De la psychomotricité à la corporéité - 02/10/14
Résumé |
Introduction |
Le nombre des « tribus de la psychomotricité » n’a fait que croître au cours du XXe siècle. Force est de constater que ce concept de « psychomotricité » est devenu une nébuleuse insaisissable, n’ayant ni centre précis, ni périphérie discernable. Cela paralyse le développement et la reconnaissance sociale d’une profession qui cherche à se construire comme un « système social autonome et intégré ».
Réflexion |
Les mots « psychomotricité » et « éducation, rééducation, thérapie psychomotrices » sont entrés dans le langage courant, voire dans nos mœurs. Mais nous sentons qu’ils ne conviennent pas sur un plan épistémologique. Ils perpétuent, par ces deux termes accolés – « psyché » et « motricité » – ce que notre langue et nos structures mentales associées y lisent : ce « foutu dualisme », cette juxtaposition de deux domaines alors que la profession se bat pour démontrer le contraire et pour traduire une vision holistique de l’être humain. Même si la pensée phénoménologique nous invite à voir le « corps » comme « présence de la personne au monde », le terme « psychomotricité » véhicule encore, aujourd’hui, deux formes de dualisme : d’une part un dualisme « corps-esprit » qui distingue l’activité motrice de l’activité socio-affective et cognitive, et d’autre part un dualisme d’approche scientifique qui oppose de plus en plus la neurophysiologie de la motricité à la psychanalyse. Dans ce combat, nous ne pouvons que constater l’irrésistible glissement, voire la dérive, des pratiques psychomotrices du pôle moteur vers le pôle psychique. Comme plusieurs auteurs des années 1970, nous pensons qu’il serait judicieux d’abandonner ce terme de « psychomotricité » pour lui préférer, définitivement celui de « corporéité ». Le monde de l’« éducation physique », probablement dans une même démarche sémantique, est bien devenu, fin du XXe siècle, celui des « sciences de la motricité » ! Le terme « corporéité » se réfère à « avoir » un corps mais aussi « être » un corps. Cette polarité est au centre de l’analyse phénoménologique de la notion de « corps », qui vise à mettre l’accent sur l’expérience vécue par sa corporéité, par sa capacité à s’imposer comme conscience de notre « être » dans le monde. Si le paradigme « psychomotricité » se veut définir cette « interaction des différentes fonctions motrices et psychiques », il n’en reste pas moins qu’une simple juxtaposition de ces deux domaines de pratique et de recherche. Par contre, la « corporéité » conceptualise parfaitement le « corps vécu dans sa totalité, dans son unité », concept premier et holistique des métiers de la psychomotricité, dans leurs actions éducatives, ré-éducatives ou thérapeutiques. Cela nous parait à la fois plus claire et plus précise. Cela nous parait aussi plus adaptée à une profession qui cherche à se distinguer des professionnels de la « motricité » (éducation motrice et sportive, kinésithérapie, ergothérapie…) ou des professionnels de la « psychologie ».
Conclusion |
Viendront peut-être des temps où les diplômés « spécialistes, maîtres, thérapeutes en psychomotricité » ou « Bachelors en rééducation psychomotrice »…, deviendront des diplômés « Spécialistes, maîtres, thérapeutes, bachelors en éducation ou en rééducation,… de la corporéité », voire, c’est une évidence, des « Masters en Sciences de la Corporéité ».
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Vol 29 - N° S
P. S59 - octobre 2014 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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