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Le TXIB (diisobutyrate de 2,2,4-triméthyl-1,3-pentanediol), solvant de peintures à l’eau et possible déclencheur de syndromes collectifs - 14/11/14

Doi : 10.1016/j.toxac.2014.09.038 
C. Legout a, J. Langrand b, D. Escudeiro c, N. Buckenmeier d, J. Brière e, E. Faure f, S. Vandentorren a, R. Garnier b,
a Cellule de l’InVS en régions (Cire) Île-de-France-Champagne-Ardenne 
b Centre antipoison de Paris, hôpitaux universitaires Lariboisière-St-Louis-Fernand-Widal, université Paris-Diderot 
c Laboratoire Quad-Lab, 91090 Lisses 
d Agence régionale de santé Île-de-France, délégation territoriale 94 
e Institut de veille sanitaire (InVS), Département santé-travail 
f Laboratoire central de la Préfecture de police de Paris 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

Le 28 mai 2013, à leur arrivée sur leur lieu de travail, 5 employés d’une agence bancaire se sont plaints d’une odeur âcre et de sensations d’irritation des yeux et des voies aériennes supérieures. Les pompiers, appelés sur place, ont constaté l’odeur suspecte et la sensation d’irritation ; ils ont fait évacuer l’agence. La direction a pris la décision de fermer les locaux. Conseillée par son médecin du travail, elle a diligenté une campagne d’évaluation de la qualité de l’air. Deux tentatives de réintégration des locaux, le 11 juillet et le 6 août, ont été des échecs, en raison de la persistance de l’odeur suspecte et de la réapparition de la sensation d’irritation. Le 28 août, le médecin du travail a demandé son assistance au Centre antipoison de Paris (CAPP). Celui-ci a pris contact avec la Cellule de veille d’alerte et de gestion sanitaire de l’Agence régionale de santé (ARS). La suite des investigations a été conduite en collaboration avec la Cire et la délégation territoriale 94 de l’ARS.

Méthodes

Les investigations conduites ont consisté à :

– recenser les personnes exposées dans l’agence ou à proximité, recueillir leurs plaintes éventuelles et les circonstances de survenue de celles-ci ;

– visiter les locaux ;

– recenser, évaluer et mettre en perspective les investigations déjà conduites ;

– les compléter, en tant que nécessaire.

Résultats

Quinze personnes ont rapporté des troubles associés au séjour dans les locaux de l’agence : 7 lors de l’épisode initial (5 employés et deux voisins), avec récidive à la réexposition chez 4 employés ; 8 à l’occasion d’une visite des locaux, plus de deux mois après l’épisode initial. Les plaintes rapportées sont stéréotypées : perception d’une odeur anormale et sensation d’irritation des yeux et des voies aériennes supérieures, dans tous les cas ; céphalées dans 4, sensations vertigineuses et nausées-vomissements dans 2. Les investigations conduites par leur médecin, chez 3 salariés, n’ont pas révélé d’anomalie. L’enquête a montré que l’odeur semblait pouvoir être imputée à la mise en peinture de 3 des bureaux de l’agence, la veille de la survenue des troubles. La composition des peintures a été expertisée par le CAPP : il s’agissait de peintures acryliques à l’eau, dont les seuls composants volatils et odorants étaient l’ammoniac et le TXIB, présents en faibles concentrations (respectivement<0,1 % et<1 %). L’évaluation de la qualité de l’air a porté sur la température, l’hygrométrie, les poussières, le dioxyde et le monoxyde de carbone, les aldéhydes et les composés organiques volatils (COV). La seule anomalie observée est la présence (9jours après l’incident initial) de TXIB dans 3 des pièces investiguées, à des concentrations comprises entre 28 et 177μg/m3.

Discussion

Une étude expérimentale a montré que l’odeur du TXIB, décrite comme âcre, était détectable, dès que sa concentration atmosphérique atteint 12μg/m3 (1 ppb) ; des sensations d’irritation des yeux et des voies aériennes supérieures sont rapportées pour des concentrations de quelques ppb. La pollution par le TXIB pouvait donc expliquer la gêne rapportée. Cette hypothèse a été confirmée par la disparition de l’odeur, 4 mois après la mise en peinture (l’analyse atmosphérique faite alors n’a pas détecté le TXIB, mais la limite de détection de la méthode utilisée n’était que de 1ppm). L’agence a pu être réouverte, sans nouvel incident chez les employés et les clients.

Conclusion

Le TXIB (et/ou son homologue monoester, le Texanol®) sont présents à faibles concentrations (0,5–5 %) dans de très nombreuses peintures acryliques (et dans les dalles vinyliques de certains revêtements de sols). Leurs concentrations dans l’air peuvent atteindre plusieurs dizaines de ppb dans des pièces fraîchement repeintes et elles ne décroissent que lentement, en raison de la faible volatilité de ces solvants. À ces concentrations atmosphériques aucun effet systémique n’est attendu, mais une odeur âcre et une sensation d’irritation des yeux et des voies aériennes sont perceptibles ; ils peuvent être à l’origine de plaintes et de malaises des occupants, surtout quand une information documentée sur les risques ne peut être rapidement délivrée.

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Vol 26 - N° 4

P. 227 - décembre 2014 Retour au numéro
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