N-acétylcystéine pour l’intoxication au paracétamol : qui traiter et selon quel schéma optimal ? - 29/05/15
Résumé |
Introduction |
L’intoxication au paracétamol, médicament disponible dans tous les foyers, est l’une des plus fréquentes dans le monde et source persistante de décès toxiques. La N-acétylcystéine (NAC) en est l’antidote de référence. L’objectif de cette présentation est de faire un point sur les dernières modifications concernant les indications et modalités d’administration de la NAC, en se basant sur les recommandations des sociétés savantes internationales et les données originales publiées.
Résultats |
Selon les recommandations formalisées d’experts français publiées en 2006, la NAC est indiquée au cours des intoxications graves au paracétamol (dose supposée ingérée≥125mg/kg), confirmées par le dosage de paracétamol interprété sur le nomogramme de Rumack et Matthew (zones de toxicité possible ou probable). Plusieurs protocoles sont applicables chez l’adulte et l’enfant : par voie veineuse, 150mg/kg en 1h, suivie de 50mg/kg en 4h puis de 100mg/kg sur 16h et par voie orale, en l’absence de vomissements ou d’utilisation du charbon activé, 140mg/kg suivi de 70mg/kg/4h pendant 72h. L’effet protecteur est maximal si l’antidote est administré moins de 10h après l’ingestion. Le seuil de toxicité est abaissé en cas d’alcoolisme chronique, de malnutrition, de prise d’inducteurs enzymatiques du cytochrome P450, de prise répétée de paracétamol, de prise simultanée de triméthoprime/sulfaméthoxazole ou de zidovudine. Si le patient est vu au-delà de 24h ou si des signes d’hépatite cytolytique sont déjà présents, la NAC à 300mg/kg/24h doit être administrée jusqu’à la guérison. Des réactions anaphylactoïdes peuvent survenir, surtout pendant l’administration de la dose de charge et chez l’asthmatique. Elles sont souvent liées à une administration trop rapide de la NAC. Récemment dans un essai randomisé, un schéma IV raccourci (100mg/kg de NAC en 2h suivi de 200mg/kg en 10h, soit 12h de perfusion) a permis une amélioration significative de la tolérance digestive et une réduction des réactions anaphylactoïdes. Il est aussi à noter que, bien que rarement utilisé en France, le schéma oral de 72h peut être réduit à environ 20h en toute sécurité. Curieusement, un essai ouvert récent a fait le choix de rallonger la durée de perfusion de NAC (140mg/kg en dose de charge puis 70mg/kg/4h pour 12 doses IV), afin de réduire tout risque d’hépatotoxicité qui pourrait persister.
La dose minimale de paracétamol justifiant l’admission à l’hôpital pour l’administration de NAC est discutée et varie selon les pays. Un autre débat concerne la hauteur de la ligne sur le nomogramme qui naît de la paracétamolémie à H4 imposant un traitement par NAC des patients intoxiqués, avec des recommandations variables selon les pays. Cette ligne se situe à 150mg/L en France, aux États-Unis, au Canada et en Australie, a été abaissée en 2012 à 100mg/L en Grande Bretagne et a carrément été supprimée aux Danemark. Plus cette ligne est basse et plus le nombre de patients traités et de ce fait la probabilité d’effets secondaires à la NAC augmentent. Plus cette ligne est élevée et plus le risque de ne pas traiter des sujets vulnérables à risque d’hépatotoxicité augmente, justifiant la politique du risque zéro adopté par le Danemark. Dans ce pays, tous les patients admis pour intoxication au paracétamol sont traités par la NAC selon le protocole de Prescott. La mesure de la paracétamolémie n’est utilisée que pour confirmer le diagnostic. Le nomogramme n’est jamais utilisé. Cependant, malgré l’augmentation observée des effets secondaires liés à la NAC et du coût de prise en charge des patients intoxiqués, le Danemark a persévéré dans cette voie, préférant apporter des modifications au protocole de traitement et créer des règles d’arrêt de la perfusion de NAC, pour en optimiser la tolérance.
Conclusion |
Les indications et modalités exactes d’administration de la NAC, même reconnue par tous comme antidote de référence des intoxications au paracétamol, restent un sujet de discussions scientifiques visant à trouver le meilleur équilibre entre nécessité de traiter tous les patients à risque d’hépatotoxicité et souhait de minimiser les effets secondaires. De nouveaux biomarqueurs et indices pronostiques d’hépatotoxicité pourraient dès lors trouver une place pour aider à résoudre ces débats.
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Vol 27 - N° 2
P. 126 - juin 2015 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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