Valeur juridique des recommandations de bonne pratique : cas de l’hormonothérapie des cancers du sein - 19/03/15
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Résumé |
Le 27 avril 2011, le Conseil d’État a accordé un certain statut juridique aux Recommandations de bonne pratique (RBP) de la Haute Autorité de santé (HAS) en considérant que celles-ci « doivent être regardées comme des décisions faisant grief susceptibles de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir ». Le juge est arrivé à cette conclusion par un raisonnement quasi syllogistique : si le code de déontologie oblige les médecins à soigner selon les données acquises de la science et si les RBP de la HAS reflètent « notamment » ces mêmes données, alors, pour prendre en charge un patient, il convient d’appliquer ces RBP telles qu’émises par la HAS. Bien que la responsabilité médicale ne soit pas engagée dans cette affaire, il convient de s’interroger sur les retombées de cet arrêt pour les professionnels de santé. Cet arrêt pose un certain nombre de problèmes pour la pratique médicale quotidienne. Par exemple, les référentiels concernant la prise en charge des cancers du sein hormonodépendants sont nombreux. En France, la HAS et l’Institut national du cancer (INCa) ont édité un guide Affection de longue durée (ALD) sur le cancer du sein en janvier 2010. À ce référentiel national s’ajoutent les guides édités par les réseaux régionaux de cancérologie (RRC). Les conférences de consensus de Nice Saint-Paul-de-Vence et de Saint-Gallen (Suisse) publient également des avis. Aux États-Unis, le National Comprehensive Cancer Network (NCCN) et l’American Society of Clinical Oncology (ASCO), et en Europe, l’European Society of Medical Oncology (ESMO) émettent des recommandations. Les RBP de la HAS sont donc loin d’être la seule source d’informations pour les cliniciens et ces différents documents se contredisent parfois entre eux. De plus, ceux-ci peuvent rapidement devenir obsolètes, ce qui limite encore leur pertinence. Pourtant, dans l’esprit du juge, tout se passe comme si les données acquises de la science représentaient un ensemble de données homogènes et objectives, non sujettes à interprétation. Or, la connaissance de la pratique montre qu’il n’en est rien. La vision qu’a le juge de cette notion semble peu appropriée à la technicité et la complexité de la pratique quotidienne. Après une analyse juridique de la décision du Conseil d’État, nous étudierons les conséquences potentielles que cette décision peut engendrer en prenant l’exemple de l’hormonothérapie des cancers du sein.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Abstract |
On April 27th 2011, the French Supreme Administrative Court (Conseil d’État) granted the Recommendations for Good Practice set out by the French National Authority for Health (Haute Autorité de santé - [HAS]) a legal status, considering that they “must be regarded as (…) decisions which may be subject to an action for annulment”. The judge came to this conclusion through a quasi-syllogistic reasoning. Firstly, the French Code of Medical Ethics requires physicians to care for their patients in accordance with established scientific knowledge. Secondly, the HAS recommendations recall in particular this established scientific knowledge. Treating patients according to established scientific knowledge requires then that physicians follow the HAS recommendations. While the case at bar does not directly involve liability for medical malpractice – since the applicant only sought to have an HAS recommendation declared void – it is nonetheless necessary to examine the impact of this ruling for health professionals. Indeed, this decision raises a number of concerns for everyday medical practice. Guidelines concerning the endocrine treatment of hormonodependant breast cancers are plentiful. In January 2010, the HAS and the French National Institute for Cancer (Institut national du cancer) issued a “Guide for long-term illnesses – Breast cancer” (Guide ALD - Cancer du sein). In addition to these nation-wide guidelines, the Regional Networks for Cancer (réseaux régionaux de cancérologie) issued their own recommendations. Other guidelines are also set out in the framework of consensus conferences, such as the Nice Saint-Paul-de-Vence (France) and St. Gallen (Switzerland) conferences. In the United States, the National Comprehensive Cancer Network (NCCN) and the American Society of Clinical Oncology (ASCO), and in Europe, the European Society of Medical Oncology (ESMO) make recommendations as well. Therefore, the HAS recommendations are hardly the sole source of information for physicians and these documents sometimes contradict each other. Besides, these can quickly become obsolete, what still limits their relevance. Nevertheless, in the judge's mind, there is no place for conflicting interpretations; scientific knowledge must be consistent, homogeneous and objective. However, the reality is quite the opposite. This simplistic vision shared by judges does not seem to grasp the complexity of everyday medical practice. After a critical reading of the Conseil d’État judgment, we shall consider the potential issues and concerns raised by this ruling in medical practice using the example of hormone therapy for breast cancer patients.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Mots clés : recommandations de bonne pratique, valeur juridique, hormonothérapie, cancer du sein
Key words : guidelines, legal value, hormonotherapy, breast cancer
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Vol 101 - N° 3
P. 283-294 - mars 2014 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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