,5 ; p<0,004).

La dimension mentale de la qualité de vie appréciée par le score résumé mental SF36 est très proche de celle de la population générale de même âge et de même sexe bien qu’un peu inférieure ; elle est influencée par des caractéristiques liées à la façon dont a été vécu le don en particulier : la compréhension de leur geste par leur entourage (score moyen 74,2/100), la perception d’un sentiment de redevabilité de la part du receveur à leur égard (46,5 %) et le fait d’avoir vécu une compétition pour être retenu comme le donneur (pour 266 cas un autre donneur était possible et 21 ont vécu le don comme une forte compétition).

Plus de 84 % des donneurs sont suivis par un professionnel de santé. Les principales plaintes exprimées concernent la qualité du suivi médical (70 donneurs se sont exprimés ouvertement sur le sujet) et les séquelles douloureuses et cicatricielles de l’intervention. En dépit des complications chirurgicales, des insatisfactions de leur suivi médical, des licenciements ou des réajustements de leur vie professionnelle (13 %), de leurs difficultés à porter des charges lourdes, des relations parfois complexes avec le receveur (23 % de façon positive et 10 % de façon négative) ou leur entourage, des non remboursements des frais et des pertes de salaire (12 %), ils conseilleraient le don à 95 % et si c’était à refaire… ils recommenceraient à 98 % ! Les bienfaits apportés au receveur l’emportent de beaucoup sur les difficultés.

Cette étude permet d’émettre des recommandations à confirmer par l’étude longitudinale 2009–2012 : favoriser la cœlioscopie qui offre un avantage en termes de douleurs moins fréquentes et de meilleure récupération, mieux appréhender les phénomènes de compétition entre donneurs et receveurs potentiels, améliorer l’information sur les conséquences potentielles du don sur les douleurs et la cicatrice, informer le donneur sur l’importance d’associer l’entourage à la prise de décision ou au moins à la discussion et enfin améliorer la reconnaissance du geste par les tutelles et la société.

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Abstract

The renal transplantation is nowadays the reference treatment of ESRD. Living donor kidney transplantation is less often performed in France than in other countries. Nevertheless, numerous French and international surveys have evidenced that it provides the recipients a longer life expectancy and a better quality of life. Donors themselves, what do they become? How are they? For the first time in France, a survey has been implemented to investigate the quality of life of living kidney donor to one of their close relations. This study has been undertaken by the Agency of the biomedecine and the service Clinical Epidemiology and Evaluation (EEC), of the University teaching hospital of Nancy. The main objective was to describe the quality of life of the living donors having given a kidney for more than a year and less than 5 years. The secondary objective was to contribute to the knowledge of the main factors associated to the living kidney donor quality of life, one year after the donation.

Participants had to be living in France at the time of the donation which had taken place between June 30th, 2005 and March 1st, 2009. A folder gathering various self-administrated questionnaires was sent to the place of residence of the donor between March and April, 2010. These data were completed by medical data collected near the transplantation centres by the Agency of biomedecine within the framework of the register CRISTAL. They included the characteristics of the donation and of the donor at the very time of the donation, 3 months after the donation and at the last annual assessment.

Three living donors in four, that is 501 persons, agreed to fully participate. They constituted a representative national sample of all the living donors of this period. The non participants were younger (4.5 years on average) and had a less adequate annual follow-up. The women were more represented (61 %) than men. The median age was 53 years. More of 2/3 were employed at the time of the survey. The three main categories of donors were ascendants (36 %), collateral (33 %) and spouses (26%).

The donation decision was taken without hesitation (94 %) and at an early stage of the evolution of the recipient renal disease (64 %). The delivered information was considered globally satisfactory except for the painful consequences and for the scar. The living donors were, long after their donation, in an excellent physical health state according to the SF36 summarized physical score and this especially when they were old as compared to the same age and sex general population. This phenomenon highlights the drastic selection of the potential donors. The only factor influencing the level of long term physical health was the surgical technique: the 261 subjects having undergone a cœlioscopy had less often presented post operative pain (OR=0.5; 0.3–0.8; P<0.002) and had more often recovered completely without any residual pain (OR=1.7; 1.2–2.5; P<0.004).

The quality of life mental dimension according to the SF36 summarized mental score was very close to that of the same age and sex of the general population although a slightly lower. It is influenced by characteristics related to the way the donation had been lived, particularly the understanding of their donation by their circle of acquaintances (average score 74.2/100), the perception of a feeling of owing on behalf of the recipient (46.5 %) and the fact of having lived a competition to be retained as the donor (for 266 cases another potential donor did exist and 21 lived the donation as a strong competition). More than 84 % of the donors was still followed by a healthcare professional at the time of the survey. The main expressed complaints concern the quality of the medical follow-up (70 donors expressed themselves openly on this topic) and the pain and scar after effects of the intervention.

In spite of the surgical complications, of the dissatisfactions regarding their medical follow-up, of dismissals or of necessary adjustments of their professional life (13 %), of their difficulties to carry heavy loads, of sometimes complex relations with the recipient (23 % positive, 10 % negative) or their circle of acquaintances, of expenses non reimbursement and of losses of salary (12 %), they would be 95 % to recommend the donation and if it was to be redone 98 % would do it again! Benefits brought to the recipient won largely over the encountered difficulties.

This retrospective and cross-sectional study allows to state recommendations which have to be confirmed by the 2009–2012 longitudinal study: to favour the cœlioscopy which offers an advantage in terms of less frequent pain and a better post operative recovery, to better understand the phenomena of competition between potential and donors recipients, to improve the information about the potential consequences of the donation on the pain and on the scar, to inform the donor about the importance to associate the proxies with the decisionmaking or at least with the discussion and finally to improve the society recognition of the donation.

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Vol 7 - N° S1

P. S1-S39 - juillet 2011 Retour au numéro

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