Étude épidémiologique des mouvements volontaires du membre fantôme dans les suites d’une amputation majeure de membre supérieur - 05/12/14
Résumé |
Quatre-vingt à 98 % des personnes amputées rapportent l’existence d’un membre fantôme. Le membre fantôme a surtout été décrit au travers des sensations douloureuses ou non qui lui sont associées, alors que les mouvements volontaires du membre fantôme rapportés par certains patients ont été peu étudiés. Dans la littérature, ces mouvements sont souvent assimilés à des mouvements imaginés. Ils diffèrent pourtant de ces derniers par les mécanismes neurophysiologiques impliqués : lors des mouvements du membre fantôme, une activité électrique est enregistrée au niveau de muscles du membre résiduel et les zones corticales impliquées sont différentes. L’objectif de cette étude est de décrire l’épidémiologie des mouvements volontaires de membre fantôme dans une population de patients amputés de membre supérieur. Un entretien semi-dirigé sur les sensations douloureuses ou non du membre fantôme et sur l’existence de mouvements volontaires du membre fantôme a été réalisé chez des patients suivis dans le service d’appareillage dans les suites d’une amputation majeure de membre supérieur. Il a été demandé aux patients de décrire leurs sensations actuelles mais également leurs sensations antérieures. Vingt-quatre personnes ont été interrogées dans les suites d’amputations acquises à des niveaux entre la désarticulation radio-carpienne et la désarticulation scapulo-thoracique dont 3 patients quadriamputés et 1 patient biamputé de membre supérieur. Les délais post-opératoires sont compris entre 1 mois et 48ans. Vingt et un patients décrivent des sensations non douloureuses de membre fantôme, 9 patients un membre fantôme douloureux. Vingt et un des 24 patients peuvent réaliser des mouvements volontaires du membre fantôme. Huit types différents de mouvements de la main, du poignet et du coude sont retrouvés. L’existence de mouvements volontaires du membre fantôme est rapportée de façon précoce (quelques semaines) en post-opératoire par certains patients : 5/7 patients interrogés à moins de 6 mois de leur amputation. Contrairement à ce qui est rapporté dans des études antérieures, des mouvements de membre fantôme restent réalisables par certains patients à distance de l’amputation : 4/5 patients décrivent la persistance de ces mouvements à plus de 10ans de leur amputation (jusque 48ans post-amputation). Cependant 3/21 patients décrivent la disparition de ces mouvements volontaires. Pour les patients capables de réaliser des mouvements ; ils concernent, le plus souvent, les parties les plus distales du membre fantôme : tous les patients réalisent des mouvements au niveau de la main fantôme. Les mouvements volontaires du coude fantôme ne sont réalisables que par des personnes capables de mouvements du poignet et de la main : seulement 5 patients parmi les 16 patients amputés au dessus du coude ayant des mouvements volontaires. Au moment de l’entretien, 6/18 patients signalent une fatigue lors de la réalisation de ces mouvements et comme dans la littérature, ces mouvements sont de faible amplitude. Deux patients décrivent l’apparition de douleurs de membre fantôme lors de la réalisation de ces mouvements alors que 2 patients rapportent utiliser ces mouvements pour soulager leurs douleurs. L’existence de mouvements volontaires du membre fantôme semble donc plus fréquente et plus durable en post-opératoire que ce qui a été décrit précédemment dans la littérature. L’évolution spontanée de la capacité à mobiliser volontairement le membre fantôme et les possibilités d’entraînement sont à évaluer. Des études neurophysiologiques complémentaires sont nécessaires pour une meilleure compréhension des mécanismes physiopathologiques impliqués : réorganisation neuromusculaire périphérique, plasticité corticale… L’utilisation de ces mouvements volontaires de membre fantôme pourrait permettre une commande plus intuitive des prothèses myoélectriques. Leur utilisation dans la prise en charge des douleurs de membre fantôme reste à apprécier.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Mots clés : Amputation membre supérieur, Membre fantôme, Mouvement volontaire
Plan
Vol 33 - N° 6
P. 445 - décembre 2014 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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