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Pharmacologie des anti-inflammatoires non-stéroïdiens et pathologies ORL - 21/02/08

Doi : PM-30-39-40-CAH2-70 

Philippe Devillier

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Pharmacologie des AINS et pathologies ORL : les 10 points clés

1. Un rappel

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont des molécules qui appartiennent à des familles chimiques de structures hétérogènes et qui n'ont pas de structure chimique stéroïdienne. Ils sont avant tout analgésiques mais aussi anti-pyrétiques et anti-inflammatoires. Leurs effets sont essentiellement symptomatiques.

2. Les effets inflammatoires des prostanoïdes (thromboxane A 2 et prostaglandines)

Ils sont essentiellement liés à leurs effets pro-algogènes et vasculaires. Les effets pro-algogènes sont expliqués par la sensibilisation des nocicepteurs des terminaisons sensitives à l'action stimulante (algogène) des kinines (bradykinine), de la sérotonine et de l'histamine. Par ailleurs, la production cérébrale des prostanoïdes intervient dans la thermorégulation.

3. Mode d'action

Les AINS ont pour mode d'action commun de diminuer la production des prostanoïdes en inhibant l'activité des deux isoformes de cyclo-oxygénases (COX-1 et COX-2). La COX-2 est une isoforme exprimée essentiellement lors d'un processus inflammatoire. A l'exception de deux molécules récemment commercialisées (celecoxib, rofecoxib) qui sont réellement sélectives pour la COX-2, tous les autres AINS ne sont pas ou peu sélectifs. La COX-1 est impliquée dans la régulation de multiples fonctions physiologiques. L'inhibition de la COX-1 explique en partie les effets secondaires classiques des AINS non sélectifs.

4. Comparaison

Il est classique de souligner la variabilité de l'efficacité anti-inflammatoire et antalgique des différents AINS selon les patients sans qu'aucune explication cohérente ne soit proposée. De plus, il est très difficile de façon objective de comparer l'efficacité des différents AINS compte tenu de l'hétérogénéité des études. Aucun travail ne permet de privilégier un AINS sur la base de l'activité anti-inflammatoire ou antalgique pour une indication précise. Dans les douleurs aiguës, il est préférable d'utiliser des AINS à résorption rapide par voie orale pour obtenir un soulagement plus précoce.

5. Le paracétamol

C'est un antalgique, anti-pyrétique sans activité anti-inflammatoire ; son mécanisme d'action reste en grande partie à élucider. Il n'appartient pas à la classe des AINS, étant un mauvais inhibiteur des COX, notamment de la COX-2 (30 % d'inhibition maximale). Pour des posologies identiques (1 à 3 g/j), l'activité antalgique du paracétamol est comparable à celle de l'aspirine dans des douleurs de diverses origines. Il ne semble pas exister de différence d'efficacité anti-pyrétique entre AINS et paracétamol.

6. Selon la RMO

D'une façon générale, les AINS n'ont pas d'indication en tant qu'anti-inflammatoires dans les pathologies ORL de cette monographie. La RMO parue au J.O. du 14 novembre 1998, qui s'applique aux infections de la sphère ORL chez l'enfant et l'adulte sans facteur de risque, stipule, qu'il n'y a pas lieu d'instaurer un traitement par AINS à dose anti-inflammatoire en association à l'antibiothérapie générale, sauf composante anti-inflammatoire importante. Cette RMO ne concerne pas les AINS à doses antalgiques et antipyrétiques qui sont utilisés dans les indications ORL avec ou sans composante infectieuse.

7. Les deux inhibiteurs sélectifs COX-2

Ils ne sont actuellement indiqués que dans deux pathologies inflammatoires chroniques, l'arthrose et la polyarthrite rhumatoïde. Il n'y a donc pas d'indication de ces inhibiteurs en pathologie ORL. Le seul bénéfice actuellement démontré d'une inhibition sélective de la COX-2 est une meilleure tolérance digestive.

