Comment parler de cette expérience qu’est la traversée du cancer lorsqu’on a été traité quand on était un tout petit enfant et que les souvenirs font défaut ? Que peut-on rapporter ? Que peut-on construire ? Peut-on parler de « vrais souvenirs » ? Quelle part les souvenirs visuels, corporels, les rêves, le suivi médical prennent-ils ? Il semble que ne pas se souvenir prend une valeur protectrice pour les jeunes adultes rencontrés qui attribuent la souffrance psychique à leurs parents. Eux se disent détachés, comme s’il ne s’agissait pas d’eux, mais d’un autre. Ils disent aussi avoir besoin d’un récit, mais sont ambivalents : souhaitent-ils le récit objectif du médecin (la réalité) ou celui subjectif (une histoire) des parents ? L’hospitalisation précoce a-t-elle fait d’eux des héros ou des jeunes gens aux prises avec la question de la séparation et de l’abandon ?

How can an adult talk about cancer when he was treated as a young child and that memories are missing? What can he build? What can he tell? How important are visual memories, memories of the body, dreams, medical follow- ups? It seems that the absence of memories has a protective effect on the young adults met, who attribute the psychological suffering to their parents. They say they are unconcerned as if the story belonged to someone else. They admit they need to be told about what happened to them, but they remain ambivalent: do they need a medical report, or do they want to hear a story from their parents? Has early hospitalization made them a hero, or a young adult who is afraid of being abandoned?