Peu de données sont actuellement disponibles sur la prévalence et les caractéristiques associées des troubles anxieux en consultation spécialisée en France, notamment dans le secteur libéral. Or la psychiatrie ambulatoire libérale représente une des principales filières de soins pour les patients souffrant de ces troubles, avec un accès direct possible en première intention et des pratiques de prise en charge très diversifiées (pharmacothérapie mais également psychothérapies de types très variés). Notre étude transversale avait donc pour objectif de décrire la prévalence des troubles anxieux dans une large population de patients consultant en psychiatrie libérale, et par ailleurs d'étudier les phénomènes de comorbidité, la sévérité des troubles, leur retentissement fonctionnel et la consommation de soins associée à cette pathologie. Les patients étudiés ont été recrutés et évalués par 501 psychiatres répartis sur tout le territoire, lors d'une première demande de consultation. Les inclusions devaient se faire de manière consécutive pour éviter tout biais de sélection, mais en excluant de principe les pathologies psychotiques et les démences. Un échantillon de 1955 patients a ainsi pu être constitué, tous faisant l'objet d'une évaluation diagnostique standardisée par le Mini International Neuropsychiatric Interview (MINI) et d'une évaluation dimensionnelle de la sévérité des troubles, de la qualité de vie, et des consommations de soins. Au total, au moins un trouble anxieux actuel est retrouvé chez 64,3 % des patients, contre 55 % pour les troubles de l'humeur. Les taux de prévalence sont, par ordre décroissant : 29,4 % pour le trouble anxiété généralisée, 25,9 % pour l'agoraphobie, 19,2 % pour le trouble panique, 15,3 % pour les phobies sociales, 11,4 % pour les troubles obsessionnels-compulsifs, et 5,4 % pour les états de stress post-traumatique (ESPT). Des antécédents de tentatives de suicide sont retrouvés chez 12 à 20 % des patients selon les troubles, et un risque suicidaire élevé est retrouvé par exemple chez 25 % des patients souffrant d'ESPT. Les scores des échelles d'intensité symptomatique, de fonctionnement global et de qualité de vie indiquent en moyenne une symptomatologie anxieuse importante, à l'origine d'un retentissement significatif. Environ les trois-quarts des patients ont bénéficié d'une consultation médicale au cours des trois mois précédant l'enquête, et 9 % ont été hospitalisés. Un arrêt de travail est signalé pour 25 % des patients au cours des trois derniers mois, d'une durée moyenne de 35 jours. Concernant les consommations médicamenteuses avant la consultation chez les patients anxieux, il faut souligner la prépondérance de l'utilisation des anxiolytiques (85 à 98 % selon les catégories de troubles anxieux) par rapport à celle des antidépresseurs (20 à 40 %). On note également que 38,4 % des patients de l'ensemble de la population prennent des anxiolytiques de manière quotidienne depuis au moins trois mois, dont environ 40 % présentent des signes de dépendance. Au total, cette étude montre l'importance quantitative des troubles anxieux chez les patients consultant en psychiatrie libérale, toutes les catégories étant représentées, de même que le niveau élevé de sévérité de ces troubles. En comparaison des quelques données publiées antérieurement, les taux de prévalence des troubles anxieux semblent en augmentation.

Few data are currently available on the prevalence and associated characteristics of anxiety disorders in psychiatric out-patients in France, in particular in the private health-care. However, this represents one of the principal systems of care for patients suffering from anxiety disorders, with a possible direct access and several types of treatments available (pharmacotherapy but also different kinds of psychotherapy). The aim of our study was to describe the prevalence of anxiety disorders in a large sample of patients consulting in the private sector, and in addition to study the comorbidity, the severity of the disorders, their consequences on quality of life and health care consumption. The studied patients were included and assessed by 501 psychiatrists from all the country, at the time of a first visit. Inclusions were to be made in a consecutive way, but with the exclusion of psychotic disorders and dementia. A sample of 1 955 patients was obtained, and all subjects had a standardized diagnostic assessment with the Mini International Neuropsychiatric Interview (MINI) and with various dimensional scales of symptomatology severity, quality of life, and health care consumption. On the whole, at least one current anxiety disorder was found in 64.3 % of the patients, while 55 % had a depressive disorder. Individually, the prevalence rates are 29.4 % for generalized anxiety disorder, 25.9 % for agoraphobia, 19.2 % for panic disorder, 15.3 % for social phobia, 11.4 % for obsessive-compulsive disorder, and 5.4 % for post-traumatic stress disorder (PTSD). A history of suicide attempts was found in 12-20 % of patients, and an elevated suicide risk was found for example in 25 % of PTSD patients. The scores of the symptomatic scales, adaptation and quality of life measure show a very significant anxious symptomatology, with serious functional consequences. Approximately 75 % of patients had another medical consultation during the three previous months, and 9 % have been hospitalized. An interruption of work was found in 25 % of the patients during the last three months, in average for 35 days. Concerning drug consumption before the visit by anxiety disorders patients, the preponderance of anxiolytic use is notable (85 to 98 % according to categories of anxiety disorders) when compared to that of antidepressants (20 to 40 %). Moreover, 38.4 % of the whole sample took an anxiolytic once a day for at least three months and about 40 % of them had dependence symptoms. In conclusion, this study showed the quantitative importance of anxiety disorders among psychiatric out-patients in the private practice sector in France, all the categories of anxiety being represented, and the high level of severity and burden of these disorders. Compared to some data published before, the prevalence rates of these anxiety disorders seem to be increasing.