8. Le rôle des prostanoïdes dans l'expression clinique des rhinites allergiques

Il est insuffisant pour justifier l'utilisation des AINS dans cette pathologie, notamment en regard de l'efficacité des anti-H1 et des corticoïdes locaux. Les AINS n'ont aucune indication dans les polyposes nasales et sont même contre-indiqués en cas d'intolérance aux AINS, trouvée chez environ 15-20 % des patients ayant une polypose nasale. Cependant, l'application locale d'acétylsalicylate de lysine à doses progressivement croissantes de 20 mg à 4 mg pourrait diminuer de moitié les récidives après polypectomie. Il n'existe pas de preuve de l'efficacité des AINS dans les sinusites chroniques. L'efficacité des AINS n'a pas été étudiée dans les laryngites. Enfin, il n'existe pas de preuves suffisantes tant expérimentales que cliniques pour recommander l'utilisation des AINS dans les otites, si ce n'est à visée antalgique et/ou antipyrétique.

9. Le choix d'un AINS à visée anti-inflammatoire ou antalgique

Il est en bonne partie guidé par la fréquence et la gravité des effets indésirables, lesquels apparaissent le plus souvent dans les premières semaines de traitement.

10. Les différents effets indésirables

Les effets indésirables digestifs apparaissent chez 20 à 40 % des patients après quelques semaines de traitement à posologies anti-inflammatoires. Les ulcères gastroduodénaux symptomatiques, les hémorragies digestives et les perforations, constituent l'essentiel. Néanmoins, le risque rapporté au nombre des prescriptions apparaît faible. Des posologies élevées, un âge supérieur à 60 ans, des antécédents de complications gastro-intestinales sévères représentent des facteurs de majoration du risque. Les effets indésirables digestifs mineurs et surtout sévères sont significativement moindres sous inhibiteurs COX-2 sélectifs. Il est important de noter que ces bénéfices ne sont intéressants que par rapport à des traitements par AINS de plus d'une semaine à des posologies anti-inflammatoires. Les inhibiteurs sélectifs de COX-2 auraient les mêmes effets indésirables rénaux que les AINS classiques. La COX-2 n'est pas exprimée par les plaquettes. Les inhibiteurs spécifiques n'inhibent pas l'agrégation plaquettaire et n'entraînent pas d'allongement du temps de saignement. Les inhibiteurs spécifiques, au même titre que les AINS classiques, ne sont pas recommandés chez les femmes désirant une grossesse. Par contre, chez les patients ayant un asthme déclenché par la prise d'AINS classiques, celle d'inhibiteurs COX-2 sélectifs n'induirait pas de crise d'asthme. Enfin, ces inhibiteurs sélectifs COX-2 ne sont pas actuellement indiqués chez l'enfant ni en pathologie ORL.

Pharmacokinetics of non-steroidal anti-inflammatory drugs and ENT diseases : the 10 key points

1. Background

Non-steroidal anti-inflammatory drugs (NSAID) belong to a variety of chemical classes with no common features except the absence of a steroid structure. Their primary effect is pain relief, but also with anti-pyretic and anti-inflammatory effects. Basically prescribed for symptomatic relief, they do not have a curative effect on chronic disease processes.

2. Inflammatory effects of prostanoids (thromboxane A 2 and prostaglandins)

Inflammation basically results from the pro-algogenic and vascular effects of prostanoids. Their pro-algogenic effects are explained by sensitization of nociceptive nerve endings to the stimulating effect (algogenic) of kinins (bradykinin), serotonin and histamine. In addition, production of prostanoids in the brain has a thermoregulatory effect.

3. Mode of action

NSAID have a common effect, inhibiting the production of prostanoids via reduced activity of two cyclo-oxygenases (COX-1 and COX-2). COX-2 is an isoform predominantly expressed during the inflammatory process. Excepting two compounds recently marketed (celecoxib, rofecoxib) selective for COX-2, all other NSAID have few or no selective properties. COX-1 is implicated in the regulation of many physiological functions. Inhibition of COX-1 explains most of the classical side effects of non-selective NSAID.

4. Comparison

It is classical to emphasize the interindividual variable anti-inflammatory and antalgesic effects of the different NSAID without developing a coherent explanation. In addition, it is very difficult to make objective comparisons between different NSAID because of the different sizes of the study populations, indications and dosages. There is no evidence favoring a given NSAID on the basis of its anti-inflammatory or antalgesic effect in a given indication ; no hierarchy in terms of efficacy can be established. For acute pain, it is preferable to use oral NSAID absorbed rapidly to achieve rapid relief.

5. Paracetamol

This antalgesic, antipyretic drug has no anti-inflammatory action. Its mechanism of action remains to be fully elucidated. It is not a member of the NSAID class and is a poor inhibitor of COX, particularly COX-2 (30 % maximal inhibition). For identical dose (1 - 3 g/d), the antalgesic activity of paracetamol is comparable to that of aspirin for pain in general. There does not appear to be any difference in the anti-pyretic efficacy between NSAID and paracetamol.

6. Official indications

In general, NSAID are not indicated for anti-inflammatory action in the ENT conditions discussed here. It this light, the official indications in France published on November 14, 1988 concerning ENT disease in children and adults without risk factors is most noteworthy. It is stipulated that there is no need to institute NSAID treatment at an anti-inflammatory dose in combination with general antibiotic therapy, except when there is an important inflammatory component. This guideline does not concern NSAID at antalgesic and antipyretic doses used for ENT conditions with or without an infectious component.

7. Selective inhibitors of COX-2

Selective inhibitors are only indicated in two chronic inflammatory diseases : osteoarthritis and rheumatoid arthritis. There is no indication for these inhibitors in ENT disease. The only beneficial effect that has been demonstrated to date for the use of selective inhibitors of COX-2 is better digestive tract tolerance.

8. Role of prostanoids in the clinical expression of allergic rhinitis

It is insufficient to warrant use of NSAID in this disease, particularly due to the efficacy of anti-H1 and local corticosteroids. NSAID are not indicated in nasal polyposis and are even contraindicated in case of intolerance to NSAID, observed in about 15-20 % of all patients with nasal polyposis. However, local application of lysine aceytlsalicylate at progressive doses from 20 mg to 4 mg can reduce relapse by half after polypectomy. There is no proof of the efficacy of NSAID in chronic sinusitis and their efficacy has not been studied in laryngitis. Finally, there is no sufficient evidence, either from experimental data or clinical trials, to recommend NSAID for otitis, with the exception for an antalgesic and/or antipyretic effect.

9. Chosing an anti-inflammatory or antalgesic NSAID

The choice is generally guided by the frequency and severity of undesirable effects. These undesirable effects often appear during the first weeks of treatment.

10. Different adverse effects

Digestive tract effects appear in 20 to 40 % of the patients after a few weeks of treatment using anti-inflammatory doses. Symptomatic gastroduodenal ulcers, digestive bleeding, and perforations are the most serious adverse effects of NSAID. Nevertheless, the risk of such complications, compared with the number of prescriptions, is very low. At high dose (anti-inflammatory dose), age over 60 years and history of severe gastrointestinal complications are factors increasing the risk of severe gastorintestinal adverse effects of NSAID. Minor adverse effects, and more importantly severe adverse effects, are significantly reduced with selective COX-2 inhibitors compared with classical NSAID. It is important to note that these beneficial effects in terms of tolerance are not better than with NSAID treatments except for treatments at anti-inflammatory doses for more than one week. Selective COX-2 inhibitors would have the same adverse effect on the kidney as classical NSAID, as pointed out by the precautions for use published by the manufacturers. COX-2 is not expressed by platelets. Specific inhibitors do not inhibit platelet aggregation and do not lengthen bleeding time. Specific inhibitors, like classical NSAID, are not recommended for women desiring pregnancy, especially because the risk of a teratogenic effect has not been excluded. Conversely, for patients with asthma triggered by classical NSAID, selective COX-2 inhibitors do not trigger acute asthma. Finally, selective COX-2 inhibitors are not currently indicated for children and not for ENT disease.


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Vol 30 - N° 39-40

P. 70-79 - décembre 2001 Retour au numéro
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